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trevoir l'avancement des uns dans l'inaction des autres, la fortune des premiers dans la ruine des seconds. La patrie nous apparaîtra comme une mère, qui n'a d'intérêt ni à la ruine, ni à l'humiliation d'aucun de ses enfants, qui s'honore des services et des talents de chacun, et qui ambitionne indistinctement pour tous le succès et l'élévation.

DE

LITTÉRATURE MÉDICALE:

ÉTUDES SUR LES MÉDECINS GRECS,

HIPPOCRATE, GALIEN, PAUL D'ÉGINE E ;

Par J.-E. PÉTREQUIN,

Ex-chirurgien en chef de l'Hôtel-Dieu de Lyon, vice-président de la Société de Médecine chevalier de la Légion-d'Honneur, etc.

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Galien est, sans contredit, après Hippocrate, le médecin le plus considérable de l'antiquité. Aucun autre n'a exercé une aussi large influence sur les destinées de la médecine. Aucun autre n'a joui d'une aussi grande vogue, disons mieux, d'un aussi brillant empire dans le monde médical; et si, de nos jours, les progrès des sciences lui ont ravi son sceptre et sa domination, du moins conserve-t-il encore une éclatante auréole.

Claude Galien naquit à Pergame, dans l'Asie-Mineure, l'an 131 de J.-C., sous le règne d'Adrien. Il nous apprend lui-même (De libris propriis, de ordine Librorum suorum) que son père, Nicon, habile architecte de Pergame, fut son premier maître; versé dans la connaissance des mathéma

tiques, de la logique et de la littérature (1), il l'initia de bonne heure aux sciences et aux lettres. A 15 ans, Galien aborda l'étude de la philosophie, et, à 17 ans, il y joignit celle de la médecine. Il fréquenta les écoles et les professeurs les plus célèbres de son temps: il entendit tour à tour les leçons des stoïciens, des académiciens, des péripatéticiens et des épicuriens. Riche de ces connaissances, il fit de grands progrès dans la médecine. Il visita successivement les écoles médicales de Smyrne, de Corinthe, et enfin, d'Alexandrie, où il séjourna plusieurs années. Il nomme comme ses maîtres, Satyrus, élève de Quintus, et Pélops, de Smyrne, qui, tous les deux, suivaient ou croyaient suivre la doctrine d'Hippocrate. Il rentra ensuite dans sa patrie, où l'avait précédé une réputation déjà florissante; il préludait dès lors à ses luttes contre les sectes en médecine et en philosophie. Sa renommée ne fit que grandir. A 32 ans, c'est encore lui qui nous le raconte (De libr. propr.), il se rendit dans la capitale de l'empire romain, sous le règne de MarcAurèle et de Lucius Verus (empereurs, de 161 à 169 de J.-C.). Il fit à Rome un séjour d'environ 5 ans, et commença à ý composer une partie de ses ouvrages.

Le goût des voyages le reprit à 37 ans, il quitta Rome

(1) Le texte de Galien (De Ordine Libror. Suor.) porte: άpioμstixñs TE καὶ λογιστικῆς και γραμματικῆς θεωρίας Les interprètes traduisent λογιστικῆς par artis supputatoriæ, art du calcul (Voy. éd. Chartier, t. 1, p. 52, et Kuhn., t. xv), et en effet, les lexiques (Planche, Alexandre, etc.) ne donnent pas d'autres signification. Mais cela ferait pléonasme avec mathématiques ( arithmétique). Il s'agit ici de l'art de raisonner, la dialectique dans laquelle Galien excella. « λoytońpiz dicuntur scholæ in quibus disseritur (Scapula). » Ce qui tranche la question, c'est que Galien emploie ailleurs (suasoria ad artes oratio, cap. xiv) ce même mot dans le même sens, et alors tous les interprètes l'y traduisent, comme je l'indique ici, par logica, logique. (Voy. Chartier, t. 11; Kuhn. t. xvII; Daremberg, t. 1, p. 46).

(vers 168 de J.-C.), une peste violente y sévissait, et cette circonstance est devenue la source d'une polémique ardente contre Galien, polémique à laquelle il n'entre pas dans notre sujet de prendre part. Il rentra dans sa patrie, et ajouta quelques nouveaux écrits à la collection de ses œuvres. Son séjour à Pergame ne fut pas de longue durée; il passa à Smyrne, où il continua à composer, chez Pélops, son maître. Ce fut là qu'il reçut une lettre des empereurs romains, qui se trouvaient alors à Aquilée, et qui le rappelaient en Italie. Galien partit: c'était en hiver. A peine fut-il arrivé à Aquilée (169 de J.-C.), qu'il s'y déclara une peste comme on n'en avait pas encore vu: Invasit pestilentia ut nondùm anteà. Les empereurs regagnèrent Rome avec quelques troupes, et Galien les suivit. On sait que Lucius Verus mourut en chemin. Marc-Aurèle, qui se proposait, l'année suivante, de faire la guerre aux barbares, voulut emmener avec lui Galien en Germanie; celui-ci s'y refusa, alléguant un ordre d'Esculape, qui lui avait, disait-il, envoyé un songe. Il fut nommé médecin de Commode, et dut attendre à Rome le retour de Marc-Aurèle, dont l'absence se prolongea plusieurs années (170 à 174 de J.-C.). Ce temps ne fut pas perdu pour Galien, qui sut tirer un grand parti de son séjour dans la capitale de l'empire, ainsi qu'il nous l'enseigne lui-même : « Cumque diù moratus esset in peregrinatione, præter spem omnem, Antoninus (Marc-Aurèle), totum illud tempus memoratu dignissimum mihi exercitationem præbuit........... Eo ergò tempore, et collegi et in habitum stabilem perduxi, quæque a magistris didiceram, quæque ipse inveneram... Multa scripsi, in multis me et medicis et philosophis quæstionibus exercens; quorum pleraque perierunt in magno illo incendio, in quo templum Pacis unà cum multis aliis conflagravit. >> (Galen., De libris propriis). La publication et la bonne fortune de ses ouvrages, ses démonstrations publiques d'ana

tomie et de physiologie, sa polémique avec les coryphées des sectes médicales, enfin, ses succès dans l'art de guérir, et ses cures presque merveilleuses le mirent en très-grande faveur. « Il fut, dit Eloy (Dict. hist. de la méd.), dans l'estime de Sergius Paulus, prêteur; de Barbarus, oncle de l'empereur Lucius ; de Severus, qui était alors consul, et qui fut depuis empereur (193 de J.-C.); et de Boethus, homme consulaire, en présence desquels il eut occasion de faire des dissections. » Il était ainsi monté au comble de la prospérité.

Ce bonheur ne fut point sans mélange: Galien eut de nombreux énnemis; on voit dans ses ouvrages qu'il ne ménageait guère ses confrères, et que souvent il leur fit sentir durement sa supériorité. C'était un tort, et un tort grave, dont il eut plus d'une fois à se repentir. Ils se vengèrent, répandirent mille bruits fâcheux contre lui, et, pour peu qu'il présentât le flanc à la critique, ils ne manquaient aucune occasion de l'attaquer. Galien s'en plaint (2) amèrement, et raconte en détail les divers incidents de cette polémique (3).

(2) Quidam malevoli per invidiam flagitiosis urbem rumoribus impleverunt me, ut priores multum superare viderer, multa quæ nequaquam apparerent in anatomicis scribere, nec enim fieri posse ut omnibus latuerint... arbitrati malevoli posse coargui me nutuentem, non contemnentem nugas suas, magnanimitatem assimulare, neque dicteriis abstinebant, in templum Pacis venientes quotidie, ubi etiam antequam deflagrasset, 'congregari omnibus mos erat qui artes doctrinarum tractarent. » (Galen. De lib. propr.) (3) Chronologie des principaux écrits de Galien, d'après lui-même : Premier séjour à Rome, (163 à 168 de J. C.) 1o (Pour les étudiants): De sectis ad tyrones; De ossibus et pulsibus. — 2o (Pour son ami Platonicus?) : De arteriarum et venarum 'dissectione. dissectione. Empiricæ institutionis hypotyposis.

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- De nervorum

3o (Pour Boethus) :

De causis respirationis, II. -- De voce, IV — De Hippocratis et Platonis placitis, VI. De usu partium, 1. 4o (Contre le médecin Martialius) : De Hippocratis anatome, IV. — De Erasistrati anatome, III.— Adinventorum à se Libri; Pelopis magistri placita, III. Séjour à Pergame.

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(168 de J. C.): Vulva dissectio.

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