Télémaque; mais je n'ai point prétendu entrer dans un examen fuivi de tout le Poëme. Les bornes que je dois me prefcrire, ne me le permettent pas : il feroit cependant à fouhaiter que quelque main habile voulut l'entreprendre: il en reviendroit au Public une utilité confiderable; l'ouvrage même n'en feroit pas moins admiré, mais il le feroit avec plus de connoiffance. A M. L'EVÊQUE DE SOISSONS,* En lui donnant un QUINTILIEN de la Traduction d'Horatio Tofcanella. JE vous fais un préfent capable de me nuire. Chez vous Quintilien s'en va touts nous dé truire : Car enfin qui le fuit? qui de nous aujourd'hui rateurs. *Ce Prélat étoit apparemment M. de Sillery. Si nous les en croyons, on ne peut fans foiblesse Rendre hommage aux Efprits de Rome & de la Gréce. Craindre ces Ecrivains! On écrit tant chez nous. La France excelle aux Arts; ils y fleurissent touts. Notre Prince avec art nous conduit aux allarmes; Et fans art nous louerions le fuccès de fes armes ! Dieu defapprendroit-il à former des talents? Les Romains & les Grecs font-ils feuls excellents? Ces difcours font fort beaux, mais fort fouvent frivoles : Je ne vois point l'effet répondre à ces paroles; Et faute d'admirer les Grecs & les Romains, On s'égare en voulant tenir d'autres chemins. Quelques imitateurs, fot bétail, je l'avoue, Suivent en vrais moutons le Pasteur † de Man toue : J'en use d'autre forte ; & me laissant guider, Peut entrer dans mes Vers fans-nulle violence, + Virgile. Je l'y tranfporte, & veux qu'il n'ait rien d'af fecté, Tâchant de rendre mien cet air d'antiquité. On me laiffe tout feul admirer leurs attraits. Homere, & fon rival, font mes Dieux du Parnaffe + Je le dis aux rochers: on veut d'autres difcours: Ne pas louer fon fiécle, eft parler à des fourds. Je le loue ; & je fçai qu'il n'eft pas fans mérite: Mais près de ces grands noms notre gloire est petite. Tel de nous, dépourvû de leur folidité, N'a qu'un peu d'agrément fans nul fond de beauté. Je ne nomme perfonne : on peut touts nous connoître. Je pris certain Auteur ✶ autrefois pour mon maître : Il penfa me gâter : à la fin, grace aux Cieux, Quelques Auteurs de ce temps-là affectoient les antitheles, ces fortes de penfées qu'on appelle concetti Cela 4 fuivi immédiatement Malherbe. L'Auteur avoit du bon, du meilleur ; & la France On me dit là-deffus : De quoi vous plaignezvous ? De quoi ! Voilà mes gens auffi-tôt en courroux, Ils fe mocquent de moi, qui plein de ma lecture Vas par tout prêchant l'art de la fimple nature. Ennemi de ma gloire, & de mon propre bien, Malheureux, je m'attache à ce goût ancien. Qu'a-t'il fur nous, dit-on, foit en vers, foit en profe? L'antiquité des noms ne fait rien à la chose, L'autorité non plus, ni tout Quintilien. Confus à ces propos j'écoute, & ne dis rien: J'avouerai cependant qu'entre ceux qui les tien nent, J'en vois dont les Ecrits font beaux & fe fou tiennent. Je les prife; & prétends qu'ils me laiffent auffi Révérer les Héros du Livre que voici. Recevez leur tribut des mains de Toscanelle :* Ne vous étonnez pas qu'il donne pour modelle 1 A des Ultramontains un Auteur fans brillants. Quand notre fiécle auroit fes fçavants & fes fages, En trouverois-je un feul approchant de Platon ? La Grece en fourmilloit dans fon moindre Canton. La France a la Satire, & le double Théatre. projet. & c'eft un haut J'attends beaucoup de l'art, beaucoup plus du fujet : Il eft riche, il eft vafte, il eft plein de noblesse, Il me feroit trembler Rome, & Grece. pour pour la Quant aux autres talents,l'Ode qui baiffe un peu, Veut de la patience, & nos gens ont du feu, |