Images de page
PDF
ePub
[ocr errors]

pour aller prendre une place fur les autels; que le trifte jour où ils rendirent leurs derniers foupirs, devient un jour de commune allégreffe ; que fouvent les Rois & les peuples élévent des tempies à l'Eternel fous leur invocation, & que quelquefois des provinces & des nations entières, par un engagement folemnel, les réclament comme leurs pères & leurs protecteurs.

» Je fçais, à la vérité, qué cetté »efpèce d'apothéofe, fi je puis parles ss ainfi, n'eft pas indifféremment le

partage de tous les Saints; qu'il est » même un prodigieux nombre de »ces heureux habitants du Ciel, » qui n'ont laiffé aucune trace de leur exiftence fur la terre. Peu connus » pendant leur vie, abfolument ignorés après leur mort, leurs noms n'occu » pent point de place dans la mémoire » des hommes. Mais un jour viendra » (& c'eft le dernier des jours), yn » jour viendra que cette terre, théâtre obfcur de leurs combats, retentira » du bruit de leurs victoires ; que des nations innombrables, raffemblées

Giv

כל

[ocr errors]
[ocr errors]

» du feptentrion & du midi, des rives du couchant & de l'aurore, fixeront »fur leurs perfonnes des regards refpectueux, préconiferont leurs ver« tus, app'audiront à leur récompense: jour de triomphe pour ces glorieux » prédeftinés, & d'opprobre pour » vous, Monarques ambitieux, conquérants infenfés, qui aviez établi vos grandeurs fur un fondement de fable, & refferré vos efpérances » dans les limites du temps & de la » mortalité. Quelle fera votre honte » en ce grand jour, quand, confondus » fur les bords de l'abyme avec la » plus vile populace de l'univers, » avec le rebut de tous les fiècles » vous verrez vos trophées & vos » infcriptions funèbres, vos ftatues

[ocr errors]
[ocr errors]

& vos maufolées devenus la proie » des flammes ; quand ce feu dévorant » ravagera fous vos yeux le pompeux théâtre où votre orgueil s'étoit fi » fouvent donné en fpectacle?

Tertullien voulant confoler un illuftre Confeffeur de la foi, condamné à paffer les jours dans une obfcure prifon, lui difoit avec fon énergie.

[ocr errors]
[ocr errors]

ordinaire: tu ne verras plus de Dieux étrangers, tu ne rencontreras plus leurs images, tu ne participerás plus par ta feule préfence aux fêtes payennes; tu ne feras plus frappé de la fumée impure des facrifices & des clameurs des fpectacles: non videbis Deos alienos, non imaginibus eorumTM incurres nos folemnes nationum dies ipfa communicatione participabis, non nidoribus fpureis verberaberis, non clamoribus fpectaculorum. Ce paffage eft fublime, M. l'Abbé de Marolles ens a fenti tout le prix; it s'en eft em paré, & en a fait une applications très heureuse dans fon Sermon dus Mercredi des Cendres, fur la penfée de la Mort l'idée d'être féparé du monde par la mort, ne peut être affligeante pour un Chrétien pénitent; & il fe dit à lui-même: « Il eft vrai que tu feras bientôt privé de » la lumière du foleil, du fpectacle de la nature, des charmes de la fo » ciété ; mais auffi, tu n'auras plus la douleur de voir des crimes confa crés, des paffions divinifées, dess monftres adorés; tes yeux n'aper

[ocr errors]

943

» cevront plus leurs honteufes ima ges brillantes & parées; tu ne te » trouveras plus pêle-mêle, malgré toi, dans la pompe des fêtes d'un fiécle tout profane; l'air que tu » refpireras ne fera plus infecté par d'abominables facrifices, ni tes oreilles bleffées par d'impudiques

acclamations. »

Peut-être l'Orateur eût-il bien fait de s'en tenir là; mais féduit par la beauté & la fécondité du paffage de Tertullien, il a cédé à la tentation de le développer, de le commenter d'une manière ingénieufe & brillante: & il a pris comme une espèce de refrain de fa paraphrafe, ces mots qui reviennent au commencement de chaque tirade : la mort le féparera da monde; mais qu'est-ce que le monde à fes yeux Ces énumérations réuffiffent fur tout au débit, lorfqu'elles font prononcées avec volubilité ; l'auditeur entraîné par un torrent de mots, n'a pas le loifir de s'ap percevoir du vuide des idées; mais le lecteur qui veut une nourriture plus fubftantielle, eft fouvent fatigué

de ces éternelles répétitions. Cependant la première tirade eft vraiment éloquente.

» La mort le féparera du monde: mais qu'eft-ce que le monde à ses » yeux? Le théâtre du péché qu'if regrette; un fanctuaire qu'il a eu le malheur de profaner lui-même » autrefois par fon impiété; un calvaire où il a renouvellé d'odieux >> attentats; une terre où il a' fêmé la » difcorde, l'iniquité, les fcandales. Là, l'amour du plaifir triompha de mon innocence; ici l'intérêt me : » fit trahir la justice; plus loin là més · » difance fouilla ma Bouche; ailleurs.

[ocr errors]

la colère & le reffentiment empois » fonnèrent mon cœur: tout ce que »j'apperçois me reproche des infi» délités. Ah! périffent à jamais pour moi le foleil que j'ai fait luire à mes » crimes, les ombres dont j'ai enves »loppé mes forfaits, la terre en qui » j'ai mis ma confiance, les hommes »à qui j'ai mieux aimé plaire qu'a » Dieu, toutes ces créatures enfin » dans lesquelles je ne l'ai pas tous · » jours aimé, par lesquelles je ne l'ajsi

כל

« PrécédentContinuer »