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Telle est des saisons

La marche éternelle:
Des fleurs, des moissons,
Des fruits, des glaçons.
Ce tribut fidelle

Qui se renouvelle

Avec nos desirs,

En changeant nos plaines Fait tantôt nos peines, Tantôt nos plaisirs.

Cédant nos campagnes

Au tyran des airs,

Flore et ses compagnes
Ont fui ces déserts.
Si quelqu'une y reste
Son sein outragé
Gémit, ombragé
D'un voile funeste.

La nymphe modeste

Versera des pleurs

Jusqu'au tems des fleurs,

Quand d'un vol agile

L'Amour et les Jeux
Passent dans la ville,
J'y passe avec eux.
Sur la double scène,
Suivant Melpomène
Et ses jeux nouveaux,

Je vais voir la guerre
Des auteurs nouveaux
Qu'on juge au parterre.
Là, sans affecter
Les dédains critiques,

Je laisse avorter
Les brigues publiques.
Du beau seul épris,
Envie ou mépris

Jamais ne m'enflamme;
Seulement dans l'âme
J'approuve ou je blâme,
Je bâille ou je ris.
Dans nos folles veilles
Je vais de mes airs
Frapper tes oreilles.
Après nos concerts
L'ivresse au délire
Pourra succéder;

Sous un double empire
Je sais accorder

Le thyrse et la lyre:
J'y crois voir Thémire,
Le verre à la main,

Chanter son refrain,
Folâtrer et rire.,

Quel sort plus heureux! Buveur, amoureux,

Sans soin, sans attente,

Je n'ai qu'à saisir
Un riant loisir;

Pour l'heure présente
Toujours un plaisir;
Pour l'heure suivante
Toujours un desir.

Coulez, mes journées, Par un nœud si beau Toujours enchaînées, Toujours couronnées D'un plaisir nouveau. Qu'à son gré la Parque Hâte mes instans,

Les compte et les marque Aux fastes du tems;

Je l'attends sans crainte:

Par sa rude atteinte

Je serai vaincu;

Mais j'aurai vécu.

Sans date ni titre,

Dormant à demi,
Ici ton ami

Finit son épitre.
En rimant pour toi
Le dernier chapitre,
La table où je boi
Me sert de pupitre.

De tes vins divers

Je serai l'arbitre:

Sois-le de mes vers;
Je te les adresse.

S'ils sont sans justesse,
Sans délicatesse,

Sans ordre et sans choix,
En de folles rimes

On lit quelquefois

De sages maximes.

Par BERNARD.

A MON AMI

revenant de l'armée.

AINSI donc la terre respire!
De concert, vainqueurs et vaincus,
Ennuyés de s'entre-détruire,
Ferment le temple de Janus;
Et la paix revient nous sourire.
Louis, arborant l'olivier,

N'a plus besoin de ton courage;
Tu vas, regagnant ton village,
Au pas tardif d'un vieux coursier,
Et fatigué, comme on peut croire,
Des maux que cause à ses amans
Cette déesse de mémoire,
Tu rapportes après cinq ans
Quelques dettes et de la gloire.
Tome IV.

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