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de celui qui avait exterminé tant de mahométans dans le défilé de Trété. Emporté au milieu des ennemis, par un cheval fougueux qu'il montait, il fut percé de coups, et ses palicares ne parvinrent qu'avec des efforts extraordinaires à recouvrer son corps, auquel ils rendirent les devoirs funèbres sous le canon de la petite forteresse, où on a dû depuis lui ériger un tombeau.

Les combats cessèrent le premier septembre. L'invasion de la Morée avait coûté plus de dix mille hommes aux mahométans; mais Argos et tous les autres villages avaient disparu; et comme il n'y avait plus de lieu habitable dans cette partie de la presqu'île, il fut décidé que le siége du gouvernement serait transféré à Saint-Jean d'Astros, dans la Cynurie.

Les vaisseaux hydriotes firent aussitôt voile de ce côté; et le trois du même mois, les premières délibérations des députés eurent lieu à l'ombre des orangers d'un verger, qui devint le local des séances du corps législatif des Hellènes.

CHAPITRE V.

Arrivée de la flotte ottomane devant Patras.

Conseils donnés

aux Turcs. - Nouvelles des prétendus désastres des Grecs,

transmises à Souli.

Escarmouche de Krio Néro.

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Souliotes intimidés capitulent. Bruits sur un protectorat des Anglais réfutés. Arrivée des Souliotes à Céphalonie. Intrigues du consul anglais de Prévésa. Nouvelle de l'invasion de la Morée par Dramali, transmise à Constantinople. Départ de cette ville des ambassadeurs Strangford et Lutzof, appelés au congrès de Vérone. cursions des croiseurs grecs. La Porte détrompée sur ses victoires. Évêques députés par Khourchid vers Odyssée.

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Dispersion de l'armée mahométane de Larisse. du 18 septembre. Avidité des généraux turcs. pitan pacha met à la voile.

ottomane.

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En

· Préparatifs des Grecs. gagement naval devant Hydra. - État imposant de la flotte Saisie d'un brick autrichien. Lettres interceptées. La flotte turque prend la fuite; se retire à la Sude. Situation des Grecs et des Turcs dans l'île de Crète. Trait d'audace des insulaires de Kasos. — Départ de M. Villoch, pour la Perse. — Décapitation d'Ismaël Pachô bey. Translation de la croix de Constantin à Hydra. - Cérémonie. Oraison funèbre des martyrs de Chios.

LA flotte ottomane, composée de la presque totalité des forces navales de la Turquie d'Europe, d'Asie et d'Afrique, était arrivée, au nombre de quatrevingt-quatre voiles, dans les premiers jours du mois d'août, devant Patras.

Suivant les principes de la neutralité pratiquée par les Anglais, ils lui avaient, à son passage à

IV.

ΙΟ

Zante, donné assistance, renseignements, et surtout des conseils, tels, que s'ils eussent été suivis, les Grecs étaient sans doute perdus. Après avoir informé le vice-amiral turc de la défaite des Philhellènes à Péta; du soin qu'une compagnie d'agioteurs, établie dans les îles Ioniennes, pour approvisionner les places turques, avait pris de ravitailler Carystos dans l'île d'Eubée, qui commençait à manquer de vivres, on lui promit de mettre tout en œuvre pour amener les Souliotes à une capitulation, afin de nettoyer l'Épire du seul foyer d'insurrection dont elle était encore infestée. On lui démontra enfin la nécessité de virer de bord sans aucun délai, afin de seconder les opérations de Dramali, qui venait d'entrer en Morée. L'apparition seule de la flotte turque, en cet instant, dans le golfe d'Argos, devait suffire pour épouvanter les Grecs, déja consternés, qui se seraient dispersés dans les montagnes de l'Arcadie. Ils n'avaient plus d'armée aux Thermopyles; des rapports certains annonçaient que les Turcs avaient franchi les défilés, envahi l'isthme, occupé l'Acro-Corinthe, sans éprouver aucune résistance; et que Khourchid pacha, marchant sur leurs pas, s'avançait pour les soutenir. Ainsi, avec un léger effort de la part de l'armée navale, c'en était fait de la cause trop vantée d'une insurrection sur laquelle on n'avait eu jusqu'alors que des documents erronés.

Tels furent, sommairement, les avis et les conseils qu'on donna aux barbares, à leur entrée dans la mer Ionienne. Les uns n'étaient pas entièrement

exacts; mais il est certain que, s'ils eussent suivi les plans qu'on leur proposait, ils auraient probablement été funestes aux Chrétiens. Ils promirent d'y avoir égard, en les soumettant au nouveau capitan-pacha, qui se trouvait dans le château de Patras, dès qu'il aurait pris le commandement de la flotte. On fit voile aussitôt vers le golfe de Lépante, tandis que la police de Zante, chargée d'abuser l'opinion publique, annonçait à son de trompe, dans l'Occident, l'humiliation de la Croix, et les triomphes imaginaires du peuple anti-chrétien.

Soit que les agents anglais de l'Heptarchie comptassent réellement sur les succès des Turcs, ou qu'ils fussent abusés par leur haineuse ignorance, ils travaillaient de toute la puissance de leur machiavélisme à faire réussir les infidèles dans leurs projets d'extermination.

On a vu avec quelle joie le consul britannique de Prévésa s'était empressé, sur la foi des courriers expédiés de Larisse à Békir Dgiocador, de publier la conquête du Péloponèse. Les Anglais avaient de leur côté transmis cette nouvelle aux Souliotes, affligés de la retraite de Mavrocordatos, qui les abandonnait à la fureur des Turcs. Depuis cette révélation fatale, les bulletins anglo-turcs n'annoncerent plus aux belliqueux enfants de la Selleïde que des désastres; et le mensonge, coloré de vues philanthropiques, fut si adroitement déguisé, que ceux qui avaient fait trembler les mahométans éprouvèrent des alarmes jusqu'alors inconnues. Tantôt les agents britanniques, qui feignaient de compatir au

sort des Souliotes, leur communiquaient des lettres dans lesquelles on racontait qu'Odyssée, après avoir livré le pas des Thermopyles, était entré au service de Khourchid pacha, dont il avait reçu les plus fortes garanties et des richesses considérables. Tantôt le congrès des Hellènes, convaincu de son impuissance, avait, disait-on, accepté une amnistie; et son exemple, suivi par les îles d'Hydra, de Spetzia et de Psara, ne pouvait manquer d'amener la soumission de la Hellade entière. On effrayait ainsi, et on conjurait les Souliotes, au nom de l'intérêt qu'inspirait leur valeur, de sauver les débris de leur population en abandonnant leurs montagnes, et en acceptant une capitulation conclue sous les auspices du gouvernement Anglo-ionien, qui leur offrait un asyle dans les Sept-Iles.

Ébranlés par les récits qu'ils entendaient, les Souliotes demandèrent des saufs-conduits pour que quatre de leurs commissaires pussent se rendre à Prévésa, auprès du consul d'Angleterre, où ils arrivèrent en même temps à peu près que la flotte ottomane, qui, ayant touché à Zante, laissait tomber l'ancre sur la rade de Patras. On ne manqua pas de leur raconter qu'elle portait quarante mille hommes de troupes de débarquement, d'exagérer tout ce qu'on leur avait dit de l'invasion de la Morée par Dramali, et de leur assurer que la marine grecque avait accepté l'amnistie que le sultan avait daigné lui accorder. Vainement ils auraient voulu vérifier ces faits; tout ce qui les entourait était intéressé à les tromper. On les traitait, non comme

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