Images de page
PDF
ePub

Roi, marquées dans une de fes Lettres au Maréchal de Tallard du 21 de ce mois, que vous m'avez adreffée, & qui m'a été rendue aujourd'hui, par Mr. le Maréchal de Villeroy, comme je viens d'a voir l'honneur de vous le dire.

Notre Marche jufques ici, s'eft paffée auffi heureusement que je le pouvois de firer, & elle n'eft plus déformais dou teufe.

a.

Je fais partir dès demain tout ce qui refte de l'Armée de Mr. le Maréchal de Tallard, c'eft à dire toute fa Cavalerie, & les débris de fon Infanterie, consistant en 3 Bataillons reftés en Garnifon à Ausbourg, qui nous ont rejoint, & en 3000 hommes ou environ ramaffés des débris des Bataillons faits Prifonniers de Guer. re, comme vous en avez été informé, vec les Officiers- Généraux de l'Etat-Major, les Equipages d'Artillerie & des Vivres de la dite Armée, auxquels je joints auffi les bleffés qui ont été en état de fuivre jufqu'à préfent, tous nos gros Ba gages, notre Artillerie & nos Caiffons; afin que tout cet Attirail qui eft le plus incommode, pour paffer les Montagnes, y puiffe entrer le premier dès après demain, auquel jour notre Armée marchera d'ici pour s'en approcher, & faire

[ocr errors]

l'Arriere-garde: c'eft ce que Mr. le Maréchal de Villeroy qui eft venu ici aujourd'hui, voir Mr. l'Electeur, a trouvé à propos.

L'Armée de Mr. le Maréchal de Tallard étant préfentement fous fes ordres; je ne doute pas qu'au fortir des Montagnes, vous ne lui faffiez favoir les intentions du Roi fur ce fujet, fur lequel je dois avoir l'honneur de vous dire qu'il n'y a pas un moment à perdre, pour tâcher à réparer en quelque maniere cette Infanterie, par le moyen de ces débris qui reftent, dont on peut tirer encore quelque parti.

Pour cet effet, comme il y a plufieurs Officiers furnuméraires, dans les Régimens d'Infanterie de l'Armée que j'ai l'honneur de commander, de ceux que vous nous envoyâtes le Printems dernier, avec les Recrues, lefquels pourront fe former & devenir bons dans la fuite, j'ai fait avertir ce foir tous les Officiers de cette efpece, que ceux qui voudroient fe mettre à la fuite de ces ref-. tes de Bataillons, de l'Armée de Mr. le Maréchal de Tallard, le pourroient faire, & que l'on continueroit de leur y donner la même subsistance, dont ils ont joui, depuis qu'ils font arrivés en ce Pays-ci...

C'eft un foulagement pour le Roi, ce-la le déchargeant de l'entretien de plufreurs Officiers furnuméraires, dans les Régimens où il s'y en trouve de trop, pour les placer dans des Corps où il en

manque.

Mr. l'Electeur eft toujours dans l'efpérance que quelques Efcadrons de fes Troupes de Cavalerie & de Dragons, le pourront joindre, & effectivement ce ne feroit pas un renfort à négliger, parce qu'ils font très bons.

La Marche que nous allons faire entre ci & l'entrée des Montagnes, faifant l'Arriere-garde de tout, lui levera tous les fcrupules qui lui pourroient refter fur ce fujet, tous ces petits féjours néceffaires pour le Paffage des Troupes, qui ne peuvent enfourner toutes en même tems les Montagnes, étant plus que fuffifans pour donner le tems à fes Troupes de joindre, pour peu qu'elles en ayent envie.

Pour moi je vous dirai naturellement que je le defire plus que je ne l'efpere, non pas par fa faute: car fes intentions font très bonnes; mais fes Troupes é toient trop éparpillées, pour fe joindre aifément, & il eft très mal fervi.

P. S. à minuit le dit jour 25 Août.

Dans ce moment un Exprès que j'avois dépêché de Wibling près d'Ulm, le 16 de ce mois, eft venu me retrouver, en me difant que les Chenapens l'ayant arrêté & gardé plufieurs jours, il avoit été obligé de jetter fon paquet ci joint, que j'avois adreffé à Mr. Groubbe à Schaffoufe, & enfuite à Mr. Foulon à Huningue, pour vous le faire paffer en toute diligence; mais qu'au moyen d'un petit Parti, fije voulois lui en donner un, il le retrouve. roit: je le lui ai accordé, & dans cet inftant il me le rapporte: ce qui m'empêche de joindre à cette Lettre un fixieme Duplicata que je voulois vous envoyer, Monfieur, de ma Lettre du 15 pour vous informer en gros de ce qui s'étoit paffé le 13. Dans le déplorable fuccès de cette malheureuse journée, ce me feroit une confolation, fi j'en étois capable après la perte que le Roi vient de faire, de penfer que je lui ramene l'Armée, qu'il m'avoit fait l'honneur de me confier, toute entierement l'ayant vu s'acquitter de fon devoir, depuis les Offi ciers-Généraux jufqu'au dernier fubalter

ne & au dernier Soldat, & avec plus de valeur que je ne puis vous le repréfenter.

Mr. le Maréchal de Villeroy ayant réfolu de faire partir fon Courier demain. de très bonne heure, il ne me reste plus pour en profiter, que le loifir de vous renouveller le profond refpect avec le quel j'ai l'honneur d'être, &c.

J'omettois de vous dire, Monfieur, que l'Electeur a été charmé de la dite Lettre du Roi, à un point que je ne puis vous l'exprimer, & avec bien de la rai fon: car elle eft très digne de la grandeur & de la bonté de S. M. dont S. A. E. ira attendre les ordres à Strasbourg, après le paffage des Montagnes, pour fe tranf porter de là où Elle le trouvera le plus propos.

Mr. de LAUBANIE à Mr. de CHAMILLART, à Landaw, le 22 Août 1704.

Il est très difficile de demêler le vrai d'avec le faux, parmi toutes les différen tes Rélations, qui nous viennent de chez les Ennemis, tant parce qu'ils fuppofent

« PrécédentContinuer »