Images de page
PDF
ePub

<< prennent les blasphémateurs! Jésus, que nous <«< tenons pour Dieu et Fils de Dieu dès le principe, <<< est le Verbe lui-même, la vérité en soi, la sagesse « en soi. Quant à son corps mortel et à son áme « humaine, ce corps, cette âme, par la communica<< tion de ce Verbe, par l'union et la pénétration << mutuelle en ce Verbe, ont reçu les dons suprê<«< mes de Dieu, sont devenus PARTICIPANT de la « divinité, et ont passé en Dieu 1. »

Que dites-vous, Monsieur, de cette théologie totale du Christ? Sur quel point pensez-vous que Bossuet eût pu la déployer plus explicite et plus exacte?

Vous devez maintenant comprendre la pensée d'Origène, et en quoi, d'après lui, Jésus-Christ participe de la nature divine, comme vous le dites. C'est son corps mortel et son âme humaine qui participent de la nature divine, de la nature du Verbe même, qui est Dieu même, Vérité même et Sagesse même. Donc, Monsieur, pour écrire que le Verbe, selon Origène, participe de la nature

,

1 Contrà Cels. lib. II, p. 435. Αρχῆθεν εἶναι θεὸν καὶ ὑἱον θεοῦ: οὗτος ὁ αὐτολόγος ἔστι καὶ ἡ αὐτοσοφία καὶ ἡ αὐτοαλήθεία, etc. Le français ne peut rendre cette énergie.

divine, vous avez confondu avec le Verbe Dieu, le corps mortel et l'âme humaine du Christ, c'està-dire que vous avez fait une faute de théologie que ne commettrait ni un séminariste de première année, ni un enfant des catéchismes de per

sévérance.

XII.

Voilà, Monsieur, sur quelle connaissance et quelle intelligence des textes vous vous appuyez pour établir, dans la conclusion de votre partie théologique que les Pères alexandrins n'atteignent point encore la vraie formule de la Trinité, et qu'Origène va jusqu'à prétendre' que le Père seul est le vrai Dieu, que dès lors « la doctrine

[ocr errors]

d'Origène en subordonnant à ce point le Verbe << et le Saint-Esprit au Père, tendait à concentrer « toute la nature divine dans la première hypo«< stase3; qu'en général le Christianisme primitif << accepte la théologie juive sans y rien changer,

1 T. I, p. 290.-T. I, p. 291.3 T. I, p. 291.

«

« c'est-à-dire que le Dieu de la religion nouvelle <«< était encore le Dieu abstrait et mystérieux de «<l'Orient; le Fils et l'Esprit n'étant Dieu ni « l'un ni l'autre (selon le christianisme primitif), « Dieu n'est point présent lui-même à son œuvre << et s'y fait seulement représenter par des organes; «< c'est par des intermédiaires qu'il crée et vivifie « le monde; pour lui, il reste enfermé dans la soli<< tude et le mystère de son existence ineffable. La << théologie chrétienne était encore loin de la Tri<< nité proprement dite, tant qu'elle reste soumise << aux influences de l'Orient (selon vous elle «< reste soumise jusqu'à Origène inclusivement), «elle maintient le Verbe et l'Esprit saint en de« hors de la nature divine et ne peut comprendre << la consubstantialité du Père, du Fils et de l'Es« prit. »

y

Cela posé, vous nous montrerez comment c'est l'influence d'Alexandrie qui a développé, fixé par les formules de la philosophie grecque, la Trinité chrétienne et le dogme de la divinité de JésusChrist.

Mais pour arriver à cette conséquence, Mon

[ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small]

:

sieur, voici ce qu'il vous a fallu faire il vous a fallu affirmer que saint Paul n'avait pas dit que le Christ fût Dieu, tandis que saint Paul a dit le Christ est Dieu et l'a dit quinze fois. Il vous a fallu oublier que, même selon vous, c'est saint Jean qui a proclamé le premier que le Christ est Dieu.

Il vous a fallu imputer à saint Pierre l'hérésie des Judaïsants, erreur qu'il a lui-même renversée pour toujours au concile de Jérusalem, par des paroles que chacun sait par cœur.

Il vous a fallu prétendre que l'Église de Jérusalem réservait le royaume de Dieu aux seuls Juifs, et pour cela il vous a fallu ne pas tenir compte de trois pages où les Actes des Apôtres vous parlent de ces deux conciles, l'un qui ouvre l'Église aux gentils, l'autre qui repousse la pensée de les soumettre à la loi de Moïse.

Pour voir un immense progrès théologique de saint Pierre à saint Paul, de saint Paul à saint Jean, il vous a fallu en quelque sorte supprimer le Nouveau-Testament, et accumuler sur ce point autant d'erreurs de fait que d'assertions.

Quant aux Pères de l'Église pour nous les montrer tels que vous les avez faits, il vous a fallu

composer un véritable tissu d'erreurs : contre-sens formels, contradictions perpétuelles, objections prises pour des réponses, ignorance surprenante des textes les plus nombreux, les plus connus et les plus décisifs, analyses reproduisant tout juste le contraire des textes, le tout sous l'influence d'un aveuglement si complet que vous ne voyez pas même les textes, lorsque vous les citez et transcrivez vous-même.

Il vous a fallu, en un mot, accomplir un travail auquel je ne sais rien de comparable, j'entends parmi les livres dont l'auteur a voulu s'occuper de science. Il est évident, Monsieur, que cette partie de votre ouvrage n'appartient pas plus à la science qu'un rêve ou un roman.

Et, en effet, soutenir que le Christianisme tel qu'il est apparu à Nicée, a été formé sous l'influence du Néoplatonisme, c'est substituer le rêve à la réalité. Il est visible, par tous les faits, tous les textes, toutes les raisons, que le Néoplatonisme postérieur de deux siècles au Christianisme, n'a pas d'autre raison d'être que le Christianisme luimême. Le Néoplatonisme est le mirage du Christianisme. Vous savez ce qu'est le mirage? Une image vaine et renversée des objets réels et vivants.

« PrécédentContinuer »