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qui avoit étudié leur langue facrée du Sanferit, & qui a traduit quelquesuns de leurs livres, afsûre que les Brames ont confervé ces livres depuis près de cinq mille années, lefquels prouvent une longue fuite de fiécles précédens. Dans fa traduction du Shafta, on voit au premier article, cette belle inftruction fur le fouverain Etre : «< « Dieu eft celui qui fut tou » jours: il créa tout ce qui eft. Une fphère parfaite, fans commencement ni fin, eft fa foible image. Dieu » anime & gouverne toute la création par la providence générale de fes » principes éternels & invariables. Ne fonde point la nature de l'existence » de celui qui fut toujours; cette recherche eft vaine & criminelle : c'eft affez que, jour par jour, & » nuit par nuit, fes ouvrages t'annoncent fa fageffe, fa puiflance & fa » miféricorde, Tâche d'en profiter », M. le Gentil ne croyoit point à la Chronologie des Indiens; il la trouvoit prodigieufement exagérée. M. Bailly, dans la feconde partie de fon Difcours préliminaire, explique très-amplement

la manière dont il faut l'entendre. Les Indiens comptent quatre âges, dont la durée eft de quatre millions trois cens vingt mille ans. M. Bailly prouve que la fource de l'erreur vient d'avoir mal entendu ce que les Indiens appelloient année, ou révolution, ou mefure du temps. Suidas dit formellement que les anciens ont compté des jours pour des années, & il cite en preuve, l'exemple de Vulcain, que les Egyptiens ont fait régner 4477 ans, c'eft à dire, 4477 jours, qui font douze ans trois mois & fept jours. Il y avoit auffi des années ou révolutions de 15 jours, d'un mois, de deux mois, de fix mois. On trouve chez les Indiens prefque toutes les mefures du temps & les différentes années qui ont été en ufage dans l'antiquité. Les quatre âges des Indiens, en obfervant que la durée du dernier qui n'eft point révolu, eft fixée par prédiction, au lieu d'embraffer quatre millions trois cens vint mille années, feront donc réduits à douze mille ans; & cet intervalle, encore exagéré, se trouve refferré dans des bornes plus

raifonnables. Mais toutes ces explications font-elles bien juftes & bien fatisfaifantes?

Les Indiens difent que chacun de leur âge a fini par un déluge, & ils doivent par conféquent en compter trois. Chacun de ces déluges a été univerfel, & Dieu a opéré une nouvelle création. Cette tradition eft conforme à ce que rapporte Héfiode dans fon Poëme des Euvres & des jours. Jupiter créa & détruifit fucceffivement quatre races d'hommes, qui font les quatre âges d'or, d'argent, d'airain & de fer; ces hommes font toujours plus méchans les uns que les autres. Les Indiens ont auffi cette fable de la dégénération de l'efpèce humaine. La vertu, repré fentée par une vache, fe tenoit fur quatre pieds dans le premier âges elle en a perdu un à chaque âge, & ne fe tient plus aujourd'hui que fur un pied. Ces quatre pieds étoient la vérité, le repentir, la charité & l'au mone. A la fin du premier âge, elle a perdu la vérité; dans le fecond, le repentir a ceffé; la charité s'est éteinte avec le troifième; il ne refte plus que

l'aumone, qui n'eft qu'une partie de la charité, mais qui, au milieu de la corruption, retrace encore quelque ombre des vertus qui n'exiftent plus.

Sans adopter la Chronologie des Indiens, il paroît qu'aucun peuple exiftant ne remonte fi haut dans l'antiquité. La Nation Indienne doit la durée de fa longue existence à l'indolence qu'elle a contractée dans les climats du midi. Comme elle n'a jamais fait de réfiftance, elle n'a jamais été ni détruite, ni difperfée; elle s'eft foumile fans quitter les mœurs, fans fe déranger de fes ufages, fans fe méler aux conquérans. Elle eft ce qu'elle a été, gardant ce qu'elle a, n'enviant point ce que les autres pofsèdent, & voyant avec indifférence, avec dédain même, & nos livres, & nos inftru mens, & nos connoiffances. C'est par cette obftination qu'elle a gardé, & fes traditions, & les fciences dont elle étoit dépofitaire. C'eft parce que les Indiens font anciens fur la terre, qu'ils ont eu le temps de perfectionner, L'Aftronomie; & c'eft parce que leur Aftronomie eft perfectionnée, qu'ils

font évidemment un des plus anciens peuples du monde. Ce raifonnement de M. Bailly n'eft pas bien concluant; car nous avons certainement de trèsgrands Aftronomes, & l'Aftronomie n'eft cultivée parmi nous que depuis quelques fiècles.

« Il fe préfente une question, dit M. Bailly, c'eft de fçavoir fi cette Aftronomie des Indiens n'a pas été empruntée des Egyptiens, à qui Ciceron attribue la découverte du mouvement de Venus & de Mercure autour du Soleil.... Nous répondons que T'Aftronomie Egyptienne, qui nous eft parvenue, fe borne à l'art d'orienter les édifices, & à la connoiffance de la durée de l'année de 365 jours. Ces connoiffances étoient utiles & importantes pour les Grecs, encore plus ignorans que les Egyptiens. Les élèves ont loué leurs maîtres. ..... Nous dirons que fi les Egyptiens ont laiffé une grande réputation, les Indiens cnt confervé des monumens. Quand on nous montreroit l'Aftronomie Indienne infcrite fur les colonnes d'Egypte, nous oppoferions les ma

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