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TITRE PREMIER.

DU CODE D'INSTRUCTION CRIMINELLE EN GÉNÉRAL.
ÉLÉMENS DE SA THÉORIE,

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457. Par ces mots, instruction criminelle, le législateur exprime l'ensemble des dispositions portées pour que les officiers de police et les tribunaux criminels atteignent le but de leur institution; ce sont donc des expressions génériques comprenant tout ce que les lois ont réglé relativement à l'organisation et à la compétence de ces officiers et de ces tribunaux, ainsi qu'à la procédure qu'ils doivent suivre ou que doivent observer ceux qui réclament leur intervention.

458. Ce Code n'a été mis en activité qu'après la réorganisation des cours royales, ordonnée par un décret du 6 juillet 1810(a), et il a reçu son exécution dans chaque ressort immédiatement après l'instal

(a) Le décret du 6 juillet 1810 n'est que l'ordonnance d'exécution de la loi du 20 avril 1810 sur l'organisation de l'ordre judiciaire et l'administration de la justice en ce qui concerne les cours royales, comme le décret du 18 août de la même année l'est en ce qui concerne les tribunaux de première instancc.

Le Code d'instruction criminelle fut terminé dès 1808, mais il nécessitait une nouvelle organisation judiciaire; la loi et les décrets qui viennent d'être rappelés en furent le complément nécessaire : dès-lors on doit, dans l'application, interpréter les dispositions de ces différens actes législatifs de manière à les faire concorder ensemble.

lation de chacune d'elles; ces autorités ont jugé, en conséquence, les affaires criminelles dans l'ordre des diverses attributions qu'il leur décer nait et suivant les formes qu'il prescrit, encore bien que ces contraventions, ces délits et ces crimes eussent été commis antérieurement (décret du 23 juillet 1810, art. 1er).

459. Considérées en général, les lois qui règlent l'ensemble de la procédure criminelle tendent à concilier ou plutôt à combiner les deux intérêts qui se trouvent en opposition, celui de la société et celui de l'individu inculpé comme auteur ou complice d'une infraction; de manière qu'après avoir joui de tous les moyens de se défendre et de prouver son innocence il soit assuré que des juges réduits à l'impossibilité de se conduire arbitrairement, et suffisamment éclairés sur la nature et les circonstances de l'affaire, le jugeront avec impartialité et appliqueront la loi pénale avec dis

cernement.

460. Considérées comme réglant l'action de la police, les mêmes lois doivent particulièrement procurer dans l'instruction qui précède l'action de la justice toute la célérité compatible avec la nécessité de la rendre complète. De grands publicistes ont démontré la justesse de cette remarque de Beccaria Plus la peine est prompte et voisine du délit, plus elle est juste et utile (a).

Il suffit ici que la loi veille à la régularité et à

(a) Traité des délits et des peines, § 10.

l'impartialité des opérations; effet que, dans la procédure actuelle, on obtient infailliblement du concours (sinon toujours simultané, du moins presque ordinairement successif) de plusieurs fonctionnaires à la recherche, à la poursuite et à l'instruction préliminaire des affaires criminelles.

461. Enfin, considérées comme réglant l'action de la justice, les lois de la procédure criminelle doivent prescrire la plus grande publicité. Tout ce qui a été fait par les officiers de police doit être communiqué au prévenu et à l'accusé : il faut que sa comparution à la barre du tribunal qui doit prononcer sur son sort ait été précédée de la connaissance de toutes les charges, de toutes les pièces; il faut qu'elles soient connues de lui personnellement, aussi bien que de son conseil (a).

462. Liberté indéfinie des moyens de défense (b), droit de les faire valoir par un ou plusieurs conseils; faculté de reprocher les témoins, et même de ré cuser péremptoirement une partie des juges, dans les cas prévus et suivant les formes prescrites par la loi; publicité des débats, sauf quelques excep

(a) Ces deux points de vue sous lesquels les lois qui règlent la procédure en matière criminelle sont envisagées, police et justice, ont déterminé la division du Code d'instruction criminelle en deux parties bien distinctes la première embrasse tout ce qui tient à la constatation légale du fait; la seconde règle ce qui touche son jugement. ( Voir les nos 113, 114 et 115 de ce Cours.)

:

(b) La liberté indéfinie des moyens de la défense s'arrête devant le respect dû aux institutions, aux fois, et quand elle dégénèrerait elle-même: en crime ou en délit.

tions justifiées dans l'intérêt des mœurs: voilà les plus importans principes dont les lois sur la procédure criminelle doivent sans cesse offrir l'application; principes sacrés, invariables, indépendans de toutes les circonstances! principes qui ne sauraient être violés que par un insupportable despotisme!

463. Mais si les droits des prévenus et des accusés (a) sont respectables, ceux de la société entière ne sont pas moins sacrés de là tous les moyens donnés aux officiers de police judiciaire pour rechercher, constater et poursuivre les infractions de tout genre; de là tous ceux que la loi a remis entre les mains du ministère public pour accuser les coupables, obtenir et faire valoir les preuves de la prévention ou de l'accusation : sans injustice et sans prévention, sans doute, mais avec toute la sévérité, toute l'inflexibilité qu'exige le maintien de l'ordre social et de la sûreté publique et particulière.

464. Si dans chacune de ses dispositions, prise isolément, le Code d'instruction qui nous régit ne présente pas toujours une application rigoureuse de ces grands principes, il serait du moins injuste de contester qu'ils en forment la base fondamentale.

(a) On entend par prévenu l'individu traduit devant un tribunal de simple police, ou de police correctionnelle; et par accusé celui qui, mis en accusation, est traduit devant une cour d'assises.

inm

TITRE II.

DES ACTIONS JUDICIAIRES QUI DÉRIVENT DES INFRACTIONS.

465. Tout fait auquel la loi attache une peine donne lieu à deux actions, l'une en faveur de la société dont il trouble l'ordre, l'autre en faveur de la personne dont il aurait blessé les intérêts.

La première est l'action publique, la deuxième est l'action civile; dénominations qui indiquent l'objet de chacune d'elles, l'action publique n'étant formée et poursuivie que pour l'intérêt public (a), et l'action civile se rapportant exclusivement à l'intérêt civil, autrement privé, des personnes (Code d'instruction criminelle, art. 1or) (b).

(a) L'action publique n'étant introduite que dans l'intérêt général de la société, indépendamment de l'action particulière donnée à la partie qui s'en trouve lésée, le fonctionnaire chargé de veiller au maintien de l'ordre public peut seul exercer cette action, et il l'exerce, qu'il soit ou' non próvoqué, quelles que soient les conventions intervenues entre les parties, et soit que le fait constitue un crime, un délit ou une simple contravention (voir arrêt de la cour de cassation du 11 juin 1813).—La règle de spontanéité d'action ne souffre d'exception que dans quelques cas rares, tels que ceux exprimés par les art. 336, 339, 357, 433 du Code pénal et 429 du Code d'instruction criminelle; mais dans les délits où il faut plainte préalable pour que le ministère public agisse, la renonciation postérieure de la partie qui a porté plainte ne peut arrêter l'action publique. (Arrêt de la cour de cassation du 23 janvier 1813.)

(b) L'action civile étant entièrement dépendante de la volonté de la partie lésée, et introduite dans son intérêt privé, elle seule a droit de l'intenter.

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