Le pape Paul III. qui connoiffoit fon mérite, & perfuadé qu'un fi excellent fujet feroit beaucoup A N. 15.42. d'honneur au facré college, le nomma cardinal en 1535. fans qu'il eut en aucune maniere recherché cette dignité; la nouvelle en vint à Venise, & Contarin en fut furpris le premier ; il en reçut les complimens beaucoup moins joïeux que tous ceux qui vinrent l'en feliciter. Il vint donc à Rome, & après la céremonie de fon installation, le pape le garda auprès de lui, & l'envoïa enfuite legat en Allemagne en 1541. d'où il fut rappellé, parce que la cour de Rome ne paroiffoit pas contente de fes négociations; on l'accusa d'avoir trop accordé aux Proteftans, & de ne leur avoir pas affez fortement réfifté. Comme plufieurs parloient contre lui, quoiqu'il fut abfent, le cardinal Fregofe prit fa défenfe, & emploïa fes foins pour le juftifier. Mais fes ennemis ne laifferent pas de le calomnier, & de l'accuser publiquement d'être dans les interêts des Lutheriens ; ceux qui l'épargnoient davantage, difoient que faute de rigueur & de fermeté, il avoit mis l'autorité du pape en danger. Contarin revint à Rome, & rendit fi bon compte de fa légation, que , que fa fainteté quoique prévenue contre lui, en parut très-contente, & l'envoïa légat à Boulogne, où il mourut le premier de Septembre à l'heure de midi, âgé de cinquante-neuf ans. LIII. Ouvrages du car Contarin compofa plufieurs ouvrages: fçavoir, 1o. De l'immortalité de l'ame contre Pomponace, dina! Contarin. dans lequel il montre par des raifons naturelles, que l'ame eft immortelle contre le fentiment de Dupin ibid. us fucet auteur, qui croïoit qu'on ne pouvoit le dé prà. Ciacon. p. 597. montrer par la raison, & que la foi feule apprenoit AN. 1542. cette verité. 2°. Quatre livres des fept facremens de l'églife. 3°. Deux livres du devoir des évêques. 4°. Des fcholies fur les épitres de faint Paul. 5o. Une fomme des conciles les plus rémarquables. 6o. Une refutation de quelques articles ou queftions de Luther. 7o. Des traitez de la juftification, de la prédeftination & du libre arbitre. 8°. Un traité de la puissance du pape. 9o. Un catechisme, 10°. Une explication du pfeaume Ad te levavi. Sans parler de quelques ouvrages de philofophie, du flux & reflux, contre la quatriéme figure des fillogifmes, que les logiciens appellent figure de Gallien, & un traité des magiltrats & de la republique de Venife. Tous ces ouvrages furent imprimez à Paris en 1571. dans un volume in folio, Ils font très-latins & écrits avec beaucoup de netteté & de politeffe; mais on trouve que l'auteur étoit plus profond philofophe que théologien, Dans fon traité des facremens, il ne fait qu'effleu rer les matiéres. Ses livres du devoir des évêques contiennent des maximes très-utiles. Le fens litteral des épitres de faint Paul est très-bien expliqué dans les scholics, fur les endroits les plus difficiles, La fomme des conciles n'eft qu'un abregé des principaux conciles jufqu'à celui de Florence qu'il appelle le neuviéme acumenique, & c'est une des plus anciennes fommes que nous aïons fous ce titre: Conciliorum magis illuftrium fumma. LIV. Ce cardinal la dédia au pape Paul III. après la De la fomine des mort duquel elle fut imprimée à Florence en 1553. & depuis en plufieurs endroits. Il louë ce pa conciles les plus remarquables, pe d'avoir indiqué le concile à Trente, dont il que lesquels il étoit défendu de se marier au quatrième AN, 1542. degré de confanguinité. Il y a encore un grand nombre de remarques très-judicieufes qui fervent beaucoup à connoître le dogme de l'église, sa morale & sadiscipline ; & l'on peut dire que cette fomme des conciles les plus remarquables, est trèsbonne, quoiqu'elle foit trop abregée. ne Il paroît avoir des fentimens plus particuliers dans son traité de la prédestination. Îl ne feint point d'y déclarer que l'avis de faint Auguftin lui plait pas, & qu'il n'eft pas du fentiment de ceux qui difent que les hommes feront reprouvez à caufe du peché originel. Qu'ils ne le font qu'à caufe des fautes actuelles qu'ils commettent en réfiftant à la grace, & qu'il ne dépend point de l'efficacité de la grace, mais de notre volonté de vaincre cette refiftance. Il ajoûte que cette predestination doit être attribuée à Dieu, qui previent par fa grace tous nos mouvemens, enforte néanmoins que la volonté n'y apporte point de résistance. Il confeille aux prédicateurs qui font obligez de parler de ces matières, de le faire rarement, & avec beaucoup de précaution, & de recourir toujours à la profondeur des jugemens de Dieu. Il répond à l'objection des impies, qui difent, je fuis du nombre des prédestinez, donc je ferai fauvé ou je fuis du nombre des reprouvez, donc je ferai damné quelque chofe que je faffe en leur faifant voir qu'ils pourroient bien dire la même chofe de tous les évenemens de la vic, que Dieu n'a pas moins prévû que le falut ou : la la damnation. Il montre enfuite que la prédestination & la réprobation ne font point des causes néceffaires du falut & de la damnation ; que quoique Dieu ait connu de toute éternité les predeftinez & les reprouvez, cette connoiffance n'ôte point la contingence ni la liberté, & qu'on ne peut douter que, fi l'on vit bien, l'on fera fauvé, & que fi l'on meurt dans le crime, l'on ferá damné; qu'enfin dans l'incertitude de fon falut, il y faut travailler avec confiance. Il condamne à la fin de ce traité le dogme execrable de ceux qui difent, que les pechez des élus font agréables à Dieu, & qu'il a en horreur les bonnes actions des reprouvez. Contarin traduifit auffi le livre des exercices fpirituels de faint Ignace, dont il étoit ami. Dans les traitez de controverfe contre Luther, fa méthode cft d'expofer la doctrine de l'églife, & de faire voir qu'elle eft conforme à l'écriture fainte, & que les novateurs ne l'attaquent que fur de fauffes fuppofitions ou par de mauvaises raifons. Dans fon traité de la puissance du pape, il prouve que le pouvoir que le fouverain pontife a de gouverner le troupeau de Jefus-Christ, a été donné à faint Pierre par Notre-Seigneur, & qu'il eft de droit divin. Son explication du pleaume Ad te levavi, fut composée à la priere d'une fœur qu'il avoit, & qui s'étoit retirée dans un monaftere. Enfin on a de lui quelques lettres. AN. 1542. LVI. Le quatrième cardinal mort dans cette année, eft Denis Laurerio, ou plûtôt Lorerio de Benc- nal Lorerio. vent, d'une famille affez obfcure. Etant entré Tome XXVIII. Iii Ciason. de vits |