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1° Demande adressée par l'industriel au sous-préfet de son arrondissement, c'est-à-dire de l'arrondissement dans lequel la manufacture sera établie, puisque c'est dans cet arrondissement que, par les soins de ce même sous-préfet, les informations ultérieures auront lieu (1).

La demande doit contenir les mêmes indications que pour les établissements de première classe, avec le plan descriptif ( voir ci-dessus n° 10).

Dans le ressort du chef-lieu du département, c'est au préfet directement que la demande doit être adressée; dans le département de la Seine et les communes annexées, c'est au préfet de police (2).

20. Suite des formalités. 2o Renvoi de la demande au maire de la commune dans laquelle on projette de former l'établissement, et enquête de commodo et incommodo par les soins de ce dernier. Le décret n'exige pas et le préfet ne peut prescrire l'apposition d'affiches comme pour les établissements de première classe ou les machines à vapeur (voir no 110). C'est à l'autorité locale à prendre les mesures nécessaires pour assurer efficacement la publicité de l'ouverture de l'enquête (3). La durée de l'enquête, sauf celle relative aux machines à vapeur qui doit se prolonger pendant dix jours (4), n'est pas fixée par le décret et doit être déterminée d'après les circonstances par l'autorité locale;

3o Renvoi du procès-verbal d'enquête au sous-préfet avec l'avis du maire ;

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4o Arrêté du sous-préfet en forme d'avis après communication au conseil d'hygiène et de salubrité, et transmission au Préfet. 21. Arrêté du Préfet statuant sur la demande. Le préfet consulte, s'il le juge à propos, le conseil de préfecture, et, soit qu'il y ait, soit qu'il n'y ait pas d'opposition, rend un arrêté, pour accorder ou refuser l'autorisation. Après quelques hésitations (5), une jurisprudence, désormais constante, décide qu'il n'appartient pas au conseil de préfecture de prononcer sur les oppositions, tant que l'autorisation n'a pas été accordée (6).

(1) Avisse, p. 22 et 25.

(2) Ordonn. du 14 janvier 1815, art. 4.-C. d'État, 17 août 1825 et 15 mars 1825. (3) Voir Clérault, Traité des Établissements dangereux, n. 40.

(4) Règlement du 22 mai 1843.

(5) C. d'État, 19 mars 1817.

(6) C. d'État, 24 octobre 1823 (Palangier).—13 juillet 1825 (Poncet). — 1er mars 1826 (Forlier), etc.

S'il statuait avant la décision du préfet, cette délibération prématurée ne serait considérée que comme un simple avis sans force obligatoire, non susceptible de recours au conseil d'État (1), et ne faisant pas d'ailleurs obstacle à ce que le conseil statue ultérieurement sur les oppositions à l'autorisation accordée (Voir n° 24) (2).

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22. Deux sortes de recours contre l'arrêté du préfet. L'arrêté du préfet qui statue sur la demande d'autorisation, est soumis à deux sortes de recours, ainsi qu'on l'a dit plus haut (nos 14 et 16) d'après l'art. 7 du décret de 1810 ainsi conçu: « Le préfet statuera, sauf le recours au conseil d'État, par tou«tes les parties intéressées; s'il y a opposition, il y sera statué << par le conseil de préfecture, sauf le recours au conseil d'État. »

Cette disposition fort obscure a été interprétée par une jurisprudence désormais bien constante, de la manière suivante: en cas de refus, le postulant doit se pourvoir directement devant le conseil d'État; en cas d'autorisation, les tiers intéressés doivent porter leur opposition contre la décision du préfet en premier ressort devant le conseil de préfecture, et en appel devant le conseil d'État. C'est là une dérogation formelle et extraordinaire à ce principe fondamental de la compétence administrative que les actes de pure administration ne peuvent être attaqués devant Is tribunaux administratifs, et faire l'objet d'un recours par la voie contentieuse.

23. Recours du postulant au conseil d'État. Le recours direct au conseil d'État, dans les trois mois à partir de la notification de l'arrêté préfectoral, est ouvert au postulant et au postulant seul, en cas de refus absolu d'autorisation, ou lorsque l'autorisation a été subordonnée à des conditions qu'il prétend faire modifier (3).

Le postulant peut encore se pourvoir en conseil d'État contre l'arrêté du conseil de préfecture qui, sur la demande des tiers, aurait refusé l'autorisation qu'avait accordée le préfet (voir ciaprès no 24). C'est ce qui résulte des termes généraux de l'art. 7 qui admet, sans restriction à l'égard du postulant, le recours au conseil d'État contre l'arrêté du conseil de préfecture qui a statué sur les oppositions (4).

(1) C. d'État, 2 août 1826 (de Roussy).-26 décembre 1830 (Brunet).—22 juin 1825 (Barlatier).-15 mars 1826 (commune des Prés-Saint-Gervais).

(2) Voir Clérault, n. 43.-C. d'État, 26 oct. 1825; 13 mars 1826; 20 juin 1827. (3) C. d'État, 15 novembre 1826 (Reynard). 20 avril 1839 (Collier).

(4) C. de cass., 2 fév. 1838 (Agombart).-Dalloz, vo Manufactures, n. 103.

24. Recours des tiers au conseil de préfecture en premier ressort, puis au conseil d'État. Si le préfet accorde l'autorisation, les tiers qui ont eu la faculté de lui adresser leurs observations et réclamations pendant l'instruction administrative, peuvent, comme on l'a dit ci-dessus, former opposition à l'arrêté du préfet devant le conseil de préfecture (1). Ce recours s'exerce du reste, alors même qu'aucune opposition n'a été formulée avant l'autorisation accordée. Il n'existe aucune disposition de loi qui l'assujettisse à un délai quelconque, et il peut, par conséquent, être formé par les tiers intéressés à quelque moment que ce soit, sans que le fabricant puisse les mettre en demeure ni faire courir de délai par une notification (2). Mais ceux-ci ne peuvent (sauf au cas ci-après no 26) déférer directement au conseil d'État l'arrêté du préfet qui a accordé l'autorisation. C'est seulement après avoir porté leur opposition en premier ressort devant le conseil de préfecture, qu'ils peuvent se pourvoir devant le conseil d'État dans le délai de trois mois, contre la décision de ce conseil qui aurait maintenu l'autorisation accordée par le Préfet (2).

Le recours direct au conseil d'État ne peut être formé par les tiers que pour cause d'incompétence ou d'excès de pouvoir (n° 26).

25. Intervention, recours incident, et tierce opposition des tiers devant le conseil d'État. — Outre la voie de l'appel devant le conseil d'État, ouverte aux tiers dans le cas précédent, la faculté d'intervention et de tierce opposition, et même de recours incident devant ce même conseil, existe pour eux, qu'il y ait eu, ou qu'il n'y ait pas eu autorisation, dans les circonstances suivantes.

Lorsque c'est le postulant qui après refus d'autorisation, s'est pourvu directement devant le conseil d'État contre l'arrêté du préfet, les tiers intéressés au maintien du refus peuvent se présenter au conseil d'État à titre d'intervenants pour faire rejeter le recours (4). Si le postulant attaque un arrêté portant autorisation au point de vue des conditions auxquelles l'autorisa

(1) C. d'État, 1er mai 1822 (Pain).—22 nov. 1836 (Vienchel).

(2) Voir Dufour, t. 2, n. 518.

(3) C. d'État, 30 juin 1835 (Blanc).

11 août 1841 (Caron).

(4) C. d'Etat, 6 mars 1835 (Leziars).-7 avril 1855 (Vayson).- 20 avril 1849 (John Collier).-14 décembre 1844 (Béthune et Plon).-13 janv. 1853 (Nicolle).- 10 mars 1834 (Haueis).

tion est subordonnée, les tiers peuvent, non seulement intervenir pour faire maintenir les conditions imposées, mais former un recours incident pour demander la réformation de l'arrêté et le refus pur et simple d'autorisation (1). Ils peuvent également, la décision une fois rendue, sans qu'ils soient intervenus, l'attaquer par voie de tierce opposition (2).

Lorsque, en cas d'autorisation, un ou plusieurs intéressés ont fait opposition, sans succès, à l'arrêté du préfet devant le conseil de préfecture, les tiers qui n'ont pas pris part au débat engagé près de ce conseil peuvent encore faire valoir leurs griefs de la manière suivante :

S'il n'y a pas eu appel de l'arrêté du conseil de préfecture par les parties qui y ont figuré, ces tiers ont la voie de la tierce opposition devant ce même conseil contre l'arrêt rendu (3); s'il y a eu recours au conseil d'Etat, ces tiers peuvent se présenter, non plus devant le conseil de préfecture, mais devant le conseil d'Etat à titre d'intervenants pendant l'instance d'appel, ou même frapper de tierce opposition la décision rendue par le chef de l'État, à la condition de n'avoir pas figuré au débat (4).

26. Recours exceptionnel des tiers devant le conseil d'Etat. — Les règles particulières aux recours organisés par le décret de 1810, ne dérogent pas au principe général et absolu posé par la loi des 7-14 octobre 1790, qui permet de déférer directement au conseil d'Etat tous les arrêtés des préfets, pour incompétence ou excès de pouvoir.

Les tiers ont donc la faculté d'attaquer devant le conseil d'État, l'arrêté préfectoral portant autorisation dans le cas seul où ils invoquent l'incompétence ou l'excès de pouvoir, comme par exemple, lorsqu'ils se fondent sur ce que le préfet a accordé l'autorisation, sans procéder à l'enquête prescrite par la loi. C'est ce que le conseil d'État a formellement décidé par arrêt du 6 mai 1853, en déclarant qu'aucune disposition du décret du 15 octobre 1810 n'a interdit aux intéressés le recours ouvert par la loi de 1790 (5). Seulement, en ce cas le conseil n'apprécie que le vice extrinsèque dont l'arrêté est entaché, et ne peut, comme dans les circonstances ordinaires, statuer au fond sur

(1) C. d'État, 23 déc. 1845 (Deseille).

(2) C. d'État, 5 sept. 1856 (Grandin).

(5) Rolland de Villargues, Rép., vo Atelier.

(4) C. d'État, 3 septembre 1836 (Anquetil; id. (Grandin). (5) C. d'État, 6 mai 1853 (Delacour).

la question d'autorisation, ainsi qu'on le verra au numéro suivant.

27. Droit du conseil d'Etat saisi par l'un de ces recours. Le conseil d'Etat, quand le débat est porté devant lui par l'une des voies qui ont été indiquées, sauf la dernière, est investi du droit, non seulement de maintenir ou d'annuler la décision attaquée, mais encore de la modifier, en prescrivant des conditions nouvelles, et de faire ainsi l'office d'administrateur aussi bien que de juge. Aussi en annulant, sur le recours du postulant, l'arrêté du préfet qui a refusé l'autorisation, il peut, au lieu de renvoyer devant le préfet pour être procédé à une nouvelle instruction, comme il le fait quand la question ne lui paraît pas suffisamment éclairée (1), accorder immédiatement l'autorisation, en prescrivant lui-même des conditions de nature à faire disparaître les inconvénients que l'on redoute (2); de même, sur le recours des tiers tendant à faire révoquer l'autorisation accordée, il peut, tout en la maintenant, ajouter aux prescriptions regardées comme insuffisantes par le préfet et le conseil de préfecture. Il importe donc essentiellement aux fabricants, lorsqu'ils plaident devant le conseil d'Etat, d'indiquer eux-mêmes, s'il y a lieu, les modifications de nature à remédier aux inconvénients qui ont été signalés.

Du reste, il arrive fréquemment, et pour éviter toute difficulté dans l'avenir, que le conseil d'Etat impose au fabricant l'obligation générale de se conformer à toutes les conditions qui seraient ultérieurement jugées indispensables par l'autorité administrative, pour pourvoir aux nécessités de la salubrité publique (3).

28. Principes sur les motifs de refus d'autorisation et d'opposition.- Un des points les plus importants en cette matière, c'est d'être fixé sur les motifs qui peuvent faire refuser l'autorisation et servir de base, soit aux oppositions, soit aux autres recours. Le préfet, et après lui le conseil de préfecture, puis le conseil d'Etat, appelés comme on l'a vu, à divers titres, à statuer sur les demandes d'autorisation, ont sans doute une trèslarge faculté d'appréciation; mais ils n'ont pas un pouvoir, à pro

(1) C. d'État, 20 avril 1839 (John Collier).-11 mai 1850 (Paufichet). (2) C. d'État, 8 avril et 11 nov. 1831 (Crouillebois; Pauwels).— 30 nov. 1832 (Valancourt).-5 sept. 1838 (Lithoreau).— 16 juin 1841 (Mathieu). 30 août 1843 (Garnot). 2 déc. 1853 (Debolo). 26 avril 1855 (Jacob). - Voir néanmoins Dufour, nouv. édit., t. 2, n. 517.

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(3) C. d'État, 2 déc. 1855 (Debolo). — 26 avril 1855 (Jacob).

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