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559. Chaque notaire est tenu de résider dans le lieu (a) qui lui est fixé par l'ordonnance royale qui le nomme, laquelle constitue son titre et sa qualité: en cas de contravention, il peut être considéré comme démissionnaire; et le ministre de la justice, après avoir pris l'avis du tribunal, peut proposer son remplacement (art. 4).

C'est donc à ce ministre seul, et non au tribunal, qu'il appartient de faire réprimer le défaut de résidence: le tribunal commettrait un excès de pouvoir, s'il se permettait de réputer le notaire démissionnaire.

Mais la peine serait-elle encourue par le notaire de troisième classe dont la résidence aurait été fixée dans un bourg ou village, dépendant d'une justice de paix dont le chef-lieu serait dans une ville, et qui se déplacerait pour venir exercer son ministère dans ce chef-lieu?

Cette question à été vivement débattue; mais on est aujourd'hui d'accord que ce notaire peut, lorsqu'il se trouve dans la ville, et qu'il en est requis, instrumenter dans les quartiers qui font partie du canton de la justice de paix de sa résidence : l'essentiel est qu'il conserve à sa résidence le dépôt des minutes (b).

(a) Par le mot lieu il ne faut pas entendre toute la commune dont ce lieu fait partie, mais bien la localité ainsi dénommée : c'est du moins ce qu'a décidé le garde-des-sceaux, le 18 mai 1822, sur la plainte des notaires de Lyon, à l'égard d'un notaire qui, nommé à la résidence de Caluire, l'avait transportée au hameau de Saint-Clair.

(b) C'est ce qui résulte de l'avis du conseil-d'état du 7 fructidor an 12

560. Les notaires n'ont le droit d'instrumenter que dans l'étendue du territoire déterminé pour chacun d'eux (a), et à cet effet ils sont désignés en

trois classes:

La première se compose de ceux des villes où siége une cour royale, ils peuvent exercer dans toute l'étendue du ressort de cette cour;

La seconde comprend ceux des villes qui n'ont qu'un tribunal de première instance, lesquels ne peuvent exercer que dans son ressort;

La troisième, enfin, se compose de ceux des autres communes qui n'ont qualité, pour recevoir des actes, que dans le canton du juge de paix auquel ressortit la commune de leur résidence (art. 5) (b).

qui porte que les notaires peuvent bien se transporter, lorsqu'ils en sont requis, dans une commune quelconque de leur ressort, pour y instrumenter, mais qu'ils ne peuvent ouvrir étude ni conserver le dépôt de leurs minutes ailleurs que dans le bourg ou village qui leur est assigné pour résidence.

Ce serait, du reste, au garde - des - sceaux à décider sur les faits qui constitueraient l'ouverture d'une seconde étude. On peut citer pour précédent le fait de se transporter, à jour et heure déterminés, dans une commune où réside un autre notaire, et où le notaire étranger a loué une chambre et y attend que des cliens se présentent; car il est certain qu'alors on ne se transporte pas sur la réquisition d'une partie.

(a) Ce territoire s'appelle ressort, qui diffère de la résidence en ce sens qu'il est, ainsi que le dit M. Carré, l'étendue du territoire dans lequel chaque notaire a le droit d'instrumenter; et la résidence, le lieu où ce notaire est obligé d'avoir sa demeure fixe pour l'exercice de sa charge.

(b) Mais les notaires de canton, en résidence dans une ville divisée en plusieurs cantons, peuvent instrumenter dans toute l'étendue de la ville, en se restreignant seulement pour les communes rurales à celles qui font partie de leur canton; et cela à la différence des notaires en résidence dans une commune rurale, qui ne peuvent instrumenter que dans la portion de la ville qui fait partie de leur canton. (Voir l'avis du conseil-d'état du 30 thermidor an 12.)

561. Hors de ces limites, le notaire n'est considéré que comme un simple particulier dénué de pouvoir et de caractère; et dès-lors les actes qu'il rapporterait ne seraient point authentiques, ne vaudraient par conséquent que comme s'ils avaient été passés sous seing privé, ne tirant leur force que de la signature des parties et étant nuls si l'une d'elles n'a point signé ( art. 68 ); et le notaire aurait encouru la peine de la suspension pendant trois mois, de la destitution en cas de récidive, et serait, en outre, passible des dommages-intérêts que réclameraient les parties privées, par sa faute, du bénéfice de l'authenticité (art. 6) (a).

562. Il était naturel de déclarer les fonctions de notaires incompatibles avec des fonctions qui pourraient avoir des rapports opposés à celui du notariat; ou qui pourraient, par l'influence qu'elles donneraient à celui qui serait revêtu de plusieurs fonctions publiques, gêner la liberté du choix.

C'est pourquoi la loi (art. 7) et plusieurs décrets ou ordonnances ont déclaré incompatibles celles de conservateur des hypothèques, de juge (mais non pas de suppléant), de procureur du roi, sub

(a) Pour éluder cette disposition de la loi, il est arrivé que des notaires se sont rendus hors de leur ressort pour faire stipuler aux parties les conditions de leurs actes; ou même pour procéder à l'adjudication d'immeubles, sauf à en dresser eux-mêmes les actes dans leurs études: par ce mode, ils peuvent quelquefois échapper à l'action des tribunaux. (Voir les arrêts de la cour de cassation du 3 juillet 1826.)

Cependant, s'il était démontré que c'est un moyen imaginé pour couvrir la contravention, ils s'exposeraient à l'application de l'art. 6 de la loi de

ventose an 11.

stitut, greffier, avoué, huissier, préposé à la recette des contributions directes ou indirectes, juge de paix et commissaire de police, sous-préfet, conseiller de préfecture, contrôleur des contributions, avocat et commissaire-priseur.

TITRE II.

DES ACTES, DE LEUR FORME; DES MINUTES, GROSSES, EXPÉDITIONS ET RÉPERTOIRES.

CHAPITRE PREMIER

Des actes en général et de leurs diverses espèces.

563. On appelle acte, en jurisprudence, tout écrit rédigé soit par le ministère d'officiers publics, soit par de simples particuliers (a).

·(a) Actum generale verbum esse, sive verbis, sive re quid agatur, ut in stipulatione vel numeratione. (L. 19, ff de verb. sign.)

L'acte diffère donc de la convention qui, pour exister, n'a besoin que du consentement des parties. Duorum vel plurium in idem placitum consensus. (L. 1 (§ 2), ff de pact.)

L'acte est destiné à prouver la convention, et quelquefois à lui donner plus de solennité: Fiunt scripturæ ut quod actum est per eas facilius probari poterit. (L. 4, ff de sign. et hyp.)

Aussi peut-on attaquer la convention sans attaquer l'acte, et au contraire demander la nullité de l'acte sans entendre toucher à la convention (TOULLIER, Droit civil français, tome 6) : c'est ce qui résulte particulièrement de l'art. 68 de la loi de ventose qui porte que l'acte notarié, nul pour vice de forme, vaut encore comme acte sous seing privé, s'il est revêtu de la signature de toutes les parties.

Ainsi encore, par suite de ce principe que l'acte est la constatation de la convention, on doit s'attacher, pour en déterminer la nature, bien plus aux stipulations qu'il renferme qu'à la dénomination qui lui a été donnée ; de là ce brocard de droit: Non quod scriptum, sed quod GESTUM est, inspicitur.

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