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que Phedre doit avoir vécu jufqu'à la troisième année du règne de l'Empereur Claude. Il faut voir dans fa Préface comment il établit qu'il n'étoit: pas né en Thrace, mais dans la Ma cédoine.

Voici maintenant l'hiftoire des Fables: de cet Auteur. Quand elles parurent pour la première fois en 1596, le pu blic les reçut avec beaucoup de fatiffaction, & peronne ne s'avifa de douter qu'elles ne fuffent l'ouvrage de celui dont elles portoient le nom. Phedre refta donc en poffeffion de fes Fables jufqu'à ce qu'un Critique hardi, Pierre Scriverius, s'avifa (dans une de fes Notes fur Martial), de s'élever contre l'opinion reçue, & d'avancer qu'il avoit plus d'une raifon pour croire que ces Fables étoient fort mal à propos attribuées à Phedre. Sans dé velopper les raifons Scriverius fe contenta de citer la 17. Fable du troisième livre de Arboribus in tutela Deorum; & parce qu'il l'avoit trouvée dans la Cornucopia (1), de Nic. Perot,

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(1) Cornucopia feu Comment, in Martialem:

qui la donne comme traduite par lu même d'Avienus:le Critique téméraire en conclut que toutes les autres Fables publiées fous le nom de Phedre n'étoient point de cet Auteur, mais de l'Archevêque Perot. N'étoit il pas

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tel eft le titre de cet Ouvrage de Perot qu ne parut qu'après la mort de l'Auteur, par les foirs de fon Neveu. La plus an cienne édition que j'en connoiffe, eft celle de Venife, per Pagan. de Peganinis, 1489, in-fol. Le P. D shillons dit que Peroty. devenu Archevêque, rougit de publier cet Ouvrage, propter fæditatem for ium qua ibi explicantur. Mais le détail de ces ordures appartient moins à Perot qu'à fon Editeur, qui le reconnoît en ces termes : « nihil » ferè desmeo addidi præterquam loca » quædam, quæ Nicolaus quon am impurie tate quadam atque obfcanitate verborum caflis ac pudicis auribus execrabilia viderentur, curfim breviterque tetigerat ipfe » latiùs expofui; & ct Editeur prétend fe juftifier en avançant fanshente, nihil tam fædum effe quod non fit turpiffimum ignorare; c'eft ce qu'ont remarqué, avant moi, Fabricius & Apofto o Zeno; le premier dans fa Bibliothèque latine du moyen age; & l'autre, dans les Diffetazioni Voffiane in.49. tom. premier, où est un article fort curieux, fur Nicolas Perot, & fur les Ouvrages.

plus naturel de penfer que les Fables de Phedre étant tombées entre les mains de Perot, ce Prélat avoit jugé à propos de fe les attribuer? Mais voici des raifons qui renverfent l'opinion de Serverius. Il exifte en Italie un manufcrit vû en 1727, par d'Orville, lequel contient les Fables d'Avienus celles de Phedre & celles de Perot, dans la Préface duquel Perot reconnoît que ces Fables ne font pas de lui, mais d'Efpe, d'Avienus & de Phedre. En outre les Fables de Phedre exiftent fous fon nom dans des manufcrits bien antérieurs à Perot, entr'autres, dans celui de St. Remi, qui a péri dans l'incendie de 174, mais dont une partie calquée exactement fur l'origi nal, prouve une antériorité de 500 ans à Perot; & dans celui de Pithou, qui appartient aujourd'hui à M. le Préfident le Pelletier de Rofenbo, & que l'on juge avoir 800 ans d'antiqité. M. Chriftus, qui a renouvellé l'opinion de Scriverius, s'eft fortement trompé en croyant ces deux Manufcrits du même temps que Perot; & quand il a voulu révoquer en doute

la pureté de la latinité de ces Fables, ila trouvé dans M. Funccius, un défenfeur de Phedre, qui a montré jufqu'à l'évidence, la foibleffe de fes raifons. Phedre a quelques locutions, quelques tours de phrafe particuliers, on en convient: mais Térence, mais Horace n'ont-ils pas aufli leurs locutions propres ? La fimplicité, la pureté du ftyle de Phedre indiquent feules l'antiquité de l'Auteur, & prouvent évidemment combien il eft abfurde d'attribuer l'Ouvrage au quinzième fiécle. Charles Vianelli, ami de Sigonius s'étant avifé, en 1583, de publier fous le nom de Ciceron un Traité de la Confolation, compofé par Sigonius lui-même, les Critiques ne tardèrent pas d'indiquer à ceux qui pouvoient s'y tromper, les traits d'une main récente ; & l'erreur fut de courte durée, parce que dans fon Ouvrage, Sigonius avoit laillé échapper quelques expreffions & quelques tournures qui n'appartenoient nullement au fiécle d'A gufte. 11 eft aifé d'appliquer ce fait à Phedre: aufli parmi les bons Critiques, n'en eft-il plus aucun qui doute que fes Fables ne foient de lui.

Je ne fuivrai pas, Monfieur T'hiftoire critique des éditions de fes Fables; il faut la lire dans la Préface du P. Desbillons, qui rend juftice à ceux qui ont travaillé avant lui, fur Phedre, & qui a lui- même travaillé de façon que fon édition fera déformais préférée à toutes les autres. L'Editeur a eu foin d'en retrancher les Fables qui pouvoient bleffer les mœurs; il a de plus, achevé la Fable du yon, Roi, (la 13o du 4° Livre). Je vous invite à lire cette pièce, ainfi terminée par le P. Desbillons; vous croirez lire Phedre lui-même. Cette édition me fait défirer avec tous les gens de goût & les amateurs de la langue des Romains, que le P. Desbillons le détermine enfin à publier Hiftoire de la Langue Latine, qu'il garde depuis fi long-temps dans fon porte feuille; perfonne n'étant plus en

état

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que lui de donner fur cette ma tière, un'ouvrage folide & approfondi. Nous devons encore au P.Desbillons une édition de l'Imitation de JefusChrift, qui parut il y a fix ans ; & il feroit d'autant plus important de la

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