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affligé telle ou telle Province; des fecours que le GouAdminiftration vernement lui a procurés ; des dépenfes de l'Adminiftraintérieure. tion relativement à la fubfistance des troupes, au besoin du Peuple, à l'entretien ou à la conftruction des ouvrages publics, aux bienfaits du Prince on y voit enfin jufqu'aux remontrances que les Tribunaux fupérieurs prennent la liberté de faire au Souverain, ou fur fes décifions, ou fur fa conduite personnelle, quelquefois fur le tout ensemble. Cependant on n'imprime rien dans cette Gazette qui n'ait été préfenté à l'Empereur, ou qui ne vienne de lui. Il y a peine de mort pour quiconque oseroit inférer un article faux dans cette Feuille minitérielle.

Rien n'a force de Loi ni de jugement, fans l'appofition du fceau de l'Empereur: ce fceau eft d'environ huit doigts carrés; il eft d'un jafpe fin, forte de pierre précieufe fort eftimée à la Chine. Le Souverain seul est en droit d'avoir un fceau de cette matiere. Ceux qu'il donne par honneur aux Princes, font d'or; ceux des ViceRois & des Grands Mandarins font d'argent; ceux des Mandarins ou Magistrats d'un ordre inférieur ne peuvent être que de cuivre ou de plomb. La forme en est plus ou moins grande, felon le rang qu'ils tiennent dans l'ordre des Mandarins & dans les Tribunaux. Lorsque le fceau d'un de ces Officiers eft ufé, il doit en avertir le Tribunal fupérieur; alors on lui en fait parvenir un neuf, & l'on exige qu'il rende l'ancien.

L'Empereur munit auffi du fceau Impérial chaque Vifiteur qu'il envoie dans telle ou telle Province. Le devoir de ces Députés eft d'examiner la conduite des Gouver

neurs,

neurs, des Magiftrats & des particuliers. Croit-il devoir citer le Vice Roi à fon Tribunal? Ce Chef, fi redouté, est obligé de s'y rendre. S'agit-il d'un Magiftrat supérieur à d'autres Magistrats? Celui-ci devient prifonnier du Visiteur; & jufqu'à ce qu'il ait prouvé que fa conduite est intacte, il eft, comme on dit parmi nous, suspendu de toutes fonctions: le Vice-Roi, au contraire, exerce toujours les fiennes; mais le rapport du Vifiteur décide, pour l'ordinaire, de leur fort commun; comme l'exiftence de ce Député dépend de la fidélité de fon rapport.

Difons plus; & voici ce qui eft vraiment admirable: c'est que l'Empereur prend quelquefois le parti de remplacer lui-même les Vifiteurs dans quelques Provinces. Kang-hi, un des plus célebres Monarques de la Chine, & qui vivoit au commencement de ce fiecle, donna, dans une pareille circonftance, un exemple mémorable de févérité de juftice. Un jour qu'il s'étoit un peu éloigné de fa fuite, il apperçut un vieillard qui pleuroit amérement. Qu'avez-vous, lui demanda l'Empereur? Seigneur, lui répondit le vieillard fans le connoître, je n'avois qu'un fils; il faifoit toute mon espérance, & pouvoit devenir l'appui de ma famille. Un Mandarin Tartare me l'a enlevé je me vois par-là privé de tout fecours, & n'en efpere aucun; car jamais un homme foible & pauvre comme moi, n'obtiendra justice du Gouverneur contre un homme puiffant. On vous la rendra, lui répondit l'Empereur, toujours fans fe faire connoître; montez en croupe derriere moi, & conduifez-moi à la maison du ravisseur. Le bon homme accepta ; &, après deux heures

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Administration intérieure.

Administration intérieure,

de route,
ils arriverent chez le Mandarin, qui ne
s'attendoit point à cette visite..

La fuite de l'Empereur arriva prefque en même temps que lui; la maison du Mandarin fut bientôt remplie & entourée. Le Mandarin ne put nier la violence dont on l'accufoit, & l'Empereur le condamna à perdre la tête :: ce qui fut sommairement exécuté. Alors, fe retournant vers le vieillard, il lui dit du ton le plus grave & le plus imposant » Je vous donne la charge du coupable qui » vient de mourir; ayez foin de la remplir avec plus de » modération que lui, & profitez de fa faute & de fa » punition, de crainte qu'à votre tour vous ne ferviez » d'exemple aux autres «.

دو

Adminiftration

militaire.

CHAPITRE X II I..

Continuation du précédent. Fonctions des Vice - Rois & des Mandarins répartis dans les Provinces. Adminif

tration militaire.

LE Vice-Roi d'une Province porte le nom de Tsongtou c'est toujours un Mandarin de la premiere claffe; & il jouit, dans fon district, d'un pouvoir prefque illimité. Il parcourt sa Province avec une pompe impériale; jamais, même dans les moindres occafions, il ne fort de fon palais fans être accompagné de cent hommes. Les honneurs qu'on lui rend égalent ceux qu'on rendroit à l'Empereur qu'il repréfente. C'est autour de lui que se

militaire.

verfent les tributs payés par la Province qui lui eft confiée; c'est lui qui les fait transporter dans la capitale de l'Empire, Admi iftration après en avoir retenu ce qui eft d'ufage pour fubvenir aux besoins urgens de fa Province. Tous les procès viennent à fon Tribunal. Il peut condamner à mort un criminel. Mais ni cet Arrêt, ni ceux même de la Tournelle Chinoise ne peuvent être exécutés qu'après avoir été ratifiés par l'Empereur.

Chaque Hien (ou chaque Bailliage) a fon Mandarin. Celui-ci eft chargé d'y administrer la justice, d'arranger les démêlés entre particuliers, ou de févir contre celui qui a tort. Ils reçoivent auffi le tribut que chaque famille doit à l'Empereur.

Le Vice-Roi envoie tous les trois ans à la Cour des notes plus ou moins favorables fur la conduite des Mandarins qui lui font fubordonnés. Elles reglent leur fort: on les conferve, ou on les déplace d'après elles.

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Le Vice-Roi a lui-même fes furveillans. Les Vifiteurs de Province peuvent ufer contre lui des mêmes armes qu'il emploie contre fes inférieurs.

Ceux qu'il a notés défavorablement, sont punis à proportion de leurs torts: on récompense, d'après la même regle, ceux qui ont eu des notes favorables.

Quelques-uns des premiers font caffés de leurs emplois; d'autres font fimplement abaiffés de quelques degrés, & pourvus de quelque emploi inférieur à celui dont on les dépouille. Ils rifquent de n'en obtenir jamais aucun, s'ils font déchus de dix degrés. Une fingularité qui n'existe qu'à la Chine, c'est que le Mandarin réduit à un pofte fubalterne, eft obligé de rappeler à la tête

de fes Ordonnances le nombre de degrés qu'il a perdus. Administration Par exemple, il dira: Moi, un tel Mandarin, abaissé de trois, ou quatre, ou fix degrés (felon le cas où il fe trouve), fait favoir & ordonne, &c.

militaire.

Ces Mandarins inférieurs font fous la dépendance des Vifiteurs de Province d'une maniere très-étroite. Ceux-ci peuvent, de pleine autorité, les deftituer, fi le délit est grave; ils ne confultent la Cour que lorfqu'il n'eft pas urgent de févir.

Jamais, dans un Tribunal de Pe-king, on n'admet en même temps le pere, le fils, le frere, ni l'oncle, ni le petit-fils. Des parens au quatrieme degré ne peuvent fiéger en Province dans un même Tribunal.

La bienveillance du Gouvernement se manifeste comme sa justice envers les Mandarins. On place dans des lieux plus voifins de leur canton originaire, ceux qui ont passé soixante ans; on fait rentrer en charge, le plus tôt poffible, ceux qui ont été forcés d'interrompre leur fervice, ou par une maladie, ou par un deuil, ou pour fe rendre auprès de leurs parens accablés d'âge & d'infirmités. On abrége auffi le temps de leur fervice dans tout endroit où l'air eft mal-fain.

Les Mandarins Tartares peuvent demander un congé, & l'obtiennent, foit pour aller à la rencontre de leur pere ou de leur mere, de leur grand-pere ou de leur grand'mere, qui reviennent malades du fond d'une Province; foit pour aller au devant du cadavre de leur frere, ou pour affifter à fes funérailles. Le temps du deuil eft moins long pour eux que pour les Chinois; il eft restreint à cent jours.

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