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l'opinion publique. Quoiqu'attaché à la
famille de Lothaire, auquel il devoit
son archevêché, le prélat, qui venoit
de couronner Hugues Capet, répondit
à Charles ces paroles tirées d'une de
ces lettres: Rappelez-vous ce que je
vous ai dit, quand vous m'avez con-
sulté ; c'étoit alors qu'il falloit gagner
la faveur des grands du royaume :
car pouvois.je seul vous faire roi?
C'est ici une affaire publique, et qui
ne dépend pas d'un particulier. Vous
m'accusez d'être ennemi du sang royal.
J'atteste mon Rédempteur que je ne
vous hais
pas. Vous me demandez ce
que vous devez faire, je ne le sais
pas, et quand je le saurois, je n'o-
serois vous le dire.

987.

988.

L'affaire étoit décidée: Hugues Ca- Sacre de pet avoit pris les devants, non-seule- Robert. ment pour lui-même; mais il se hâta encore de prendre la même précaution pour Robert, son fils, âgé de quinze ans. Six mois après avoir été reconnu roi, il obtint des prélats et seigneurs assemblés à Orléans, que ce jeune prince lui seroit associé, et il le fit couronner dans cette ville.

que

On ne peut guère douter la for- Formule mule employée alors n'ait été celle qui du sacre. s'est perpétuée jusqu'à nos jours. Si

988.

988-90.

elle ne marque pas une élection formelle, elle exprime du moins un consentement, d'où paroissoit découler le droit du prince et sa puissance sur les sujets qui se soumettoient volontairement à son autorité. L'archevêque le présentoit aux grands et au peuple réunis dans l'église, et leur disoit : « Le voulez-vous pour votre roi »? Vultis hunc regem? L'assemblée répondoit par acclamation: « Nous le << voulons, il nous plaît, qu'il soit << notre roi »! Laudamus, volumus, fiat.

Il étoit difficile qu'une autorité si dépendante dans son principe, fut d'abord bien réglée; aussi se passa-t-il beaucoup de temps avant que les rois de la troisième race obtinssent de leurs vassaux une entière obéissance. Dès le règne de Hugues (apet, un Audibert, vicomte de Périgord, donna l'exemple de la résistance. Il faisoit le siège de Tours contre la volonté des deux rois, le père et le fils: dans les lettres qu'ils lui écrivirent pour l'engager à le lever, ils se permirent un reproche qui le taxoit d'ingratitude. Qui vous a fait comte? lui disoient-ils. Et vous, leur répondit fièrement Audibert; qui vous a fait rois?

.991.

Le prince Charles auroit pu profiter de ce penchant à l'insubordination, si clairement exprimé; profiter des fac- prince Char

tions qui ne manquent jamais dans les les.
changemens de règne ou d'adminis-
tration. Outre plusieurs seigneurs très-
puissans, attachés à la famille de Char-
lemagne, par habitude et par recon-
noissance, il y en avoit même qui
descendoient de ce prince en lignes
collatérales masculine et féminine,
tous beaucoup plus portés pour un re-
jeton de cet empereur, que pour un
petit-fils de Robert-le-Fort, que quel-
ques-uns avoient vu leur égal. Par ces
motifs le duc d'Aquitaine prit les armes
en faveur de Charles. Ce prince ne
seconda son partisan, ni assez vîte, ni
assez puissamment, et laissa à son rival
le temps de forcer le duc à se sou-

mettre.

Mort du

Après bien des délais, Charles entra 991-95. lui-même en France avec une armée d'Allemands qu'on connoissoit sous le nom Lorrains. Il prit Laon, qui étoit alors une forteresse importante, s'empara même de la ville de Reims, mais ne put déterminer l'archevêque, inquiet pour lui-même des conséquences, à le sacrer. Il livra bataille à Hugues, remporta une grande victoire, et lors

991-95. qu'il ne lui falloit peut-être plus qu'un pen d'activité pour se placer sur le trône, héritier de la mollesse des derniers rois ses ancêtres, il resta dan's Laon, pour y consommer dans le repos les fruits de ses pillages. Il y fut attaqué à son tour, fait prisonnier par la trahison de l'évêque Ascelin, et renfermé, sous bonne garde, dans unc tour d'Orléans. L'opinion la plus probable est qu'il y vécut assez pour qu'il lui naquît deux fils qui moururent presqu'en naissant. Avant sa prison, il en avoit eu un, nommé Othon. Ce dernier rejeton direct de Charlemagne régna après son père dans son duché. de basse Lorraine ou de Brabant, ne marqua aucune prétention sur la France, et mourut sans laisser de pos

Mort de

pet.

996.

térité.

La mort de Charles assura le sceptre Hugues Ca- dans la main de Hugues Capet. Il gouverna avec une grande prudence. Environné de grands seigneurs, jaloux les uns des autres, quelquefois il se rendoit arbitre entre eux, gagnoit leur estime et leur amitié par de sages décisions, et concilioit à la dignité royale une considération que le ton impérieux ne lui auroit pas acquise. Quelquefois aussi, sans se mêler de leurs que

relles, il les laissoit se battre entre eux. Ils s'affoiblissoient ainsi, et l'autorité royale se renforçoit à proportion. Hugues Capet étoit politique habituellement, et vaillant dans l'occasion. Il régna neuf ans, mourut âgé de cinquante-cinq, et laissa son royaume aussi tranquille que si sa famille eût gouverné pendant une longue suite d'années. Il fixa son séjour à Paris, que les rois de la seconde race avoient négligé, et fut enterré dans l'église de St. Denys, qui devint, par préférence, le lieu de la sépulture de nos rois.

ROBERT,

ágé d'environ vingt-six ans..

995.

Robert,

mariage de

Robert, âgé de vingt-six ans, succéda à Hugues son père. Son règne, 38€ roi de quoique long, paroît, faute de mé-France. moires suffisans, un des plus stériles Premier en événemens. Entre ceux qui peuvent Robert, fixer l'attention, s'offre le spectacle 996–99. d'un roi saint, ou du moins reconnu pour tel dans les légendes, et ce saint excommunié. Il avoit épousé Berthe, fille de Conrad, roi des deux Bour

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