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et souffrir que ses principales villes fussent démantelées. Pour sûreté de ces conditions, Blanche exigea que la jeune comtesse seroit amenée à la Cour de France, afin d'y être élevée sous scs yeux; et cet otage n'empêcha pas le comte de se rendre et de rester prisonnier dans la tour du Louvre jusqu'à l'entier accomplissement de la partie du traité qui concernoit les restitutions et autres clauses onéreuses. Il ne faut pas oublier que, comme fauteur des hérétiques Albigeois, et hérétique lui-même, il fut condamné aux cérémonies humiliantes de la pénitence publique, et qu'il la subit ainsi qu'avoit fait son père.

1227-29.

Thibault

et les autres

Ce dur traitement avertissoit les Conduite de conjurés de ce qu'ils avoient à craindre, la reine avec Ils prirent des mesures, qu'ils crurent comte de mieux concertées que les premières, et Chainpagne, se donnèrent un chef qui fut Engué- confédérés. rand de Couci. On dit même qu'ils avoient dessein de le faire roi. Les plus considérables d'entre eux, étoient Philippe, comte de Boulogne, oncle du jeune roi, déjà évincé de la régence et Thibault, comte de Champagne. La reine n'eut besoin contre ces deux confédérés, que d'adresse. Elle détacha d'eux Philippe, en lui remontrant

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qu'il n'avoit rien à gagner, puisqu'ils 1227-29. venoient de mettre à leur tête le sire de Couci; qu'il seroit par conséquent bien impolitique à lui de travailler contre son neveu pour les autres,

Sa politique.

sans es

pérance d'avantages pour lui-même. Quant à Thibault, il avoit toujours ressenti pour Blanche une passion dont il ne se cachoit pas. On a encore de lui, en son honneur, des vers aussi tendres que galans. La reine s'en amusoit du vivant de son mari, et lui marquoit quelques égards, dont il se contentoit alors; mais voyant qu'il n'obtenoit pas plus de la veuve que de l'épouse, on croit que ce fut le dépit d'un amour mal reconnu, qui le jeta dans le parti des mécontens. Foible ennemi pour Blanche! Une lettre gracieuse le ramena à ses pieds. Non-seulement il abandonna ses amis, mais il révéla leurs secrets à la dame de ses pensées, comme s'exprimoient alors les chevaliers. Elle en gagna encore d'autres par présens ou par promesses.

Elle négocia d'ailleurs les armes à la main, et tira de la tour du Louvre, lui donner le commandement de pour ses armées, ce Ferrand donné en spectacle aux Parisiens après la bataille de Bouvines. Ferrand, brave soldat, et

capitaine expérimenté, justifia la con-
fiance de sa libératrice. La régente avoit
reconnu par expérience la nécessité de
ces mesures de sûreté. Peu auparavant,'
le roi avoit pensé être enlevé, se ren-
dant à Vendôme où les mécontens
étoient convoqués pour lui exposer leurs
griefs. Ils lui avoient tendu une embus-
cade sur le chemin. Blanche en fut
avertie par le comte de Champagne qui,
pour l'amour d'elle, trahissoit son parti.
Elle n'eut que le temps de se
le temps de se jeter avec
son fils dans Mont-l'Héri et de faire sa-
voir aux Parisiens le danger que cou-
roit le roi. A cette nouvelle ils sortirent en
foule voler à son secours et le rame-

pour

pour

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1227-29.

Secondée

rage de son

nèrent en triomphe dans leurs murs. La guerre alors changea de face: on prit d'autres prétextes. Les révoltés pu- par le cou. blièrent qu'ils s'étoient armés non fils Louis IX. pour attaquer le roi, mais forcer Thibault à rendre à Alix, reine de Chypre, le comté de Champagne, qu'ils prétendoient usurpé sur elle. Elle étoit née dans l'Orient de Henri II, comte de Champagne et roi de Jérusalem, frère aîné de Thibault III, père de Thibault, et par conséquent le comté, après la mort de son père, devoit lui appartenir; mais elle avoit été évincée, en vertu de la loi salique. La querelle que les mécontens Tom. III.

K

firent au comte au sujet de sa parente, n'é1227➡ 29, toit qu'un moyen imaginé pour punir avec

Le comte Thibault cè

exige.

une espèce de justice leur infidèle confident. La régente prit sa défense et envoya son fils faire contre eux ses premières armes. Il leur présenta bataille. Ils la refusèrent par respect, dirent-ils pour leur souverain; et cette déférence amena des négociations.

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On donna à Louis, quoiqu'il n'eût de tout ce que que quinze ans, l'honneur d'avoir disla régente cuté lui-même les droits réciproques; mais s'il prit connoissance de l'affaire ee fut, sans doute, sous l'inspection de sa mère. Il paroît qu'elle songea davantage aux intérêts de son fils, qu'à ceux de l'amoureux Thibault. Il fut confirmé dans son comté, mais condamné à assurer une rente de deux mille livres à sa consine, et à lui en donner quarante mille comptant, pour les frais de son voyage d'Asie en Europe. Quarante mille livres comptant! et il n'avoit point d'argent. On ne trouvera certainement pas une grande correspondance de tendres sentimens dans la manière dont Blanche le tira d'embarras. Il possédoit les comtés de Blois, de Sancerre, de Chartres et de Châteaudun: elle offrit de les acheter et de lui en compter le prix qui serviroit à le

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libérer envers Alix. Il hésitoit, la régente le pressa. Enfin, dit Mézerai, ce pauvre prince rendit derechef les armes à l'amour et après un grand soupir, Madame, lui dit-il, mon coeur, mon corps, et toutes mes forces sont à votre commandement. Après ce sacrifice il se retira tout pensif, emportant dans son cœur, pour tant de belles terres dont il s'étoit dépouillé, le souvenir de sa dame, qui se changeoit en tristesse, quand il venoit à penser qu'elle étoit si honnête et si vertueuse qu'il n'en auroit jamais que des rigueurs.

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1227-29.

tés se sou

La ligue n'étoit pas toute dissipée. Les révolElle avoit encore en Bretagne un con- mettent, å fédéré, d'autant plus dangereux, que le duc de du Henri III, roi d'Angleterre, l'appuyoit. Bretagne. Le duc, nommé Pierre Mauclerc, 1230–33. arrière-petit-fils de Louis-le- Gros loin de se soumettre, ce qui lui auroit obtenu, comme à beaucoup d'autres, une paix supportable, appela à son secours le roi d'Angleterre. Le monarque vint, débarqua une armée; mais au lieu de la mettre aussitôt en action il se renferma dans la ville de Nantes, où il passa l'hiver en fêtes et en plaisirs. Pendant ce temps Louis tenoit la campagne. Sa mère l'accompagnoit. Il y eut un hiver très-rigoureux. Blanche

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