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Mme. Dugazon s'y eft furpaffée, & la Dile. Carline fur-tout a été délicieufe dans le rôle du jeune Payfan, L'Auteur des paroles eft M. Mugntyot; M. Brunon eft celui de la Mufique, qui eft souvent agréable, mais en général un peu monotone.

ACADÉMIE ROYALE DE MUSIQUE. Penelope n'est qu'une reprife. L'Au teur, M. Marmontel, paroît avoir profité de plufieurs critiques que fon Opéra avoit effuyées : il a fupprimé le rôle inutile de Laërte; Pénelope reparoît au fecond Acte; le tombeau a disparu; en revanche, on nous donne un Ballet de plus, ce qui, à l'Opéra, vaut bien mieux; le dénouementfur-tout eft changé : Uliffe demande des armes, attaque les Prétendans, triomphe d'eux, Minerve defcend des Cieux dans une gloire, entourée des Mules & des Arts. Mme. St. Huberty a déployé dans cette reprise toutes les reffources de, fon art; tous les grands talens de l'Opéra fe font fignalés dans un Ballet beaucoup plus confidérable. La jeune Dlle. Rofe y a donné les plus grandes efpérances; & cependant, malgré tous ces changemens, malgré le lent

de Mme. St. Huberty, le tombeau fupprimé, le Ballet ajouté, les efforts réunis de tous les Danfeurs, & la fenfibilité délicieuse du Muficien, du célèbre Piccini, qui refpire en mille endroits de cet ouvrage, le fuccès a été médiocre, & les applaudiffemens froids & rares: c'eft peut-être faute du fujet.

THEATRE FRANÇOIS. La Maison 'de Moliere, ou la Journée du Tartuffe, représentée pour la première fois au Théâtre François, le 20 de ce mois, eft traduite de l'Italien, de Moliere, Comédie en cinq Actes de M. Goldoni, Il s'agit ici de l'ouvrage du célèbre Goldoni: il en trace l'efquiffe dans le fecond volume de fes Mémoires, & l'on reconnoît qu'en effet c'est la même Pièce que celle dont je vous rends compte. Je ne fçavois que penser de la mystérieufe annonce de la Pièce Françoife. J'ai été frappé d'abord, je l'avoue, de l'affectation avec laquelle on diffimuloit le nombre des Actes en affichant feulement, la Maifon de Moliere, Comédie nouvelle Mais le jour de la repréfentation, ma furprife fut bien plus grande; an

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annonçoit la Maifon de Moliere, our
la Journée de Tartuffe, Comédie nou-
velle rien de plus. Point de petite
Pièce à la fuite,» Eh! quoi (difois-je),
» eft-ce encore là du Figaro? Cette
» nouveauté eft elle fi longue, fi
» confidérable, qu'elle puiffe fuffire
» elle feule à toute la foirée ? Moliere
ouvre la scène, Moliere lui-même en
robe de chambre..... Quel plaifir de
voir ce grand homme, à fon fecré-
taire, compofant, méditant ! Je vous
l'avoue, Monfieur, j'ai cru le voir
lui-même il faut le dire, M. Fleury
ne le représentoit point mal du tout:
& Goldoni mérite encore mieux cet
éloge; car le caractère de Moliere eft
affez bien foutenu. Je gémiffois feule-
ment de voir Moliere dans les angoiffes,
dans les perplexités ; & je difois fou-
vent tout bas: pauvre Moliere ! pauvre
Moliere! La feconde, fcène a fait beau-
coup rire ce n'eft pourtant pas la
meilleure à mon gré vous vous
rappellez la traduction de Lucrèce, le
Manufcrit mis en papillotes, la Per-
ruque, &c. Le fait eft vrai; je ne
fçais cependant s'il devoit paroître
fur la fcène: quoi qu'il en foit, il a

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fait plaisir ; j'ai ri, me voilà défarmer Entre nous, Monfieur, je regrette moins la traduction de Lucrèce qu'une Comédie: quel dommage, fi c'eût été le My fanthrope ou le Tartuffe! je ne l'aurois jamais pardonné à Lesbin, (c'eft le nom du Vålet de Moliere, Valet naïf, mais peu intéreffant dans la Pièce); comme c'étoit Moliere dans sa maifon qu'on nous avoit promis, on nous l'a montré fous toutes les faces, grand Auteur, bon ami, bon maître, amoureux auffi... & pourquoi non ?

La fenfibilité fait tout notre génie.

Il aime donc la fille de la Berard: il a avec elle une fcène touchante. La mère, qui eft jaloufe de fa fille, & qui, par ambition, afpire à la main de Molière, les furprend. Moliere feint de répéter avec elle, la fcène d'Orgon & de Marianne. La Berard fait fortis fa fille, & refte feule avec Moliere: ici la scène s'eft refroidie; l'apparition de la bonne Laforêt, fervante de Moliere, l'a rechauffée. On l'a applaudie avec transport; & d'ailleurs, c'étoit Mme. Bellecourt qui jouoit ce rôle. Moliere fort, & bientôt entre difcrés

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tement un certain M. Pyrlon, un hypocrite, qui joue un grand rôle dans tout ceci, peut-être un rôle trop confidérable. Il diftille fon venin dans toute la maison. Il fait naître des fcrupules dans l'efprit de cette pauvre fer. vante; il lui peint Moliere comme un méchant, un impie; il lui perfuade que par les foins qu'elle rend à fon maître, elle eft complice de fes abo minables ouvrages; il l'exhorte à quitter au plutôt cette maison infer.... nale. ... Il falloit en rester là; car outre que la fcène devient trop longue, il eft invraisemblable que la fidelle, la bonne Laforêt fe détermine à quitter Moliere, dans l'espoir d'avoir ailleurs fix écus de profit de plus: que fa fimplicité foit un mouvement fubjuguée par les perfides infinuations d'un fcélérat; paffe; mais l'intérêt doit être fans pouvoir fur elle. La voilà donc décidée à quitter fon maître. Pyrlon content de ce côté, s'adreffe maintenant à la Berard & à fa fille: il perce le cœur de fa fille, en difant que Moliere eft aimé de la mère ; il em ; poisonne l'efprit de fa mère, en lui apprennant que Moliere eft amoureux

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