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délivré de ses chaînes et de plusieurs dangers. Saint Grégoire finit son discours par cette prière à saint Ephrem ; « O vous qui êtes présentement » aux pieds de l'autel divin, et devant le prince de » vie, où vous adorez, avec les anges, l'auguste » Trinité, souvenez-vous de nous tous, et obtenez»> nous le pardon de nos péchés. »

Les larmes continuelles que versoit saintEphrem, loin de défigurer son visage, sembloient au contraire en augmenter la sérénité et les grâces; en sorte qu'on ne pouvoit le voir sans être pénétré de vénération. Les Grecs le peignent sous la figure d'un vieillard d'une haute taille, ayant un air doux et majestueux, les yeux baignés de larmes, un regard et un extérieur qui annoncent une grande sainteté.

Adam, comme le remarque saint Augustin, prioit sans soupirer dans le paradis terrestre ; mais présentement les soupirs et la componction doivent faire le principal mérite de notre prière. La charité, dit saint Grégoire-le-Grand (24), notre éloignement de Dieu, nos fautes passées, celles que nous commettons chaque jour, le poids de nos misères et de celles du prochain, nous excitent à pleurer continuellement au moins dans le désir du cœur, si nous ne pouvons pas toujours le faire des yeux. Tout ce qui nous environne nous fournit un sujet de larmes, et nous devons les mêler même à nos chants de louanges et d'amour. En effet, pouvons-nous produire un acte de charité, sans être pénétrés d'une douleur amère à la vue de l'ingratitude dont nous avons payé les bienfaits du Seigneur ? Pouvons-nous sans trembler entreprendre de chanter les louanges de Dieu, et même prononcer son nom, nous dont (24) Moral. 1. 23, c. 21.

les affections sont si corrompues, et dont la langue a été si souvent souillée par le péché ? Ne faut-il pas, avant de nous présenter devant lui, laver nos ames par les larmes de la componction, et les purifier par l'hysope, trempée non dans le sang des boucs, mais dans le sang de l'agneau sans tache qui est mort pour le salut des hommes ? Les plus grands Saints pleurent continuellement par des motifs d'amour; eh! comment les pécheurs ne pleureroient-ils pas? La voix de la tourterelle s'est fait entendre dans notre terre (25). Si les ames fidelles et innocentes, figurées par la tourterelle, aiment à faire retentir les déserts de leurs gémissemens, quelle conduite tiendront celles dont tous les instans ont été marqués par de nouvelles infidélités ? Un pécheur pénitent, au lieu de gémir comme la tourterelle, doit, à l'exemple de l'autruche, pousser des cris perçans et verser des torrens de larmes, pour soulager son cœur brisé de componction d'avoir offensé un Dieu si digne d'être

aimé.

S.te ÉVÉRILDE, Vierge en Angleterre.

KINEGILS, roi des Saxons occidentaux, ayant été baptisé, en 635, par saint Bertin, Evérilde eut le bonheur de parvenir à la connoissance de Jésus-Christ. Le désir de se consacrer plus parfaitement au service de Dieu, la porta à s'enfuir secrètement de la maison paternelle pour aller chercher quelque monastère. Etant en route, elle fut jointe par deux autres vierges, nommées l'une Bège, et l'autre Wuldrède. Saint Wilfrid lui assigna un lieu appelé la demeure de l'évêque, mais qui prit ensuite le nom d'Evéridis

(25) Cant. II, 12.

ham ou de demeure d'Evérilde (a). La Sainte forma plusieurs personnes de son sexe à la perfection, et ne cessa de leur donner l'exemple des plus sublimes vertus jusqu'à sa mort, qui arriva le 9 de Juillet. C'est sous ce jour que Sollier, un des continuateurs de Bollandus, a trouvé son nom dans un ancien manuscrit du martyrologe d'Usuard. Alford envoya au P. Bollandus une copie des leçons de son office, qui anciennement se lisoient dans quelques églises. Sainte Evérilde n'est nommée dans aucun des calendriers d'Angleterre ou d'Irlande qui sont parvenus jusqu'à nous, et Alford n'a point fait mention d'elle dans ses annales.

Voyez Sollier, t. II, Julii, p. 713.

LES SS. MARTYRS DE GORCUM, EN HOLLANDE.

CEs saints martyrs, au nombre de dix-neuf, étoient tous religieux ou prêtres séculiers. Après avoir souffert plusieurs mauvais traitemens de la part des calvinistes qui les avoient arrêtés à Gorcum, ils furent pendus à Bril, en haine de la religion catholique, le 9 Juillet 1572. Il y avoit parmi eux onze Récollets, du nombre desquels étoient Nicolas Pic, gardien de Gorcum, et Jérôme de Werden, vicaire du même couvent.

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Le premier étoit un homme de trente-huit ans, célèbre par le fruit de ses prédications, et universellement respecté par son exactitude à vivre d'une manière conforme à l'esprit de sa règle. On admiroit sur-tout en lui l'amour de la pauvreté et de la mortification. Il craignoit successivement la superfluité en toutes choses et

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(a) Alford et Sollier n'ont pu découvrir la situation de ce lieu.

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principalement dans la nourriture. <«< Je crains » disoit-il souvent, que si saint François revenoit » sur la terre, il n'approuvât pas telle ou telle » chose. » Il tâchoit d'entretenir le même esprit parmi ses frères, et sa maxime étoit que l'amour du superflu perdoit l'état religieux. Une sainte gaieté qui ne se démentoit jamais, rendoit aimables aux autres la piété et la pénitence. On l'entendoit souvent répéter que nous devons servir Dieu avec joie. Toujours il avoit témoigné un désir ardent de donner sa vie pour Jésus-Christ, quoiqu'en même temps il se jugeât indigne d'un tel honneur.

Les autres martyrs étoient un dominicain, deux prémontrés, un chanoine régulier de saint Augustin, nommé Jean Oosterwican (a), et trois

(a) Jean Oosterwican étoit directeur d'un couvent de religieuses de son ordre à Gorcum. Il étoit alors fort âgé, et avoit souvent demandé à Dieu la grâce du martyre.

Nous allons marquer de suite les noms de tous ces Saints. Les Récollets étoient Nicolas Pic, Jérôme de Werden, ainsi appelé d'une petite ville de ce nom, qui étoit dans le pays de Horn; Thierri d'Embden, natif d'Amorfort; Nicaise Johnson, du village de Hèze; Wilhade, né en Danemarck; Godefroi de Merveille; Antoine de Werden; Antoine de Hornaire, né au village de ce nom, près de Gorcum; François Rodes, né à Bruxelles; Pierre d'Asca, né au village de ce nom en Brabant, et Corneille de Dorestate, village du territoire d'Utrecht, et qui présentement se nomme Wick. Les deux derniers étoient frères convers.

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Les trois curés étoient Léonard Wéchel, Nicolas Poppel et Godefroi Dunen, né à Gorcum. Ce dernier, après avoir été recteur de l'université de Paris, où il avoit étudié et enseigné, devint curé en Hollande, près des territoires de la France; il résigna sa cure depuis, et alla vivre dans sa patrie.

Les noms des autres étoient Jean Oosterwican, chanoine régulier; Jean, religieux dominicain de la province de Cologne et curé d'Hornaire; Adrien de Hilvarenbeck, prémon. tré, de Middelbourg, qui desservoit la paroisse du village de Munster, près de l'embouchure de la Meuse; Jacques Lacop, religieux du même ordre et du même monastère, qui travailloit dans une paroisse voisine de Munster; André de Walter, prêtre séculier, mais qui avoit été curé de Heinort, près de Dort.

curés et un prêtre séculier. Le premier de ces curés étoit Léonard Wéchel, qui avoit étudié la théologie avec beaucoup de succès sous le célèbre Ruard Tapper, professeur de Louvain. Ayant été chargé de conduire une paroisse à Gorcum, il s'acquitta de ses devoirs avec autant de zèle que de piété et de savoir. La conduite qu'il tenoit dans les circonstances. difficiles, servoit de règle aux curés du pays, et ses décisions étoient regardées comme des oracles, même par l'université de Louvain. Il employoit tous ses revenus au soulagement des pauvres, de ceux sur-tout qui étoient malades. Il reprenoit le vice sans faire acception des personnes; sa douceur et sa patience gagnèrent à la longue plusieurs pécheurs qui avoient été long-temps sourds à ses remontrances, et qui n'y avoient répondu que par des insultes et des outrages.

Nicolas Poppel, autre curé de Gorcum, n'avoit pas des talens aussi distingués que Léonard Wéchel; mais il ne lui étoit point inférieur du côté du zèle pour le salut des ames. Leurs compagnons s'étoient aussi préparés au martyre par une vie pleine de bonnes œuvres; ils furent tous déclarés martyrs, et béatifiés par Clément X, en 1674. Les Bollandistes (1) ont publié la relation de plusieurs miracles opérés par leur intercession, laquelle fut envoyée à Rome pour travailler au procès de leur béatification. La plus grande partie de leurs reliques se gardent dans l'église des Franciscains de Bruxelles, où elles furent secrètement apportées de Bril.

Voyez l'histoire de leur martyre, écrite par le docteur Guillaume Estius, et imprimée à Douai, en 1603. Voyez aussi la Batavia sacra, part. 2. p. 174, et les pièces recueillies par Sollier, t. II, Julii, p. 756.

(1) Jul. t. II, p. 823.

Tome VI.

F*

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