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taux uniforme, parce que cette mesure serait contraire à l'équité, ni une réduction générale des tarifs, parce qu'elle ne produirait qu'un résultat insignifiant pour la majeure partie des débiteurs de l'impôt, tandis que les taxes de compensation dont elle rendrait l'établissement nécessaire seraient beaucoup trop lourdes pour certaines catégories de redevables sur lesquelles votre sollicitude est en ce moment appelée, et que ce remaniement serait de nature à compromettre le succès de réformes importantes dont vous êtes déjà saisis. Le projet que nous vous soumettons n'en est pas moins digne de toute votre attention. Il a pour objet de modérer certains tarifs trop élevés, eu égard aux circonstances particulièrement intéressantes dans lesquelles ils s'appliquent, et de réduire le nombre des droits fixes dans les affaires où ils peuvent se multiplier d'une manière excessive. Il a pour but, en un mot, de corriger les conséquences rigoureuses que la législation actuelle comporte dans certaines affaires. » En fait, d'après les évaluations du gouvernement, les dégrèvements divers, qui résultent de ces détaxes et pour lesquelles une compensation est nécessaire, s'élèvent à 5 millions environ.

Il n'était pas difficile de prévoir que la commission du budget ne ferait pas très bon accueil au projet du gouvernement. Dès le 8 février 1893, son rapporteur, M. Henri Brisson, proposait à la Chambre de le rejeter, et lui demandait au contraire de voter, sauf quelques amendements de détail, la réforme des droits d'enregistrement dans les termes où elle lui avait été soumise antérieurement (1).

C'était donc à la Chambre qu'il incombait de se prononcer en dernier ressort sur les propositions qui lui étaient respectivement soumises par sa commission du budget et par le ministre des finances. Elle se prononça, dans la séance du 11 février 1893, en donnant gain de cause au gouvernement. Les efforts de MM. Brisson et Dupuy-Dutemps pour faire triompher les résolutions de la commission du budget furent impuissants à prévaloir contre l'intervention dans le débat du ministre des finances, M. Tirard, puis du commissaire du gouvernement, M. Liotard-Vogt, directeur général de l'enregistrement et du timbre. L'article 1er du projet de la commission fut rejeté, entraînant avec lui l'ensemble du projet, et les divers articles du gouvernement furent successivement adoptés, presque sans discussion.

Au Sénat, il fut voté tel qu'il était sorti des délibérations de la Chambre des députés, sauf une modification relative à l'enregistrement des inventaires par vacations.

Art. 19.

Sont soumis au droit proportionnel les actes désignés dans l'article 1er de la loi du 28 février 1872.

Le droit sera liquidé sur les sommes ou valeurs actuellement passibles du droit fixe gradué.

(1) Chambre: rapport, doc. 1893, p, 77.

La quotité en est fixée à 15 centimes par 100 pour les partages, et à 20 centimes par 100 pour les autres actes (1).

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Art. 20. Est maintenu le droit fixe de 5 francs établi par ticle 1, no 7, dernier alinéa, de la loi du 28 février 1872, pour les mainlevées partielles d'hypothèques en cas de simple réduction de l'inscription. Toutefois ce droit ne pourra excéder le droit proportionnel qui serait exigible pour la mainlevée totale.

Sont soumis au droit fixe de 5 francs les contrats de mariage qui ne contiennent que la déclaration du régime adopté par les futurs, sans constater de leur part aucun apport.

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Art. 21. Si dans le délai de deux années à partir de l'enregistrement la dissimulation des sommes ou valeurs ayant servi de base à la perception du droit proportionnel est établi par des actes ou écrits émanés des parties ou par des jugements, il sera perçu indépendamment des droits simples supplémentaires, un droit en sus, lequel ne pourra être inférieur à 50 francs (2).

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Art. 22. Sont réduits d'un tiers les divers droits fixes d'enregistrement auxquels sont actuellement assujettis les actes extrajudiciaires non visés par les articles 6, 7 et 8 de la loi du 26 janvier 1892 (3).

(1) Cet article établit la rançon des détaxes consenties par les articles suivants. Il constitue une dérogation profonde aux principes traditionnels en matière d'enregistrement sur la distinction des actes soumis au droit fixe ou au droit proportionnel, principes que le législateur de 1872 avait entendu maintenir en instituant le droit fixe gradué.

Mais toute question théorique mise de côté, on a considéré que le droit fixe gradué, quand il ne s'agit pas de valeurs très élevées, avait tous les inconvénients du droit fixe proprement dit sans posséder aucun des avantages du droit proportionnel, et que la transformation proposée aurait pour conséquence, grâce à l'exacte proportionnalité du nouveau droit, de dégrever un nombre considérable d'actes ayant pour objet des valeurs peu importantes.

(2) Le texte primitif parlait d'« actes ou documents régulièrement parvenus à la connaissance de l'administration ». C'est sur un amendement de M. Thellier de Poncheville, accepté par le gouvernement, que l'on rétablit dans le texte définitif la formule employée par l'article 3 de la loi du 28 février 1872.

(3) Les actes dégrevés par la loi du 26 janvier 1892 sont les exploits relatifs aux procédures suivies en matière civile ou commerciale, soit devant les juges de paix, soit devant les conseils de prud'homme, les tribunaux de première instance et les cours d'appel comme aussi les autres exploits relatifs aux procédures d'ordre judiciaire, de contribution judiciaire et de vente judiciaire. »>

« Cette rédaction, dit l'exposé des motifs à l'occasion de notre article, aura l'avantage de profiter spécialement aux actes extrajudiciaires qui précèdent l'introduction des instances, aux actes encore plus nombreux, si souvent nécessaires pour ramener à exécution les décisions de justice. La mesure aura, par conséquent, pour effet de diminuer encore le poids de l'impôt qui pèse sur les débiteurs obérés. Elle sera surtout très appréciable pour le commerce, notamment en ce qui concerne les protêts, dont le droit, actuellement de 1 fr. 50 en principal, se trouvera par suite abaissé à 1 franc. Le sacrifice imposé de ce chef au trésor sera de plus de 3 millions. »

Art. 23. Est abrogé le dernier alinéa de l'article 68, paragraphe 1, n° 30, de la loi du 22 frimaire an VII, en ce qui concerne les exploits relatifs aux procédures de délaissement par hypothèque, de purge des hypothèques légales ou inscrites, de saisie immobilière, d'ordre judiciaire et de contribution judiciaire (1).

En conséquence, il ne sera dû qu'un seul droit pour ces exploits, quel que soit le nombre des demandeurs et des défendeurs.

Art. 24.

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Est réduit de moitié le droit de 6 francs établi par les articles 5 de la loi du 19 juillet 1845 et 4 de la loi du 28 février 1872 pour les avis de parents, les procès-verbaux de nomination de tuteurs et curateurs, et les procès-verbaux d'apposition, de reconnaissance et de levée de scellés (2).

Art. 25. Il ne sera perçu qu'un seul droit fixe d'enregistrement par chaque acte distinct d'acceptation de succession ou de renonciation à succession passé au greffe, quel que soit le nombre des acceptants ou des renonçants et celui des successions acceptées ou répudiées.

Il en sera de même pour les renonciations à communauté par acte au greffe.

Art. 26.

Les actes de prestation de serment des gardes particuliers et des agents salariés par l'État, les départements, communes, établissements publics ou d'utilité publique, dont le

(1) La disposition de la loi de frimaire partiellement abrogée par l'article 23 est celle qui consacre le principe de la pluralité des droits, dont la suppression totale était l'un des objets essentiels de la proposition de MM Brisson et Dupuy-Dutemps. Mais le gouvernement n'avait pas voulu se rallier à cette solution absolue. « Le principe de la pluralité, dit-il dans l'exposé des motifs de son projet, juste en lui-même, pour les droits fixes au même titre que que pour les droits proportionnels, et dont la suppression absolue conduirait à de véritables abus, peut entrainer des résultats excessifs en ce qui concerne les exploits signifiés dans les procédures de purge, d'ordre, de contribution, de saisie immobilière, et de délaissement par hypothèque. Nous vous proposons résolument de l'abroger à l'égard de ces actes. Le dégrèvement ne sera pas inférieur à près de 600.000 francs. La propriété foncière en profitera presque exclusivement. >>

(2) A la suite de cet article, le gouvernement avait inséré dans son projet et la Chambre des députés avait adopté une disposition aux termes de laquelle il ne serait exigé qu'un seul droit fixe d'enregistrement pour chaque séance, quel que fût le nombre des vacations, pour les inventaires, les procès-verbaux d'apposition, de reconnaissance et de levée de scellés.

Cette disposition a disparu lors de la discussion du projet au Sénat, sur l'observation faite par le rapporteur de la commission des finances, M. Boulanger, que les successions opulentes, où il y a beaucoup de biens à déclarer, donnant lieu à des inventaires plus longs, il était équitable, pour assurer la proportionnalité de l'impôt, de maintenir l'ancienne tarification, c'est-à-dire un droit

par vacation.

traitement et ses accessoires n'excèdent pas 4.000 francs (1) ne seront assujettis qu'à un droit de 4 fr. 50.

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Art. 29. Les dispositions des articles 19 à 26 de la présente loi ne seront exécutoires qu'à partir du 1er juin prochain.

Art. 36. La loi du 29 juin 1892 n'est pas applicable (2) aux emprunts des sociétés en nom collectif pures et simples (3). Art. 37. Est dispensée du droit de timbre la demande de bulletin n° 2 du casier judiciaire délivré aux particuliers (4).

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Articles 28 à 35, concernant l'impôt sur les opérations de bourse (5).

Notice et notes par M. Léon SALEFRANQUE, Sous-inspecteur de l'enregistrement à Paris.

Destinés à faire titre, les bordereaux d'agents de change et de courtiers étaient soumis, sans désignation particulière, au timbre de dimen

(1) Le nouveau texte substitue la limite de 4.000 francs à celle de 1500 francs, précédemment fixée pour l'exigibilité du droit de 22 fr. 50. - Il n'est pas sans intérêt de faire remarquer que l'article 26 fait disparaitre la difficulté que le silence de la loi de 1872 pouvait faire naître, au sujet de l'assimilation des agents salariés par les établissements publics ou d'utilité publique à ceux des communes. (2) La loi du 1er décembre 1875 avait exonéré de l'impôt sur le revenu des valeurs mobilières, établi par la loi de 1872, les parts d'intérêt dans les sociétés commerciales en nom collectif, et restreint l'application de la même taxe au montant de la commandite, en ce qui concerne les sociétés en commandite dont le capital n'est pas divisé en actions.

Cette exemption d'impôt demeurait étrangère aux emprunts des sociétés dont il s'agit. La disposition ci-dessus rapportée les en fera bénéficier désormais. V. infrà, p. 240, note 4.

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(3) La loi de finances du 26 juillet 1893 (art. 22) ajoute ceci : « Il n'y aura pas lien au recouvrement des sommes qui peuvent être encore dues, en vertu de la loi du 29 juin 1872, sur les intérêts des emprunts contractés par les sociétés en nom collectif pures et simples »>. L'une et l'autre dispositions ne s'appliquent qu'aux sociétés commerciales, à l'exclusion des sociétés civiles, et seulement aux sociétés en nom collectif pures et simples, à l'exclusion des sociétés en commandite simple, bien que celles-ci comptent parmi leurs membres des associés en nom, indéfiniment responsables.

(4) L'article 5 de la loi du 28 janvier 1892 (Annuaire, tome XI, p. 139) avait dispensé de la formalité du timbre le bulletin n° 2 du casier judiciaire délivré aux particuliers. Dans la pensée du législateur, cette exemption devait également profiter à la demande en délivrance de ce bulletin; mais, en matière fiscale, toutes exceptions devant être entendues limitativement, l'administration n'avait pas cru pouvoir déroger, en ce qui concerne cette pièce, à la règle générale inscrite dans l'article 12 de la loi du 13 brumaire an VII. Le texte que nous rapportons ci-dessus a pour objet de faire cesser cette anomalie.

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(5) J. Off. du 29 avril 1893. Nous faisons suivre ces dispositions de la loi de finances du décret du 20 mai 1893, portant règlement d'administration publique (J. Off. du 21 mai 1893), rendu pour leur exécution, infrà, p. 127.

sion, conformément aux règles générales inscrites dans les articles 1 et 12 de la loi organique du 13 brumaire an VII. Néanmoins, la rédaction de bordereaux sur papier non timbré ayant été fréquemment constatée, la loi du 5 juin 1830 vint affirmer l'exigibilité de l'impôt sur ces documents et édicter, en cas de contravention, une pénalité plus élevée.

Dès cette époque, l'idée de frapper les opérations constatées par ces bordereaux d'un droit gradué s'était fait jour, et une proposition dans ce sens avait été soumise à l'Assemblée législative au cours de la session de 1849. Mais cette proposition ne fut pas accueillie.

Reprise en 1862, elle aboutit à une insertion dans la loi de finances du 2 juillet d'une disposition (art. 19) taxant les bordereaux d'agents de change et de courtiers : à 50 centimes, lorsque les opérations qui y sont constatées ne dépassent pas 10.000 francs; à 1 fr. 50, dans le cas contraire. - L'article 2 de la loi du 23 août 1871 porte ces droits à 60 centimes et 1 fr. 80, par l'adjonction de deux décimes au principal de l'impôt.

En 1873, un projet de réforme fut élaboré par le conseil d'État. La délivrance des bordereaux serait devenue obligatoire, et il aurait été rédigé autant de bordereaux que d'opérations intéressant des personnes distinctes. La taxe devait être ainsi graduée: 5.000 fr. et au-dessous, 50 cent.; 5.000 à 10.000 fr., 1 fr.; 10.000 à 20.000 fr., 2 fr.; 20.000 à 40.000 fr., 4 fr.; 40.000 à 60.000 fr., 6 fr.; au-dessus de

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60.000 fr., 10 fr. Il ne fut pas donné suite à ce projet.

En 1882, M. Bozérian, sénateur, demande que les droits réglés par la loi de 1862 soient convertis en un abonnement de 5 centimes p. 100 acquis au trésor sur le montant des opérations faites par les intéressés. Cette proposition n'est pas adoptée (1).

En 1887, M. Borie, député de la Corrèze, dépose une proposition tendant tant à porter le timbre à 50 centimes p. 1.000, qu'à créer une taxe spéciale qui se serait superposée à ce droit (2). Cette proposition, comprise dans un projet d'ensemble sur les droits d'enregistrement et de timbre ne fut pas rapportée.

Le parlement est de nouveau saisi de la question, en 1888, par une proposition due à l'initiative de M. Calvinhac, député de la HauteGaronne. Cette proposition frappe les opérations de bourse d'un droit de 25 francs par unité de 3 000 francs de rente française 3 p. 100, ou de 4.500 francs de rente 4 1/2 p. 100; les unités équivalentes de rentes étrangères payent 50 francs; le droit sur les autres valeurs est de 50 centimes pour les titres au-dessus de 1.000 francs (3).

D'un autre côté, M. Gillet, député de la Meuse, réclame qu'on prenne pour base de la taxe le courtage des agents de change, et qu'on fixe celle-ci à la moitié de ce courtage pour les opérations à terme, et au quart pour les opérations au comptant (4).

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