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cession qu'il avait été obligé de faire de la Norwège à la Suède. La ville de Hambourg lui convenait aussi; mais les comptoirs de cette ville marchande ne s'en souciaient point, et l'intérêt de l'Angleterre était de maintenir sa neutralité. Les plénipotentiaires des princes médiats multipliaient les notes diplomatiques pour le rétablissement de leurs priviléges, et faisaient d'itératives instances près de l'empereur d'Autriche pour le décider à ressaisir son ancien titre d'empereur d'Allemagne; mais ce prince aimait mieux acquérir des provinces, qu'un titre qui pouvait devenir matière à chicane avec les rois de la confédération germanique.

Le 22 février, l'Autriche revient à sa négociation avec la Bavière et sur l'incorporation de Salzbourg, en offrant une compensation de quelques districts qui appartiennent au roi de Wurtemberg, qui n'a aucun intérêt à cette dislocation, et qui n'est point séduit par l'offre qui lui est faite de 231,000 têtes sur la rive gauche du Rhin. On avait calculé que sur cette rive du Rhin il y avait 331,000 têtes de disponibles. Le grand-duc de Hesse avait à revendiquer 100,000 têtes sur cette même rive. Le pillage de cette rive gauche du Rhin donna lieu à une note énergique du ministre d'Angleterre.

Au milieu de cette complication d'intérêts et de prétentions apparaît le cours des fleuves: l'Elbe, la Vistule, le Danube et l'Oder, ont leurs repré

sentans au congrès, et l'on décide que l'on obtiendra du Grand-Turc qu'il ne gênera point le commerce du Danube jusqu'à son embouchure dans la mer Noire.

Il avait été convenu que les puissances réunies au congrès seraient dispensées de se faire les présens d'usage. Le grand nombre des employés à l'œuvre diplomatique aurait en effet exigé des cargaisons de tabatières, de bagues, de portraits, de décorations, etc., etc. Plusieurs souverains, voulant toutefois laisser un souvenir de cette brillante époque, firent frapper chez eux de grandes médailles en bronze et en argent. La plus remarquable, sans contredit, fut celle de l'Angleterre, qui fut distribuée par lord Castlereagh. Cette médaille en cuivre doré est celle que j'ai fait graver et qui se trouve placée en tête du IVe volume; d'un côté, c'est l'effigie du prince régent couronné de lauriers, etc; le revers mérite un peu plus d'attention. Il présente, sans ménagement, l'Europe affaiblie et désolée, aux pieds de l'Angleterre figurée sous l'emblême d'une Minerve armée, et couronnée par une Victoire. Son bras protecteur soutient et relève l'Europe: l'effigie du prince régent, le bouclier de Minerve qui est celui de l'Angleterre, et plus que tout les mots qu'on lit à l'entour, ne laissent aucun doute sur l'interprétation que l'on doit faire de cette

orgueilleuse et singulière allégorie: se ipsam constantiâ, Europam exemplo; ce qui veut dire, sans aucune ambiguïté, que l'Angleterre s'est conservée par sa constance, et qu'elle a sauvé l'Europe par son exemple. Pour épargner aux numismates des recherches trop longues, le mot Europa est gravé dans l'un des plis du manteau de la personne prosternée. Cette superfétation d'un succès acheté au poids de l'or et des subsides, donna lieu de rappeler l'ivresse et le délire auxquels toute la population de la Grande-Bretagne fut livrée à l'époque de la signature du traité d'Amiens alors elle avait salué avec des acclamations unanimes la nouvelle ère de prospérité qui s'offrait à l'Europe. Toute la nation avait témoigné sa joie par des fêtes et par des illuminations brillantes: sur la place du Ranelagh à Londres, on avait admiré un magnifique transparent dans lequel étaient peints le roi Georges III et Napoléon Bonaparte, premier consul de la république Française, se donnant la main au-dessus d'un autel dédié à la Paix, et se jurant foi et amitié éternelle, suivant l'usage. Cette médaille rapelait encore les diverses négociations et les relations officielles dans lesquelles le cabinet de Saint-James avait laissé fléchir sa constance et les exemples qu'elle disait avoir donnés à l'Europe... etc. C'était véritablement se moquer du monde que de faire de cette constance factice l'objet d'un présent aux ministres des souverains de l'Europe sup

pliante aux genoux de l'Angleterre. La véritable légende qu'il aurait fallu graver était celle-ci: se ipsam, perfidia. - Europa auro. — (Vel cere.)

Cette économie de munificence de la part des souverains ne fut point une loi pour l'impératrice Marie-Louise : lorsque l'acte du congrès qui lui confirmait la possession des duchés de Parme fut signé, je fus chargé de remettre en son nom plusieurs tabatières ornées de son portrait et enrichies de diamans: un seul ministre, et j'aime à le nommer, M. le baron de Wessemberg, eut l'extrême délicatesse de refuser cette marque de la reconnaissance de la part de Marie-Louise, dont il avait fait toujours valoir les droits et la position avec le zèle et le courage le plus honorables, soit dans les conférences du congrès, soit dans les conseils du souverain de l'Autriche. M. le baron de Wessemberg connaissait très-bien le modeste budget de l'auguste princesse.

La république de Raguse veut redevenir indépendante par la protection du sultan... Elle est rangée dans les possessions de l'Autriche.

On fait en même temps de nouvelles propositions au grand-duc de Bade, et l'on fait monter jusqu'à cent soixante-seize mille les cinquante mille têtes qui lui avaient été précédemment offertes pour la portion qui convenait à l'Autriche.

Quant à l'électeur de Hesse-Cassel, il n'avait pas laissé ignorer qu'il consentait avec plaisir à

dans le do

l'incorporation de toute la Saxe maine du roi de Prusse, parce que, disait-il avec franchise, il préférait l'alliance de la Russie et de la Prusse à tous les arrangemens de la confédération germanique.

Les ministres du roi de Sicile redemandaient le trône de Naples pour le roi Ferdinand; mais Joachim avait reçu les plus belles assurances. Au commencement de 1814, la coalition, à qui tous les moyens convenaient, avait alors réussi à détacher ce prince de la seule alliance qui pouvait le maintenir sur le trône. C'était en vain que ses ambassadeurs voulaient se prévaloir des traités qui avaient été signés avec lui. Les voies diplomatiques étaient engorgées : la haute jurisprudence du congrès éludait sa reconnaissance avec d'autant moins d'embarras qu'on n'avait plus besoin de lui, et qu'on ne cherchait qu'un prétexte pour le renverser. Plus tard ce prince, le plus brave sur le champ de bataille, mais le moins propre aux détours embrouillés de la politique, voulut en appeler à son épée. L'univers a connu sa destinée! il sut mourir!!

Du reste, dans ces derniers momens du congrès, la ville de Wetzlar réclamait sa chambre ardente et son tribunal germanique; la Saxe protestait contre le partage de ses états; Gênes renouvelait ses protestations; le grand-duc de Francfort protestait contre l'absorption de son territoire; toutes les villes anséatiques, au nombre

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