Images de page
PDF
ePub

taines conditions, permet d'y ajouter un nouvel atelier. Le principal et l'accessoire reçoivent ainsi l'un et l'autre une existence légale (1).

57. Les établissements autorisés restent soumis à l'action de l'administration. Tout établissement industriel, nonobstant l'autorisation accordée ou la justification de son existence antérieurement à 1810, n'en reste pas moins soumis à l'action administrative qui, d'une part, demeure chargée de veiller efficacement à l'accomplissement des conditions auxquelles l'autorisation a été subordonnée, et qui, d'autre part, conserve la faculté générale de pourvoir aux intérêts de police et de sûreté qui lui sont confiés. Nous examinerons successivement les obligations de l'industriel et les droits de l'administration, à l'un et à l'autre point de vue.

S Ier.

De la surveillance administrative.

58. Comment s'exerce la surveillance des établissements autorisés. Tout établissement autorisé est soumis de plein droit à la surveillance de l'administration, afin qu'elle ait la faculté, soit de s'assurer que les conditions prescrites sont remplies, soit d'observer s'il ne se produit pas d'inconvénients, imprévus lors de l'instruction, d'où naîtraient quelques dangers pour la salubrité publique. Cette surveillance, qui est une mesure de police proprement dite, est exercée par tous les officiers de police judiciaire et leurs auxiliaires qui, en cas de contravention, dressent procès-verbal.

Sur les plaintes des parties intéressées, l'administration peut faire procéder à une vérification par les ingénieurs des mines, ou, à leur défaut, par ceux des ponts et chaussées ; mais elle ne saurait, à moins de circonstances tout à fait exceptionnelles, placer dans l'établissement, d'une manière permanente, des commissaires spéciaux, ainsi qu'il lui appartient de le faire à l'égard des chemins de fer, en vertu des clau- ' ses du cahier de charges joint aux concessions. Dans le silence de toute loi ou règlement, l'administration ne peut imposer aux établissements insalubres la charge d'un traitement à payer.

(1) C. d'État, 18 mai 1854 (Jalabert).

S II.

Conséquences de l'inexécution des conditions imposées à l'industriel,

SOMMAIRE.

59. Manquement aux conditions entraînant révocation. 60. De la substitution de conditions nouvelles à celles prescrites. 61. De la translation ou déplacement d'un atelier. 62. De l'interruption de l'exploitation pendant six mois.-63. Causes qui justifient le chômage. 64. La déchéance ne peut être encourue avant six mois. 65. Cas où la déchéance peut être couverte.- 66. Le retard dans l'exploitation assimilé à l'interruption. -67. Autorité compétente pour prononcer la révocation de l'autorisation et la déchéance.-68. Droit de l'administration d'ordonner la translation et la suspension.

[ocr errors]

59. Manquement aux conditions entraînant révocation. La première obligation de l'industriel qui a obtenu l'autorisation administrative est de se conformer exactement aux conditions qui lui ont été prescrites. Une sanction rigoureuse garantit l'accomplissement de cette obligation fondamentale. L'administration, investie de la surveillance des ateliers à l'effet de constater les dangers qui viendraient à se manifester ou les infractions aux règles tracées, a le droit de prendre, en vertu des attributions générales de police, toutes les mesures efficaces pour réprimer les manquements de l'industriel. La plus radicale de ces mesures, et celle qui comprend toutes les autres, est la révocation de l'autorisation accordée, c'est-à-dire la suppression même de l'établissement dont l'exploitation ne peut plus être continuée.

Cette révocation peut être prononcée par cela seul que le fabricant manque d'une manière notable aux conditions qui lui ont été imposées, par exemple, quand il rapproche par des constructions nouvelles son exploitation des habitations voisines (1), ou quand il ne prend pas les précautions exigées pour éviter les inconvénients de la fabrication. Peu importe d'ailleurs que la condition non accomplie se trouve, par le fait, impossible à réaliser. Il peut arriver que le fabricant lui-même ait offert de prendre des précautions inexécutables, ou que l'administration, par erreur, en ait prescrit de telles; mais il n'en résulte pas moins que les dangers auxquels ces mesures avaient pour but de parer, peuvent se produire désormais sans obstacle, et cette

(1) C. d'État, 19 mai 1859 (commune de Garges c. Caseneuve).

seule considération d'intérêt public suffit pour l'emporter sur les raisons d'équité que pourrait, en pareil cas, invoquer la partie intéressée (1). Le fabricant, au lieu d'engager une lutte inutile, n'a autre chose à faire qu'à proposer des mesures équivalentes que l'administration s'empressera sans doute d'admettre.

60. De la substitution de conditions nouvelles à celles prescrites. La substitution de conditions nouvelles aux conditions prescrites, et en général toute transformation de l'établissement, ne peuvent être faites qu'avec autorisation spéciale. Ainsi la faculté de former un établissement de première classe n'implique pas celle de le remplacer par un établissement de deuxième ou de troisième. Il faut réclamer une autorisation nouvelle à peine d'encourir la révocation.

« La nécessité est la même, dit M. Dufour, pour les modificaa tions dont le résultat, sans aller jusqu'à un déclassement, doit « être d'aggraver les dangers ou les inconvénients de l'exploita« tion.» (T. 2, no 564).

Du reste, ce droit rigoureux de l'administration de prononcer contre un établissement en pleine activité une suppression qui peut être la ruine complète du fabricant, ne s'exerce que lorsque les changements apportés à l'exploitation sont assez importants pour constituer une véritable inobservation des conditions imposées, et non quand ils tendent à l'amélioration des procédés autorisés, sans danger nouveau pour la sûreté publique.

C'est ainsi qu'il a été reconnu que la substitution à l'appareil autorisé d'un appareil reposant sur les mêmes principes et offrant les mêmes garanties n'était pas de nature à faire prononcer la révocation (2). A plus forte raison le développement naturel ou la restriction de l'industrie autorisée ne peuvent-ils être considérés comme des infractions aux conditions prescrites.

Toutefois, les fabricants ne doivent se permettre qu'avec la plus grande réserve, les substitutions qui éveillent presque toujours la sollicitude de l'administration et les plaintes des tiers.

61. Effets de la translation ou déplacement d'un atelier. Comme on l'a vu d'après les formalités à remplir, l'autorisation est accordée bien moins à la personne de l'industriel qu'à l'établissement même, en considération des convenances locales que présente sa situation. Il suit de là que le fa

(4) Ordonnance précitée du 19 mai 1839 (commune de Garges c. Cazeneuve). (2) C. d'État, 11 nov. 1831 (Guyot c. Pauwels).—Voir Avisse, n. 176.-Cormenin, Questions de droit, t. 1, p. 250.

bricant doit continuer son exploitation au lieu même où elle a été autorisée, à peine de perdre le bénéfice de l'autorisation; car un établissement transféré n'est évidemment autre chose qu'un établissement nouveau relativement aux lieux où il est trânsporté, aux voisins qu'il rencontre, et la nécessité d'une nouvelle autorisation dérive naturellement de la nouveauté dé la position. C'est ce qui résulte de l'art. 13 du décret de 1810 reconnu, par identité de motifs, applicable aux établissements tant postérieurs qu'antérieurs à ce décret (1), et à ceux dé lá seconde et de la troisième classe, aussi bien qu'à ceux de la première (2).

Aux termes de cet article, « les établissements maintenus par l'art. 11 cesseront de jouir de cet avantage dès qu'ils seront transférés dans un autre emplacement ou qu'il y aura interruption de six mois dans leurs travaux. Dans l'un et l'autre cas, ils rentreront dans la catégorie des établissements à former, et ils ne pourront être remis en activité qu'après avoir obtena, s'il y a lieu, une nouvelle permission. »

Le conseil d'État considère comme translation, non-seulement tout déplacement de l'établissement lui-même, mais même le changement de l'emplacement d'une chaudière à vapeur dans l'atelier auquel elle est annexée, si cet emplacement a pu êtrë pris en considération dans l'arrêté d'autorisation (3).

6%. Interruption de l'exploitation pendant six mois. —L'art. 13 ajoute à la causé de déchéance fondée sur la translation de l'établissement une seconde cause tirée de l'interruption dans l'exploitation, ou du chômage pendant le délai de six mois. Cette déchéance est fondée sur une présomption légale que l'établissement est abandonné, alors du moins que l'interruption a été volontaire. En ce cas, la révocation de l'autorisation est prononcée sans difficulté, tandis qu'elle ne devrait pas l'être si l'interruption avait été motivée soit par un ordre de l'autorité administrative, soit par l'effet d'une instance judiciaire (4) ou d'un recours formé par des tiers contre l'ordonnance d'autorisation (5).

63. Canses qui justifient le chômage - La déchéance

(1) C. d'État, 3 mars 1825 (Garet).

(2) Voir Macarel, t. 4, p. 160.- Clérault, n. 141.

n. 42.

· Encycl, du droit, v° Ateliers,

(3) C. d'État, 6 mai 1853 (Perrache).—17 nov. 1819. (4) C. d'État, 15 mai 1815 (Samson).

(5) C. d'État, 3 mars 1825 (Garet).

dont il s'agit est d'ailleurs, par la force des choses, inapplicable aux industries qui ne peuvent s'exercer qu'à intervalles plus ou moins éloignés, à cause de la nature même de l'exploitation. C'est ce que la Cour de cassation a décidé relativement à un atelier affecté au rouissage du chanvre, qui n'a lieu que trois ou quatre mois chaque année, à l'époque de la récolte (1).

En général, s'il était justifié que le chômage provînt de causes quelconques, naturelles ou accidentelles, absolument indépendantes de la volonté du fabricant, il nous paraît qu'il n'y aurait pas lieu à révocation, puisqu'en pareil cas, rien n'impliquerait l'idée d'un abandon de la fabrication. Nous pensons même que la destruction de l'établissement par un sinistre n'entraînerait pas nécessairement l'anéantissement de l'autorisation accordée; seulement, pour que celle-ci s'appliquât à l'établissement nouveau construit en remplacement de l'ancien, il serait essentiel qu'il fut placé identiquement dans les mêmes conditions.

[ocr errors]

64. La déchéance ne peut être encourue avant six mois. L'expiration du délai de six mois, fixé d'une manière absolue par le décret, est nécessaire pour que la déchéance soit encourue, alors même que l'enlèvement des machines et ustensiles semblerait annoncer auparavant une intention définitive d'abandonner la fabrication. On ne saurait arbitrairement priver l'industriel du temps qui lui est accordé par la loi pour revenir, s'il le juge à propos, sur une résolution première (2).

[ocr errors]

65. Cas où la déchéance peut être couverte. La déchéance encourue par suite d'une interruption de plus de six mois est couverte par tout acte de l'administration qui, postérieurement à la cessation du chômage, implique reconnaissance ou confirmation de l'existence légale de l'établissement. Il a été récemment jugé en ce sens que l'autorisation d'annexer un atelier supplémentaire à un atelier principal, postérieurement au chômage de ce dernier, emporte interdiction d'opposer désormais à l'industriel l'interruption d'exploitation antérieure à cet acte administratif (3).

66. Le retară dans l'exploitation assimilé à l'interruption. Le fait d'avoir laissé passer six mois sans user

(1) C. cass., 4 nov. 1848 (Magrey). (2) Dalloz, n. 156.

p. 69.

Clérault, n. 114.- Contrà, Trébuchet, Code des ateliers,

(5) C. d'État, 18 mai 1854 (Jalaberi).

« PrécédentContinuer »