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surpassa aussi de beaucoup mon attente, et donna un prix infini à notre demeure, en la garantissant de la chaleur. Gloire en fut rendue au premier inventeur, M. François, et le nom de la Franciade fut écrit en grosses lettres sur l'arcade du milieu; Fritzia et Jackia furent écrits de même au devant des pavillons. Mon pauvre Ernest seul n'était pas nommé et n'en paraissait pas trop affecté ; il avait pris un grand goût pour la promenade et la botanique, et l'avait communiqué à Fritz. Quand nos ouvrages de Zeltheim furent terminés, ils nous laissaient à notre tour soigner notre chère convalescente, et faisaient ensemble des excursions qui duraient quelquefois des journées entières. Comme ils en rapportaient presque toujours quelque pièce de gibier ou quelque fruit nouveau, nous leur pardonnions leurs absences et ils étaient toujours bien reçus. Tantôt c'était un kangurou ou un agouti dont la chair ressemble au lapin de garenne mais est plus succulente; quelquefois des cygnes, des pigeons, des canards de mer et

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même des perdrix. C'était la chasse de Fritz, qui ne sortait jamais sans son fusil et ses chiens. Ernest nous apportait des curiosités naturelles très amusantes, des cailloux, des cristaux, des pétrifications, des insectes, des papillons de toute beauté ; quelquefois aussi des fleurs admirables par leurs formes et la variété de leurs couleurs, par leur parfum, et dont aucune fleur d'Europe ne pent donner l'idée ; ou des fruits que nous commencions toujours à faire goûter à notre singe et dont quelques-uns se trouvèrent excellens. Je citerai d'abord entre autres précieuses acquisitions deux palmiers bien intéressans, celui nommé papyracé (1) ou guajaraba, et le palmier dattier (2); ce

(1) Papyrace ou guajaraba; sa tige est ronde, compacte, rougeâtre; sa feuille est fort grande, vert brun, épaisse et ronde ; on peut écrire dessus avec un stylet. Son fruit est une espèce de raisin, gros comme une aveline, de la couleur des mûres, contenant un noyau fort dur. Ce fruit est très bon à manger.

(2) Le palmier-dattier est un arbre de la grande espèce des palmiers; le tronc est gros, droit, cylindrique et saus branches; sa hauteur surpasse huit brasses;

soufflet sur les charbons, si bien que dans l'instant le fer était rouge et très malléable. J'avais aussi apporté du vaisseau le soufflet pour la forge; mais, faute d'autre, ma femme l'avait démonté et s'en était servie dans sa cuisine. Je lui montrai à tourner le fer de manière à en faire une vis assez grossière, mais qui me parut pouvoir remplir son but; à l'autre bout on forma un anneau, dans lequel on plaça un morceau de bois transversal, afin de pouvoir tourner la vis. Nous en fîmes d'abord l'essai ; un des arbres fut ; posé sur deux appuis, et Fritz et moi nous tournâmes si bien le foret, en retirant les copeaux à mesure, que nous eûmes percé notre arbre en assez peu de temps, en commençant à chaque bout. Fritz ne se sentait pas de joie. Jack ramassait les copeaux à mesure et les portait dans notre cuisine, disant que sa mère serait charmée de les avoir pour allumer son feu. Ernest se promenait en dedans des colonnes, marquait la place où ils'établirait pour lire, donnait des conseils à ses frères pour l'architecture de leurs deux

pavillons, et, s'apercevant qu'on se prépa rait à percer encore un arbre, il alla se pro mener au jardin pour voir la digue. Il en revint très enchanté, mais avec un air préoccupé, et cependant plus actif qu'à l'ordinaire, il voulut absolument aider à percer les tuyaux, m'assurant que sa main, que la peau commençait à peine à recouvrir, ne lui faisait plus de mal. Comme nous n'avions qu'un seul outil pour cet ouvrage, nous ne pouvions y travailler tous les quatre, je m'en chargeai seul, et j'envoyai Ernest aider ses frères à la forge; il pouvait activer le soufflet sans se faire mal, et mes jeunes forgerons aplatir le fer dont ils voulaient faire des boîtes tenir ensemble leurs tuyaux; ils y réussirent assez facilement, et s'occupèrent ensuite à creuser la terre pour les placer. Ernest, qui savait assez bien la géométrie et l'arpentage, leur fut utile pour donner à leurs tuyaux la pente et les niveaux nécessaires, et les comblait de joie en leur disant qu'ils pourraient facilement avoir un jet d'eau. Mais je ne fus pas de cet avis;

pour

dernier sur-tout présente une telle utilité dans toutes ses parties, que nous ne pûmes assez bénir le ciel et nos enfans de cette

sou écorce est épaisse et chargée d'écailles, placées symétriquement, six par six, et en quinconce régulier, ce qui donne de la facilité pour monter au dessus et recueillir son fruit. La couleur du tronc nu est fauve; il est composé de longues fibres épaisses, ligneuses, et cependant légères. Le jeune palmier-da!tier a, dans le milieu de son tronc, une espèce de moelle bonne à manger; avancé en âge, cette moelle se durcit, on n'en trouve plus que dans le sommet; plus vieux encore, il n'y en a que dans les boutons du sommet; molle, blanche, charnue, douce et savoureuse, les Arabes en sont très friands; mais comme cette moelle est le germe productif des branches, l'arbre meurt lorsqu'on le coupe. Le palmier-dattier est terminé par une seule tête conique composée de quarante à quatre-vingts branches feuillées et disposées en couronne; les plus anciennes se courbent en arc et se fanent. Des aisselles des branches sortent des grappes, qui ont chacune leur enveloppe, et qui portent des fleurs dans le palmier mâle et des fruits dans le palmier femelle. La côte de la branche feuillée est très grande, verdâtre, lisse et luisante; étant vieille, elle se creuse en gouttière. Cette côte est terminée par des feuilles semblables à celles du roseau, et qui sont persistantes; elles sont en très grand nombre, soutenues sur des espèces dé queues

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