Courtisans défœuvrés, de votre inquiétude Vous y pourriez trouver un sûr contre-poison. Ecoutez, comme nous, la voye de la Raison, Elle vous tirera des bras de la molleffe, Vous fera voler aux rives du Permeffe. Là nous ne formons point de brigues, de complots, Qui puiffent de l'Etat renverser le repos. Qu'y peut-on cenfurer ? des riantes images? Pour fruit de nos travaux notre ame fible, les mœurs. enfin pai Aux traits des paffions fe trouve inacceffible. Non, nous connoiffons mieux quel eft le vrai bonheur? Que les ambitieux encenfent leur idole; Sous les dehors trompeurs d'une grandeur fri vole, Qu'ils cachent les foucis, les remords dévorants, Du plus heureux coupable implacables Tyrans : leurs fers enfants de l'impof Nous voyons que ture, N'ont fur un vil métal qu'une mince dorure; Suivre l'illufion & fuir la vérité ? Pour nous, cher le Petit, plus heureux ou plus fages, Ne laiffons pas fans fruit de pareils avanta tages; Mais penfons, pour bannir tout air préfomp tueux, Qu'il faut être fçavants bien moins que vertueux Les Traducteurs modernes de M. de Thou, sappropriérent il y a environ douze ans, la traduction des Mémoires de M. de Thou, faite par M. le Petit, Grand-pere de celui à qui cette Epître eft adreffée par M. Coftard pere de notre Poëte. Meffieurs d'Ifs & le Petit, fils, ont téclamé l'Ouvrage de leurs peres ; & le Public a approuvé le foin qu'ils prenoient de la réputation de ceux à qui ils devoient la vie, & l'amour des Lettres. ** LETTRE D'ALCIBIADE A PERICLÈS, C'je fus mis dès mon enfance entre les 'EST par vous, grand Periclès, que mains de Socrate, & c'eft à vous que je fuis redevable des inftructions que j'en ai reçûës, & de touts les foins qu'il a pris pour me former à la vertu. Je vous parle fouvent de cet homme incomparable parce que touts les moments que je paffe avec lui, font autant de nouvelles occafions qui me font appercevoir de vos bontés, & de la reconnoiffance que je vous dois. Je ne fçai point ce que les Dieux me préparent; mais je fçai bien que depuis le moment de ma naiffance jufqu'à ce jour, je n'ai que des graces à leur rendre des faveurs particulieres qu'ils m'ont accordées, en me donnant un tel Oncle que vous, & un tel maître que Socrate. Dès mes premieres années, la mort me priva de mon pere Clinias; mais j'étois trop jeune encore, pour comprendre la grandeur de cette perte, & je trouvai que vos foins pour moi l'avoient déja réparée, quand je fus capable de la reffentir. Auffi, comme l'Etre eft le bienfait que j'ai reçû de Clinias, le fecond, & peut-être le plus confidérable que je lui doive, eft celui de vous avoir prié en mourant, de préfider à ma jeuneffe. Si les Morts pouvoient repaffer le Cocyte, je ne doute point que fon Ombre reconnoiffante ne revînt en ces lieux, & qu'elle ne rompît le filence qu'elle garde aux Champs Elifées, pour vous rendre mille actions de graces d'avoir fi dignement répondu à fon attente. Si j'étois affez malheureux pour n'avoir pas des inclinations dignes de vous & de lui, ce ne feroit ni votre faute ni celle du fage Socrate. Vous m'inftruifez également l'un & l'autre ; je trouve dans fes préceptes ce que je dois apprendre ; & dans vos exemples, ce que je dois faire. Soit que je vous confidere à la tête des affaires, ou à la tête des Troupes de la République, je vois que je n'ai qu'à vous imiter, pour mettre en ufage ce qu'il m'enfeigne. Auffi, yos grandes actions font une fi forte impreffion fur fon efprit, qu'il ne prend point d'autres exemples que dans ma famille, pour me donner de l'émulation, & pour me rendre un jour recommandable, en me faifant marcher fur vos traces. C'eft à vous, grand Périclès, à qui je dois rendre témoignage de fon application; il n'oublie rien pour m'exciter à la veritable gloire; & pour me rendre capable de fervir utilement ma Patrie, il fe fait une étude finguliere de mes inclinations & de mes mœurs, afin de retrancher ce qu'il ya de mauvais, & de perfectionner ce que Ia Nature y a mis d'avantageux. Loin de me donner du dégoût pour la vertu, én m'y affujettiffant avec rudeffe, il tâche au contraire de mé l'infpirer avec douceur, & me force infenfiblement à l'aimer', avant que de m'engager à la fuivre. La Raison & la Sageffe l'éclairent toûjours dans les inftructions qu'il me donne; il eft fi fcrupuleufement attaché à l'une & à l'autre, que jamais l'humeur ni le caprice n'ont pû l'en féparer, ni dans ce qu'il m'a deffendu, mi dans ce qu'il m'a ordonné. Il m'a toûjours traité en ami, au lieu de me corriger en maître les careffes ont été les feules armes dont il s'eft fervi pour combattre mes deffauts; & touts les foins que je lui dois, ont été fi doux, que pour me retirer de mes foibleffes, il ne m'a jamais donné que des confeils, au lieu de me donner des leçons. |