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Code civil et la constitution les dispositions reproduites cidessus qui font de la naturalisation le privilège des chrétiens. La suppression de l'article 8 de la constitution a été votée par les Chambres roumaines au mois d'avril 1879 et il n'est guère douteux que ce vote ne soit confirmé par l'Assemblée nouvelle, dont l'approbation est nécessaire pour modifier une disposition constitutionnelle. On peut se demander toutefois si la faculté laissée au parlement de naturaliser individuellement les Juifs, comme les Chrétiens, paraîtra suffisante pour répondre au vœu du congrès de Berlin et aux exigences de l'article 44 du traité du 13 juillet 1878. Ne pourrait-il pas arriver que le Parlement refusât de naturaliser les Juifs qui demanderaient à l'être et maintînt ainsi en fait l'exclusion condamnée en droit? Il semble qu'il faudrait du moins décider que la nationalité roumaine sera conférée de plein droit aux Israélites nés et domiciliés en Roumanie, et qui n'appartiennent à aucune nationalité étrangère. Ce n'est que par une mesure de ce genre que la Roumanie se conformerait à l'esprit des stipulations de Berlin.

Servie. - L'article 35 du traité de Berlin, impose à la Servie les mêmes obligations que l'article 44 dont il vient d'être question. Pour mettre ces nouveaux principes en vigueur, une modification de la constitution est également indispensable. Tout changement à la loi fondamentale en Servie doit être approuvé par deux assemblées ordinaires successives, et par une grande Skupchina, réunie spécialement. Il ne manque plus que l'approbation de la grande Skupchina, et cette approbation paraît certaine.

Au point de vue de la nationalité, ce vote aura les mêmes conséquences qu'en Roumanie: les Juifs et les

Musulmans pourront devenir sujets du Prince. Ils ne seront pas exclus à l'avenir de la naturalisation'.

Suède. Après trois ans de résidence en Suède, on peut demander la naturalisation. Elle n'est accordée que sur enquête favorable, et après que le pétitionnaire a établi qu'il a abandonné sa nationalité d'origine. Si l'allégeance est perpétuelle, il doit renoncer à s'en prévaloir. A l'égard d'un Français, aucune formalité de ce genre ne serait probablement demandée. En tout cas, elle serait tout à fait sans objet, puisque, par là même que le Gouvernement suédois accorde le droit de cité à un Français, celui-ci cesse d'être Français2.

L'étranger naturalisé suédois ne peut pas, d'après la constitution, devenir membre du Conseil d'État, c'est-à-dire ministre.

Suisse. Nul ne peut être citoyen suisse sans appartenir spécialement à l'un des cantons confédérés et à l'une des communes de ce canton. La bourgeoisie dans une commune, l'indigénat dans un canton, et enfin le droit de cité fédéral sont trois éléments indispensables de la nationalité suisse. L'ancien principe du pays était que les deux premiers de ces éléments emportaient de plein droit le troisième. En d'autres termes, l'individu qui avait acquis le droit de bourgeoisie dans une commune helvétique, et qui était en possession de l'indigénat dans

1 Nous n'avons pu recueillir des renseignements sur les règles qui régissent l'acquisition et la perte de la nationalité serbe. L'article 22 de la constitution de 1867, qui est ainsi conçue: « une loi déterminera les condi«<tions d'admission à la nationalité serbe, les droits qui y sont attachés, et «< comment elle se perd ». Nous ne savons si cette loi a été promulguée. Voir Ubicini. Constitution de la Serbie.

2 Voir le Haandbok i hela svenska Lagfarenhelen af D' Thurgren, au mol Ullaending, et ci-après annexe Y.

un des vingt-deux cantons, était par cela même citoyen de la confédération et apte à invoquer la protection du gouvernement fédéral. La Constitution de 1848, qui a substitué un gouvernement central, fixe et permanent, à l'ancien système des cantons directeurs, avait respecté ce régime ou plutôt n'y avait apporté qu'une restriction insignifiante. L'article 43 interdisait aux cantons de recevoir au nombre des citoyens un étranger qui ne fût pas préalablement affranchi de tout lien envers son pays d'origine. C'était une règle fort sage, mais trop générale et insuffisante en pratique. L'acquisition de l'indigénat cantonal ayant pour effet d'entraîner la naturalisation suisse, il n'était pas juste d'écarter toute participation des autorités fédérales; celles-ci n'avaient aucun moyen de résistance contre les abus que les cantons pourraient faire de leur droit. Elles ne pouvaient intervenir qu'au cas où, la naturalisation ayant été conférée à un étranger en violation de l'article 43 de la constitution, un conflit venait à surgir avec l'État dont le nouveau citoyen était originaire.

Ces inconvénients n'échappèrent pas aux rédacteurs de la nouvelle Constitution fédérale de 1874, qui firent adopter la disposition suivante :

« La législation fédérale déterminera les conditions aux« quelles les étrangers peuvent être naturalisés, ainsi que « celles auxquelles un Suisse peut renoncer à sa nationa<lité pour obtenir la naturalisation dans un pays étran« ger 1. »

En exécution de cet article, le Conseil fédéral a fait préparer un projet de loi sur l'acquisition et la perte de la

Article 44, 2o. Voir l'Annuaire de lég. étrangère, année 1875.

nationalité suisse, qui a été voté le 3 juillet 1876 par le Parlement fédéral 1.

L'étranger, dit l'art. 1er, qui désire obtenir la nationaa lité suisse doit demander au Conseil fédéral l'autorisa«<tion de se faire recevoir citoyen d'un canton et d'une

« commune. »

On voit aussitôt la différence qui sépare la nouvelle législation de l'ancienne. L'étranger, qui désire obtenir le droit de cité en Suisse, au lieu de s'adresser aux autorités cantonales, doit se pourvoir d'abord auprès du gouvernement central de la Confédération. « Nous partons, disait le Conseil fédéral dans le message par lequel il proposait à l'Assemblée fédérale l'adoption du projet de loi, nous partons du principe que la nationalité suisse doit être envisagée à trois points de vue différents, à celui de la commune, à celui du canton et à celui de la Confédération, et que l'acquisition de la nationalité suisse suppose la coopération de ces trois parties intéressées. Contrairement au système antérieurement en vigueur, nous considérons l'action du Conseil fédéral comme le facteur principal, par la raison que c'est le Conseil fédéral qui, eu égard aux rapports qu'il entretient avec les pays étrangers, est le plus, nous dirions même le seul intéressé à ce que l'étranger qui demande à être naturalisé se soit libéré de tous liens envers l'État dont il était précédemment ressortissant. C'est alors seulement que les cantons et les communes ont à lui conférer sa nationalité nouvelle. Nous trouvons donc logiquement correct de réclamer en première ligne la coopération de la Confédération, là où ses intérêts sont en jeu.

1 Voir annexe Z. On trouvera dans le Bulletin de la Société de Lég. comp., n° de mai 1878, un commentaire complet de cette loi.

Ce mode de procéder présente, de plus, de grands avantages; en effet, il prévient toutes les naturalisations qui pourraient entraîner la Confédération dans un conflit ou lui préparer des difficultés dont une autorité locale ne saurait apprécier la nature; il coupe court, en même temps, à toute espèce de peines, de frais, d'ennuis et de déceptions. En procédant ainsi le Conseil fédéral est, en outre, à même de se renseigner exactement sur chaque cas spécial, par le moyen de ses agents diplomatiques ou consulaires et d'écarter les difficultés qui pourraient se présenter. >>

Cette citation met en lumière la tendance générale de la loi, qui est d'éviter, autant que possible, les conflits avec les puissances étrangères à l'occasion des divergeances dans l'appréciation de la nationalité des individus. C'est l'objet direct de l'article 2, aux termes duquel l'autorisation du Conseil fédéral prévue dans l'article 1er n'est donné qu'aux étrangers :

« 1° Qui ont leur domicile en Suisse depuis deux ans ; « 2o Dont les rapports avec l'État auquel ils ressortissent << sont tels qu'il est à prévoir que leur admission à la na<< tionalité suisse n'entraînera pour la confédération au«< cun préjudice. »

L'exposé des motifs du projet de loi explique comment le Gouvernement de Berne a été amené à proposer une disposition de ce genre.

Le nombre des conflits, disait le Conseil fédéral, résultant des naturalisations acquises dans un but de fraude, << s'est accru d'une manière regrettable dans ces dernières années. Souvent, c'est une législation étrangère qui, excluant le divorce.., engage les ressortissants de cet État à chercher une nouvelle patrie, dont la législation leur permette ce que celle de leur pays d'origine leur interdisait.

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