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Et plus d'une matrone y joint l'Anatomie. La fcience de Phomme eft leur délaffement! Des entrailles du globe au haut du firmament,

H n'eft point de fecrets que leur esprit ne fonde:

Elles fçauront dans peu comment on fait un monde,

Leur ménage, il est vrai, n'eft pas bien gouverné;

Leur enfant eft mal fain, & mil morigéné. Avec quelques amis Chloé fait un ouvrages Peut on l'entretenir d'enfans & de ménage ?

Il vaudroir prefqu'autant, cenfeur gauche & brutal,

Lui parler de pudeur ou d'amour conjugal: On ne s'impofe point un devoir fi vulgaire. Femme d'un certain ordre, eft-elle épouse & mère ?

Ce portrait de nos petits nobles dégénérés, dont les goûts, l'efprit, les fentimens font fi ignobles, eft encore plein de bon fens, quoique vuide de Poëfie.

Mais l'unique héritier de cent ans de nobleffe,

Tout entier dans un nom que foutient fa richesse,

Peut-être cacochime, imbécille, infolent : Il employera d'autrui les nerfs & le talent. Il devient ce qu'il veut, un héros, un génie ;

Il donne à fes travers une grace infinie, Regorge de vertus, même fans, probité, Et s'affure à prix d'or, de l'immortalité, S'il meurt, malgré cela, de verbeux nécrologes

Aux fiècles à venir transmettent fes élores. Labaffeffe au grand homme érige unmonu

ment.

Pour lui, les vers, la profe, & le marbre, tout ment;

Et dix luftres plus tard, des brocanteurs de gloire

A fes dignes neveux dédieront fon hiftoire.

Voici le morceau le mieux écrit de l'Epitre; encore trouvera t-on que le Bon-Homme laiffe courir quelquefois les vers un peu trop négligem

ment:

On court avec transport aux raretés nouvelles,

En fuyant la raison cent fois plus rare qu'elles.

Peafez-vous qu'on la fuie afin de s'amufer? Voyez nos triftes foux pour vous défabufer. De nos cercles bruyans l'humeur lefte & cauftique

Accufe la raifon d'être mélancolique ; Je crains fort qu'ennuyer foit fon moindre défaur.

La fleur du bel-efprit eft tout ce qu'il leur faut.

Ce n'eft point cette fleur, dont la beauté durable

Orne la vérité qu'elle rend plus aimable; Et qui, pour ranimer les mortels abattus, Peut mêler fon parfum aux parfums des

vertus.

C'est une fleur bizarre, éphémère, inodore, Qui n'a qu'un faux éclat, qu'un foufle décolore,

Qu'une chaleur fact ce a fait épanouit, Qu'un air plus tempéré feroit évanouir; Qui, du fumier du vice artiftement nourrie, Couronne le fommet d'une tige pourrie

Cette métaphore eft très-heureuse très-vraie, & très-bien foutenue. Si l'Auteur avoit un peu plus répandu de ces couleurs poëtiques fur fon Epitre, cela n'auroit pas nui aux vérités & au bon fens dont elle est remplie. Les vers fuivans font bien penfés, mais moins élégans :

L'or vaut tout la débauche est l'unique. bonheur.

Du comble du fcandale on fe fait un hon

neur.

En tout déréglement la jeuneffe eft pré

coce.

Un bon confeil, pour elle, eft une injure atroce;

Et l'adulte énervé, qu'on ne surveille plus, Avant d'être majeur, eft un vieillard per

clus.

Par l'intrigue ou l'orgueil à l'intérêt vendues,

Et

par l'aveugle hymen au caprice rendues, De lubriques beautés, en s'entourant d'in

grats,

Luttent de perfidie avec des fcélérats

Et, malgré mille foins pour plâtrer leur vifage,

Bientôt de leur morale il est l'affreufe image.

Les deux vers les plus heureux pour fa nouveauté, la prêcifion & la vérité de la penfée, font ceux-ci :

Amis, que ce beau monde eft loin de vos.

maximes!

Vous pleurez d'une faute, il plaifante des

crimes.

L'Auteur revient aux Bonnes-Gens, & les vers qu'il leur adreffe ne font pas les moins bons de fon Epître.

Ne portez point envie à de pareils heureux; Que de biens vous avez qui ne font pas pour eux !

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Bonnes Gens, gardez-vous de changer vos ufages.

Vous vivez fagement fans vous nommer des fages.

Devant la fubfifiance à d'honnêtes travaux, Vous nourriffez le pauvre & non pas des chevaux

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