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du roi comme chef de l'églife Anglicane.

Cette démarche de la princeffe Marie, & l'ob- AN. 1536. ftination de Henri à être reconnu chef de l'église, firent perdre au pape Paul III. l'efperance qu'il avoit conçue de faire révoquer tout ce qui avoit été fait en Angleterre au préjudice de fon autorité. Mais il connut bien-tôt que rien n'étoit capable de faire deffaifir ce prince du pouvoir qu'il avoit acquis fur le clergé ; & l'ufurpation qu'il venoit de faire de la plupart des monafteres, le prouvoit affez. En effet, le parlement qui s'affembla le fixiéme de Février de cette année, acheva l'ouvrage commencé, en aboliffant tout ce qui pouvoit avoir quelque rapport à la puiffance du pape, afin de ne pas laiffer le moindre prétexte de reconnoître son autorité. Mais le roi avoit encore un autre but, qui étoit de fe rendre maître des monasteres, & de profiter de leurs biens. Il reprefenta donc au parlement que le grand nombre de couvens dans fon roïaume, étoit à charge à l'état, & le pria fortement de vouloir remedier à ce mal par les moïens qu'on jugeroit les plus convenables. Sur cette remontrance le parlement fit un acte par lequel il fupprima tous les petits monafteres dont le revenu étoit au-deffous de deux cens livres fterling, c'està-dire, huit cens cinquante écus par an. Les rai- 262 fons qu'on allegua pour juftifier cette fuppreffion, furent que comme il y avoit peu de religieux dans la meilleure partie de ces maisons, ils faifoient plus aisément des cabales; que d'ailleurs comme ils étoient pauvres, ils tachoient de s'enrichir par plufieurs voyes illicites ; qu'ils fortoient

LXI.

Suppreffion des

petits couvens en

Angleterre.
Burnet hift. de la

reforme liv.3.pag.

trop fouvent de leurs monafteres, & qu'ils n'y obAN. 1536. fervoient plus la discipline. Par une autre loi qui Act. publ. Angl. fuivit, le parlement donne au roi tous ces couvens

tom. 14. p. 575.

LXII.

Le clergé d'Ar gleterre donne au

Anglois.

au nombre de trois cens foixante & feize avec les
églises, les terres & les biens qui en dépendoient,
& outre cela toutes les maisons qui avoient été fup-
primées depuis un an. La couronne acquit par-là
un revenu de trente deux mille livres sterling, &
plus de cent mille livres de capital en argenterie,
en meubles, en ornemens d'églises & autres cho-
fes. Pour recueillir ces revenus on érigea une nou-
velle cour de juftice, fous le nom de cour des aug-
mentations des revenus du roi, laquelle avoit un
fceau particulier, & devoit être composée d'un
chancelier, d'un tréforier, d'un procureur,
dix auditeurs, de dix-fept réceveurs, d'un fecretai-
re, d'un huiffier, & d'un fergent. Cette cour pou-
voit difpofer absolument au profit du roi de toutes
les terres des couvens fupprimez, hormis de celles
des monafteres que ce prince voudroit conferver:
mais l'on comprit aisément qu'il n'avoit pas def
fein d'en demeurer là, & qu'il tendoit à fe faire
donner les revenus de toutes les abbaïes de fon
roïaume.

de

par

L'affemblée du clergé s'étant tenuë dans le mois d'Avril, on y propofa de donner au peuple la bipeuple la bible en ble en Anglois. Gardiner & tous ceux de fon Burnet. hift. de la ti s'oppoferent à cette propofition, par cette raifon, que l'ufage trop commun de l'écriture avoit donné naiffance à toutes les hérefies, & à toutes les opinions extravagantes, qui d'Allemagne s'étoient introduites en Angleterre, depuis qu'on y

reform. liv. 3. t.

263.

avoit publié la verfion de Tindal; ils ajoûtoient en

core que donner la bible au peuple dans l'état où AN. 1536. on le voïoit, étoit lui tendre une piege très-dangereux; que pour ne le point expofer à ce malheur, & cependant l'inftruire, il falloit lui donner en langue vulgaire un ecourte expofition des dogmes les plus neceffaires & les plus utiles de la foi chrétienne ; & qu'enfin cette courte exposition lui fourniffant tout ce qu'on devoit fçavoir, on le tiendroit toûjours par-là foumis au roi & à l'église pour les matieres de foi. Mais le fentiment de Cranmer l'emporta, & l'on convint qu'on prieroit le roi de commettre à des perfonnes fçavantes le foin de faire une nouvelle verfion de la bible. Ce qui fut executé. On ne fçait pas qui furent ceux à qui cette verfion fut commife.

LXIII. Tenue du parle

la fucceffion.

Dans le même temps le roi caffa le parlement dont les féances avoient commencé fix ans aupara- ment pour regler vant; cependant il fe raffembla le huitiéme de Juin fuivant. Comme ce changement fi fubit pouvoit furprendre, le chancelier dit dans la premiere féance, que quand le roi avoit caffé le parlement le quatorziéme d'Avril précedent, il n'avoit pas compté en affembler fi-tôt un autre : mais que deux raisons l'y engageoient, la premiere que fe fentant Milord Herbert. accablé d'infirmités, & confiderant qu'il étoit mor- bit, regni Henric. tel, il vouloit qu'on reglât la fucceffion pour prevenir les defordres qui arriveroient, s'il mouroit fans enfans mâles : la feconde qu'il defiroit qu'on revoquât une loi faite dans le dernier parlement pour regler la fucceffion en faveur des enfans d'Anne de Boulen. Cependant le chancelier dressa

hift.

VIII.

un projet de loi fur. ce fujet, & ce projet aïant été AN. 1536. goûté, les peines qu'on avoit cûës d'abord à s'accorder, fe diffiperent, & la loi fut faite & acceptée. Elle revoquoit d'abord celle qui avoit été faite en faveur d'Anne de Boulen, & confirmoit les deux fentences de divorce données pour Henri, l'une contre Catherine, l'autre contre Anne. Elle déclaroit auffi illegitimes les enfans de ces deux lits, & les excluoit pour jamais de la fucceffion, confirmant pareillement la condamnation d'Anne de Boulen & de fes complices. Elle affuroit la fucceffion aux enfans mâles ou filles que le roi pourroit avoir de Jeanne ou de toute autre femme qu'il épouferoit dans la fuite; enfin elle accordoit au roi le pouvoir de regler le rang de ceux qui devoient lui fucceder, foit par fon teftament figné de fa propre main, ou par des lettres du grand fceau, & déclaroit traîtres tous ceux qui foutiendroient la validité de fes deux premiers mariages.

LXIV.

Le pape tente

Burnet hift. de la

Le pape qui faifoit alors de nouvelles tentatives de fe raccommo- pour le remettre en poffeffion de fon autorité en der avec le roi. Angleterre, pria vers le même temps Cafali qui reforme tom. 1.1. avoit été ambaffadeur de Henri à Rome, d'écrire à Sander de fchifm. ce prince fur ce fujet, & de lui faire entendre avec Angl. lib.i. p. 162. quelle ardeur il defiroit fe réunir avec lui. Sous

3. p. 288.

le pontificat de mon prédeceffeur, difoit le pape, j'ai été très-favorable à ce prince, il est bon de l'en informer. A l'égard de la fentence d'excommunication que j'ai portée contre lui depuis mon élevation, j'y ai été forcé ; d'ailleurs elle n'eft pas encore publiée, & je lui promets de ne pas aller plus loin. Affurez-le auffi que j'embrafferai volontiers

ce,

Statuts du par

154.

contre

lontiers tous les moïens que l'on jugera les plus propres & les plus convenables pour procurer un bon AN. 1536. accommodement entre lui & le faint fiege. Mais LXV. Henri étoit alors très-éloigné de fonger à faire fa lement paix avec le pape, & pour lui en ôter toute efperan- l'autorité du pape. fon parlement fit deux loix, dont l'une condam Sanderus lib. 1. p. noit à la peine du pramunire, tous ceux qui feroient quelque tentative pour rétablir en Angleterre l'autorité de l'évêque de Rome, & tous les magiftrats qui négligeroient de punir ceux qui auroient la hardieffe de violer ce ftatut: l'autre caffoit & aboliffoit toutes difpenfes, exemptions & privileges émanez de la cour de Rome, fauf à l'archevêque de Cantorberi, à confirmer ce qui ne feroit pas contraire à la loi de Dieu ou à l'honnêteté publique. Ces deux loix furent faites dans le mois de Juillet, l'une le quatorziéme & l'autre le dix-feptiéme, & les féances prirent fin le dix-huitiéme du même mois, après avoir duré fix femaines.

LXVI. Plaintes du cler

contre les réfor mateurs.

Burnet hift. de la reforme tom.liv.

3. p. 291.

Le clergé qui ne vouloit point ceder au parlement, faifoit de fon côté les mêmes efforts pour gé d'Angleterre se rendre agréable au roi , en approuvant toutes fes actions; il confirma la fentence du divorce du roi avec Anne de Boulen ; & peu de jours après la chambre-basse envoïa porter à la haute soixante & fept propofitions qu'elle jugeoit dignes d'être condamnées, & dont la plupart étoient tirées de la doctrine des Lutheriens, d'autres des anciens Lollards & des Anabaptiftes. Et en même temps les députez firent de grandes plaintes contre ceux qui vouloient introduire des nouveautez dans la Tome XXVIII.

L

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