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Elle redouble à ce lugubre fon:

Bin bon.

Voudriez-vous de ce jambon ?

H eft bin bon.

Je retrouve encore, à l'article Comparaison, M. Marmontel fervant de fecond à Perraut, pour attaquer les Comparaifons d'Homere qu'il nomme Comparaifons à longue queue. II faut bien, à ce fujet, porter de nouveaux coups au défenfeur d'Homere: a lorfque Boileau, dit le Secrétaire de l'Académie, défendoit fi haute»ment contre Perraut, les Comparaifons prolongées, fi quelqu'un lui » avoit dit: faites-en donc vous même, » & imitez ce que vous admirez; eûtil accepté le défi ? »

Boileau n'avoit pas attendu ce défi, pour imiter ce qu'il admiroit. Ouvrez le Lutrin, yous y verrez plufieurs de ces Comparaifons, où le Poëte ne fe borne pas à faifir les points de reffemblance entre les deux objets'; mais où il étend fon image par des circonftances qui n'ont qu'un rapport fugitif à l'objet comparé. Lorsque le

Chantre & le Tréforier se rencontrent fur l'efcalier du Palais, & qu'ils font prêts d'en venir aux mains, le Poëte peint leur fureur & leur attitude par cette comparaifon :

Tels deux fougeux taureaux, de jalouse épris,

Auprès d'une géniffe au front large & fuperbe,

Oubliant tous les jours le pâturage &

l'hert e,

A l'aspect l'un de l'autre, embrafés, furieux,

Déja le front baillé, fe menacent des

yeux.

I.a circonftance de la géniffe & des taureaux qui oublient auprès d'elle le pâturage, n'a guère de rapport à la fituation des deux rivaux facrés; & cependant, qui ne voit pas combien elle ajoute d'agrément à la comparaison?

A chaque page, ces Elemens me préfentent de nouveaux fujets de réflexions; mais réfervons pour une autre lettre, la fuite de ces difcuf

fions littéraires; car M. Marmonte mérite bien l'honneur de plufieurs extraits. Pour égayer un peu le férieux de celui-ci, je vais vous rapporter quelques-uns des petits contes facé-tieux dont il a eu foin d'orner fes préceptes. Rien n'eft plus propre à former le goût d'un jeune Philofophe.

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Premier Conte.

» A Paris, une de nos jolies femmes, chauffée pour la première fois par » le Cordonnier à la mode, s'apperçut » que, dès le premier jour, les fou» liers s'étoient déchirés; elle fit venir le Cordonnier, & lui marqua fon » mécontentement. L'ouvrier prend

lefoulier crevé, l'examine avec une » attention férieufe; & après avoir » réfléchi fur la caufe de cet accident: » Je vois ce que c'eft, dit-il enfin » Madame aura marché. »

Deuxième Conte.

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» On raconte qu'à Naples, les » Pages d'un Bailli de Malte, homme » d'une extrême avarice, lui ayant reprélenté qu'ils manquoient de linge,

» & que leurs dernières chemises s'en "alloient par lambeaux, il fit appeller » fon Majordome, & devant eux, lai » dit d'écrire à fa Commanderie, que » l'on eût à femer du chanvre, pour faire du linge à ces Meffieurs: far

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quoi les Pages s'étant mis à rire; » les petits coquins, reprit le Bailli, » les voilà bien contens, à préfent qu'ils » ont des chemifes. »

Ce trait de caractère eft plaifant; il auroit été bien placé dans un article fur les caractères comiques.

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Troisième Conte.

» Le fecond fils d'un Négociant de »Bordeaux, où les cadets ne font pas » riches, à fon retour d'un voyage » aux Ifles, fut affailli d'une tempête à l'embouchure de la Garonne; » mais le péril paffé, il arrive au port: fon père, fa mère, fon frère aîné » allèrent au devant de lui, bien contens de le voir fauvé. Ah! leur dit il, deft par un miracle; & je » l'attribue à un vœu que j'ai fait. Mon » enfant, il faut l'accomplir, lui dirent »fes parens; quel vœu ayez-vous fait?

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»P'ai promis à Dieu, reprit-il, que, s'il me faifoit la grace d'échapper au naufrage mon frère aîné fe feroit » Chartreux. »

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Quatrième Conte.

» Dans un Couvent de Capucins, l'un d'eux qui n'étoit pas aufli » avantageusement pourvu de barbe » que les autres, en étoit méprifé & » tourné en dérifion. Le Gardien » homme grave & févère, leur en fit » une réprimande, & leur dit qu'il

כל

ne falloit pas s'enorgueillir des dons » du Ciel, ni infulter à ceux qu'il » n'avoit pas favorifés de même. Ipfe » fecit nos, & non ipfi nos, ajoută-t-il

&fi le Père Nicaife n'a pas une auffi » belle barbe que nous devant les hommes » peut-être en aura-t-il une plus belle· devant Dieu, »

Cinquième Conte

» Une fille pourfuivoit un jeune » homme pour caufe de féduction; > mais fon Avocat ne trouvoit pas fes » moyens fuffifans. Elle revint de chez lui fort trifte: mais le lendemain Κν.

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