Images de page
PDF
ePub

SOMMAIRE

DE L'IMPROMPTU DE VERSAILLES,
PAR VOLTAIRE.

Molière fit ce petit ouvrage en partie pour se justifier devant le Roi de plusieurs calomnies, et en partie pour répondre à la pièce de Boursault. C'est une satire cruelle et outrée. Boursault y est nommé par son nom. La licence de l'ancienne comédie grecque n'allait pas plus loin. Il eût été de la bienséance et de l'honnêteté publique de supprimer la satire de Boursault et celle de Molière. Il est honteux que les hommes de génie et de talent s'exposent par cette petite guerre à être la risée des sots. Il n'est permis de s'adresser aux personnes que quand ce sont des hommes publiquement déshonorés, comme Rolet et Wasp'. Molière sentit d'ailleurs la faiblesse de cette petite comédie, et ne la fit point imprimer.

1. Rolet est ce procureur au Parlement, dont Boileau a dit dans sa premiere satire, vers 52:

J'appelle un chat un chat et Rolet un fripon.

Quant à Wasp, on sait que c'est sous le nom de Frelon que Voltaire désigna Fréron dans l'Écossaise, et que le mot anglais wasp signifie guêpe », wasp-fly, « frelon». Après s'être montré si sévère à l'égard de Molière nommant Boursault dans l'Impromptu, il cherche à prévenir l'objection qu'on ne manquera pas de lui faire. On peut trouver qu'il y répond assez mal; mais il ne voulait sans doute ici que saisir une occasion nouvelle de vilipender Fréron. Beuchot fait remarquer que cette phrase a été ajoutée par Voltaire dans l'édition de 1764, c'est-à-dire quatre ans après la première représentation de l'Écossaise. La première édition de la Vie de Molière, avec des jugements sur ses ouvrages, est, comme il a été dit plus haut (tome I, p. 12), de 1739.

NOMS DES ACTEURS1.

MOLIÈRE, marquis ridicule.
BRÉCOURT, homme de qualité2.

DE LA GRANGE3, marquis ridicule.
DU CROISY, poëte.

LA THORILLIÈRE', marquis fâcheux.
BÉJART', homme qui fait le nécessaire.

1. ACTEURS (sans NOMS DES). (1684 A, 94 B, 1710, 33, 34.) — п est probable que si Molière avait publié lui-même sa pièce, il aurait, dans cette liste, rédigé avec plus de précision et de justesse l'indication des caractères. Ainsi il n'est pas exact de dire que Béjart, dans l'Impromptu, fait le nécessaire, c'est-à-dire remplit le rôle d'un homme qui se mêle de ce qui ne le regarde pas. Il vient simplement, à la dernière scène, annoncer aux comédiens que le Roi se contentera de la première pièce venue, au lieu de celle qu'ils comptaient représenter; il ne joue nullement là le rôle d'un nécessaire, c'est-à-dire un personnage ridicule. Quant à Mlle de Brie, par sage coquette il faut entendre évidemment, comme Molière l'a expliqué dans la pièce même, une coquette prudente et qui veut sauver les apparences; mais c'est ce que dit assez mal l'expression de sage coquette, et nous doutons fort qu'elle soit de Molière, qui d'ailleurs n'avait pas l'habitude de caractériser ses personnages dans la liste des acteurs, comme on le fit souvent après lui, faute de savoir aussi bien que lui les caractériser dans la pièce même par la conduite et le langage qu'on leur prêtait.

2. Brécourt sortit de la troupe pour entrer à l'Hôtel de Bourgogne, à Pâques 1664, six mois après la première représentation de l'Impromptu; il fut, et pour ce rôle aussi sans doute, remplacé par Hubert; mais la pièce, après son départ, ne fut plus jouée en public voyez la Notice, p. 376 et note 5.

3. Dans l'édition de 1734, LA GRANGE, sans de.

4. L'édition de 1682 écrit ce nom la Torillière dans la liste des acteurs, et la Thorilière dans le courant de la scène 11. Les noms de la Thorillière et de Béjart sont mis après tous les autres dans l'édition de 1734, qui termine la liste par cette indication : QUATRE NÉCESSAIRES.

5. Dans la re édition (1682), il y a ici Bejart, et deux lignes MOLIÈRE. II

25

Mlle DU PARC, marquise façonnière.
Mlle BÉJART, prude.

Mlle DE BRIE, sage coquette.
Mlle MOLIÈRE, satirique spirituelle.
Mlle DU CROISY, peste doucereuse.
Mlle HERVÉ, servante précieuse.

La scène est à Versailles, dans la salle de la Comédie'.

plus loin, Mademoiselle Bejar. Dans le cours de la pièce les deux noms ont d'ordinaire le t final; une fois, vers la fin de la scène i (p. 403 de notre texte), on lit Bejard.

1. La scène est à Versailles, dans l'antichambre du Roi. (1734.) — « C'est à tort que tous les éditeurs, depuis ceux de 1682 exclusivement", ont placé la scène dans l'antichambre du Roi. Le sujet de la pièce étant une répétition, le lieu de l'action doit être un théâtre. C'est la prétendue comédie à représenter qui a pour lieu de scène l'antichambre du Roi, puisqu'elle a pour personnages des hommes et des femmes de la cour. Molière dit aux comédiens (au début de la) scène III de l'Impromptu : « Figurez-vous.... premièrement que la « scène est dans l'antichambre du Roi. » Si c'était là même qu'ils eussent dû répéter, Molière n'aurait pas dit figurez-vous. Ce passage mal compris est cause de l'erreur que je relève. » (Note d'Auger.) Montfleury avait commis la même erreur, peut-être volontaire, car il semble qu'il veuille voir une inconvenance dans le lieu de la scène Molière, dit un des personnages de sa pièce,

....

dans son Impromptu, comme j'ai su de toi,

Met sa scène dedans l'antichambre du Roi.

(L'Impromptu de l'hôtel de Condé, scène m.)

a Ceci n'est point tout à fait exact, Le changement dont parle la note d'Auger ne date que de 1734. Il est vrai qu'entre cette date et celle de 1682, il n'a point paru, à proprement parler, d'éditions nouvelles, mais seulement des reproductions plus ou moins fidèles du texte de 1682.

L'IMPROMPTU DE VERSAILLES.

COMÉDIE.

SCÈNE PREMIÈRE'.

MOLIÈRE, BRÉCOURT, LA GRANGE, DU CROISY, MLLE DU PARC, MLLE BÉJART, MLLE DE BRIE, MLLE MOLIÈRE, MLLE DU CROISY, MLLE HERVÉ1. MOLIÈRE 3.

Allons donc, Messieurs et Mesdames*, vous moquezvous avec votre longueur, et ne voulez-vous pas tous venir ici? La peste soit des gens! Holà ho! Monsieur de Brécourt!

1. En tête de la première scène, on lit les mots ACTE PREMIER OU Acte I dans les éditions de 1682, 84 A, 94 B, 97, 1710. Nous avons déjà vu une semblable méprise en tête de la Critique de l'École des femmes (ci-dessus, p. 311, note 1).

2. MESDEMOISELLES DU PARC, BÉJART, DE BRIE, MOLIÈRE, DU CROISY, Hervé. (1734.)

3. Molière, seul, parlant à ses camarades, qui sont derrière le théatre. (1734.)

4. On remarquera ici une distinction qui pourrait paraître assez bizarre : Molière dit Mesdames, en s'adressant collectivement à toutes les actrices; un peu plus loin, il dira à chacune d'elles Mademoiselle, comme c'était l'usage pour les femmes, même mariées, quand elles n'étaient pas nobles. Mais c'est que Messieurs et Mesdames est une sorte de formule faite qui s'emploie machinalement comme appellation collective. A la scène II (p. 405), s'adressant, comme ici, à toutes les comédiennes, il dira Mesdemoiselles, et en parlant d'elles (p. 408), ces demoiselles. Plus loin, scène iv (p. 417), c'est par plaisanterie qu'il dit à deux actrices, mais en scène et jouant leurs rôles de dames : • Mesdames, voilà des coffres.... »

[blocks in formation]

1. BRECOURT, derrière le théatre. (1734.)

Les mots derrière le théâtre

sont répétés, dans l'édition de 1734, après les noms, qui vont suivre, de la Grange, de du Croisy, de Mlle du Parc, de Mlle Béjart, de Mlle de Brie, de Mlle du Croisy et de Mlle Hervé.

« PrécédentContinuer »