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ce fut à cette occafion que ce prince chargea les AN. 1544. docteurs de Louvain de dreffer les articles de doctrine que nous avons rapporté ailleurs, & qui font au nombre de trente-deux. George pour éviter d'éprouver la feverité des édits de l'empereur, fe fauva à Bâle le premier d'Avril 1544. avec quelques-uns de fes compagnons, & y prit le nom de Jean Bruck. Là après s'être inftruit des difpofitions des habitans, & de leur caractere, il fe plaignit de fes malheurs qu'il fouffroit, difoit-il, pour la cause de l'évangile, il prefenta une requête au fenat pour le fupplier d'accorder une retraite dans leur ville à un malheureux persecuté pour Jesus-Christ, & chargé d'une famille affez nombreuse. Le fenat fit droit à fa requête, & lui permit de demeurer à Bâle, où il vécut jufqu'à la mort qui n'arriva qu'en 1556.

LVIII.

Mort de Cle

ment Marot.

San-Marth, lit.

10. elog. doctor.

virorum.

privas biblioth.

Franc. p. 718.

Marot dans le re

cy.

Le Calvinisme perdit dans cette année un de ses appuis par la mort de Clement Marot qui arriva à Turin en Piemont à l'âge d'environ cinquante ans. Il étoit fils de Jean Marot poëte & valet de chamDu Verdier Vau- bre de François I. & nâquit à Cahors dans le QuerIl fut donné environ l'an 1520. à la princeffe Vie de Clement Marguerite fœur du roi François I. & femme du cueil des poètes duc d'Alençon, en qualité de valet de chambre, & l'année fuivante il accompagna le duc d'Alençon, & fut bleffé & fait prifonnier à la journée de Pavie. Pendant que François I.étoit prifonnier en Espagne, le docteur Bouchard l'aïant accufé d'être proteftant, il fut mis en prifon fans que les hiftoriens nous apprennent comment il recouvra fa liberté

François tom. I.

cette premiere fois; peut-être le crut-on innocent, puifque dans une lettre écrite à Bouchard, il affure AN. 1544. qu'il n'eft ni Lutherien, ni Zuinglien, ni Anabaptifte, mais orthodoxe & bon catholique. Cet emprifonnement arriva en 1525.

Deux ans après en 1527. il fut arrêté une feconde fois par un décret de la cour de aydes. Il n'étoit point alors question d'hérefie; on l'accufoit seulement d'avoir fauvé un prifonnier d'entre les mains des archers. Il écrivit de fa prifon à François I. qui étoit de retour d'Espagne. Sa lettre fut fi bien reçûë, que ce prince écrivit lui-même à la cour des aydes pour faire donner la liberté à Clement Marot. La lettre du roi touchant cet élargiffement cft dattée de Paris le premier Novembre 1527. Quckque-temps après aïant été informé à Blois où il étoit, qu'on recommençoit à le rechercher pour la religion, & qu'on avoit fait faifir fes livres, il fe retira chez la ducheffe d'Alençon qui étoit devenuë reine de Navarre par fon mariage avec Jean d'Albret : & ne fe croïant pas encore affez en sûreté auprès de cette princeffe, il paffa en Italie, & s'arrêta à la cour de Renée de France, ducheffe de Ferrare, qui étoit pour lors protectrice de la nouvelle reforme. Il obtint en 1536. de François I. la permif fion de revenir à Paris : mais les foupçons qu'on avoit de fa doctrine parurent fi bien fondez, qu'il fe fauva quelques années après à Geneve,d'où il se retira encore pour aller finir fes jours dans le Piemont. Ce fut pendant fon dernier féjour à Paris qu'il commença à travailler à la traduction des

Xxx iij

Beze in iconibus

Pie-in bist. eccles.

AN. 1544.

LIX.

Traduction en

auteur.

pfeaumes en vers François. Comme il ne fçavoit pas l'hebreu, & qu'il entendoit affez mediocrement le latin, on a dit, qu'il ne travailloit que fur la traduction Françoise des pfeaumes que fes amis lui faifoient, felon quelques-uns Melin de faint Gelais, felon d'autres François de Vatable; & ce dernier eft plus vrai-femblable, parce qu'on fçait qu'il exhorta Marot à mettte les pfeaumes de David en vers Franvers de quelques çois ; & que ce poëte aïant fuivi fon confeil publia pleaumes par cet d'abord la verfion de trente plaumes qu'il dédia à Florimond de Re- François I. Ce prince en fut charmé & parut en defirer la fuite, mais la faculté de théologie cenfura ce qui venoit de paroître, & fe plaignit au roi de la liberté du poëte & des defauts de fon ouvrage. Marot étant allé peu de temps après à Geneve & s'y trouvant en plus grande liberté continua sa version jufqu'à cinquante pleaumes. Theodore de Beze fit la traduction des cent autres ; & l'ouvrage fut reçû également des catholiques & des Lutheriens qui prenoient tous plaifir à les chanter, chacun leur donnant tel air qu'il vouloit, & fur-tout ceux des vaudevilles qui couroient alors.

mend ut fuprà

lav. 8. ch. 16. pag. 1043.

Marot étoit un homme agréable, plaisant, d'une conversation fort enjoüée, & qui avoit reçû de la nature une fi grande facilité à faire des vers, qu'il en compofoit fur toutes fortes de fujets; mais fes poëfies ne font pas chaftes ; pour la plûpart elles.renferment plusieurs obscenitez; ce qu'on ne doit pas moins attribuer à la licence de fon fiecle, qu'à la corruption de fes mœurs. Son caracte Fe est aisé & d'une naïveté prefque inimitable.

peur

L'hérefie commençoit à fe répandre dans les Païs-Bas, & plufieurs y paroiffoient difpofez à embraffer la nouvelle reforme, & l'auroient fait avec joïe s'ils n'avoient été retenus par les édits de l'empereur. Un François nommé Pierre du Breuil miniftre facramentaire, après avoir prêché pendant quelques années à Strasbourg, vint trouver à Tournay en Flandres la fin de fes avantures & de fa vic, Ses erreurs aïant excité contre lui le zele des magistrats, on fit fermer les portes de la ville de qu'il n'échappât; mais les amis voulant le fauver le firent defcendre pendant la nuit avec une corde par la muraille le deuxième de Novembre: il étoit déja à terre, lorfqu'un de fes amis qui étoit encore fur le mur s'étant baiffé pour lui dire adieu, en fit tomber une groffe pierre qui cafsa la cuisse de du Breuil; les cris qu'il fit étant parvenus aux oreilles de ceux qui le cherchoient, furent cause qu'on l'arrêta, & qu'on le conduifit en prifon. Le fenat de Strasbourg aïant appris fa détention s'emploïa beaucoup pour obtenir fa grace, grace, auffibien que les ambaffadeurs des Proteftans qui étoient alors à Wormes; mais toutes ces follicitations vinrent trop tard, il fut brûlé vif à petit feu le dix-neuviéme de Fevrier fans vouloir retracter fes erreurs, qu'il foutint jufqu'au dernier Loupir.

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LXT. Commencement

rindol & de Ca

brieres.

L'execution fut beaucoup plus fanglante à Merindol & Cabrieres, deux bourgs qui fervoient detaire de Mede retraite à quelques reftes de Vaudois, fur les frontieres du comté Venaiffin en Provence. Les sleidan. in comm. habitans avoient toûjours confervé les erreurs dans &feq.

lib. 16. pag. 534

AN. 1545

6. fous Henri II. À

L'an 1550.

86.

Vide fuprà liv.

lefquelles leurs ancêtres étoient nez, & cultivant les montagnes de Provence par un travail proDe Thou. hift.lib. digieux, ils avoient rendu ce païs affez fertil & propre à nourrir du betail. Quand la reformation CXXXVIII. 85.& parut, & qu'ils eurent appris ce qui fe paffoit en Allemagne, ils reprirent courage, ils se reconnurent freres de ceux qu'on appelloit Protestans, & firent venir de leurs docteurs pour les instruire. Ce qui fit qu'ils fe multiplierent beaucoup, & qu'ils firent une profeffion ouverte de l'hérefie qu'ils tenoient de leurs peres, entretenant une grande correfpondance avec les Lutheriens d'Allemagne, qui leur envoïoient de temps en temps de leurs miniftres pour les animer davantage, & pour y prêcher publiquement la nouvelle doctrine. Le parlement de Provence voulant arrêter les defordres, & craignant quelque prochain foulevement de la part de ces heretiques, leur fit donner un ajournement perfonnel, à la requête du procureur general. Barthelemi Chaffanée grand jurifconfulte étoit alors premier prefident; & les accufez aïant refufe de comparoître après trois citations, parce que leurs amis leur avoient confeillé de ne le pas faire, s'ils ne vouloient être brûlez vifs, ils furent condamnez par contumace le dix-huitième de Novembre 1540. & l'on prononça contre eux ce terrible & fanglant arrêt, par lequel tous les habitans de Merindol étoient conDe Thou. hift. damnez au feu, leurs maifons, leurs bois, leurs retraites à être rafées & brûlées, leurs biens & leurs perfonnes confifquez au roi, les arbres de leurs jardins, de leurs vergers & des forêts voisines dé

LXII.

Arrêt contre les habitans de ces

deux bourgs.

us fuprà lib.6.

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racinez,

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