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PARIS,

RISLER, RUE DE L'ORATOIRE, N° 6.

M DCCC XXXVI.

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L'homme naturel.

« L'homme animal ne comprend point les choses de >> l'Esprit de Dieu, car elles lui sont une folie, et il ne peut » les entendre, parce qu'elles se discernent spirituelle

» ment. »

(I Cor. II, 14.)

L'état d'un chrétien véritable est un état de paix, de joie, d'amour et de sainteté; mais avant d'y atteindre il faut que, pendant une période de temps plus ou moins longue, l'homme passe à travers la crainte, l'anxiété et la repentance, car du grand médecin Jésus nul n'obtint jamais la guérison de l'âme avant de se sentir malade du péché, accablé de ses transgressions, et du fardeau d'un cœur profondément rebelle, d'un cœur que luimême ne peut ni briser ni attendrir. Aussi, en écrivant aux enfans de Dieu à Rome, Saint-Paul leur dit qu'ils n'ont pas reçu l'Esprit » de servitude, pour être dans la crainte,» mais « qu'ils ont reçu l'Esprit d'adoption, » lequel leur montre Dieu comme «leur père,» et le ciel comme leur héritage. D'où il paraît clairement que ceux qui possédaient alors l'Esprit de grâce, d'amour et d'adoption, avaient eu l'Esprit de servitude et de crainte, avant les convictions duquel ils étaient dans leur état de nature, manquant de grâce pour aimer ou servir Dieu; et c'est d'une personne dans cet état que l'apôtre parle sous l'appellation « d'homme naturel. »

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Il y a donc trois états par lesquels tous les enfans d'Adam doivent passer avant de pouvoir être des chrétiens véritables :L'état de l'homme non réveillé ou « naturel», de l'homme qui n'aime ni ne craint Dieu; -l'état de l'homme réveillé ou pécheur repentant, réveillé à une anxiété véritable sur son salut, craignant Dieu, les menaces de sa loi, appréhendant la mort et toutes ses conséquences; l'état de l'homme « sous la grâce, ou du croyant véritable, aimant Dieu plus que toute créature, plus que toute

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chose, et se réjouissant de l'expiation et du pardon de ses péchés, qu'en Christ il a reçus par une foi vivante.

La vie de saint Paul manifeste ces trois états de la manière la plus évidente. Quoiqu'il fût un des hommes les plus instruits, les plus tempérans et les plus probes de Jérusalem; quoiqu'il se montrât fort strict à observer les heures de prières et le service du Dieu de ses ancêtres, selon qu'il y avait été enseigné; et, comme il le dit lui-même, quoiqu'il s'efforçât « de conserver une con> science exempte de faute à l'égard de Dieu et des hommes; » enfin, quoique ce fût par ignorance qu'il eût persécuté les saints, comme lui-même déclare l'avoir fait dans la sincérité de son zèle, pensant rendre service à Dieu; néanmoins pendant tout ce tempslà il n'était qu'un homme non réveillé, et il demeura tel jusqu'à ce que sur le chemin de Damas Jésus le tira de son sommeil, de sa sécurité charnelle, en lui montrant qu'il n'était qu'un sépulcre blanchi. C'est alors qu'il entra dans le second état, celui d'un pécheur réveillé et repentant, qui redoute la colère à venir, ' et cherche s'il n'est pas possible de l'éviter. Trois jours et trois nuits il demeura dans cet état, implorant le pardon de ses péchés, sans prendre le temps de manger ou de boire. Mais les angoisses de sa nouvelle naissance ne pouvaient durer long-temps; elles étaient d'une nature trop violente. Le quatrième jour Dieu l'introduisit dans le dernier état, donna la paix à sa conscience coupable, dissipa toutes ses craintes, et comme saint Paul le dit lui-même, fit descendre l'Esprit d'adoption en son âme, et lui révéla Jésus. Alors il fut chrétien; alors il naquit de nouveau, et par la paix qui surpasse toute intelligence il commença à demeurer dans l'amour de Dieu et la connaissance de Christ, combattant le bon combat de la foi, en union avec ces chrétiens qu'il haïssait et méprisait auparavant. Otez seulement la clarté et là splendeur, ôtez les circonstances miraculeuses de la conversion de Paul, vous voyez en lui ce qu'en nous Dieu doit faire pour que nous devenions des sarmens vivans du cep véritable, qui est Jésus-Christ.

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Or, comme il est très-certain que chacun de nous se trouve dans un de ces trois états; et comme il nous importe extrêmement de savoir lequel, je vais aujourd'hui décrire l'état de l'homme naturel, ou non réveillé, afin que vous puissiez reconnaître si c'est encore le vôtre, ou bien si vous avez véritablement fait un pas vers votre éternelle patrie. Avec la grâce de Dieu, je m'efforcerai une autre fois de pénétrer plus avant dans le chemin étroit, mais sûr, qui conduit à la vie. Vous comprenez quelle est la haute importance du sujet : vous voyez qu'il demande toute votre atten

tion. Oh! puissiez-vous l'accorder volontairement, et que Dieu luimême daigne faire arriver jusqu'aux cœurs les paroles qui vont frapper vos oreilles!

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L'homme naturel non réveillé, c'est celui qui est né d'un enfant de colère; c'est le fils d'Adam déchu et apportant avec lui dans le monde la racine et la source de tous les maux ; ce qui est le cas de tous les enfans des hommes; car qui oserait prétendre n'avoir jamais été dans l'état de David, lorsque dans l'amertume de son cœur il s'avouait « né dans le péché, et conçu dans l'iniquité ? » Existe-t-il sous le ciel un seul homme qui n'ait jamais été orgueilleux, volontaire, passionné, rebelle, plus amateur du plaisir que de Dieu ?» Et ees sentimens ne sont-il pas la source des torrens d'iniquités qui inondent la terre ? Nous naissons donc tous « hommes na» turels, » endormis quant aux choses spirituelles, c'est-à-dire, participans de la nature déchue d'Adam (dont le nom en hébreu signifie homme); cette nature orgueilleuse et rebelle qui le fit ressembler aux démons, cette nature sensuelle et terrestre qui le rendit semblable aux bêtes qui périssent, devient notre nature. C'est elle, c'est le vieil homme au dedans de nous, comme l'appelle saint Paul, qui doit être détruit par la repentance et la conversion; car sans cela nous mourrons tels que nous naquîmes ; « enfans de colère, hommes non réveillés, hommes naturels; et il n'y aura pas besoin de rendre contre nous une seconde sentence, car la condamnation sera écrite dans nos cœurs. • Retirezvous, maudits, » dira Jésus; « vous n'avez pas besoin d'une » seconde malédiction; déjà vous êtes maudits de la nature dé⚫ chue de l'homme, vous qui n'avez jamais revêtu Christ, le nou» vel homme créé dans une sainteté véritable. » Puisque telle est la condition misérable dans laquelle nous nous trouvons tous naturellement, il n'y a pas lieu de s'étonner lorsque, dans l'Écriture, l'homme inconverti est représenté comme dans un état de sommeil et de mort, ce dont l'apôtre l'avertit en lui criant: « Réveille-toi, toi qui dors, et te relève d'entre les morts, et Christ sera ta lumière. »

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Il est bien vrai que, soit à l'église, soit chez lui, soit dehors, enfin partout où il se trouve, l'homme naturel est dans un sommeil de mort : ses sens spirituels ne sont pas réveillés ; ils ne discernent nile bien ni le mal spirituel. Il ne connaît, il ne peut point connaître les choses de l'Esprit de Dieu; les yeux de son intelligence sont fermés, car il habite dans la vallée de l'ombre de la mort, et il ne s'en aperçoit point; quelle que puisse être sa science aux yeux du monde, il est dans la plus stupide ignorance touchant ce qu'il lui

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