Images de page
PDF
ePub

S. OTHON, ÉVÊque de Bamberg en Franconie, APÔTRE DE POMERANIE.

SAINT OTHON étoit de Souabe, en Allemagne. Il prit l'état ecclésiastique, dans l'intention d'y trouver plus de facilité pour l'exécution du projet qu'il avoit de se consacrer entièrement au service de Dieu. L'empereur Henri IV, instruit de sa science et de sa piété, le donna pour chapelain à la princesse Judith, sa sœur, lorsqu'il la maria à Boleslas III, duc de Pologne (a). Après la mort de Judith, il revint en Allemagne, et fut fait chancelier de l'empereur.

On apportoit alors à l'empereur les anneaux et les croix des évêques et des principaux abbés quand ils étoient morts; le prince s'en emparoit, et les vendoit à ceux qu'il avoit lui-même choisis pour gouverner les églises ou les abbayes vacantes. Les souverains pontifes condamnoient une telle conduite comme simoniaque et préjudiciable aux droits de l'église. Henri ne se soumit point à cette condamnation; il la méprisa même, et procura l'élection de l'antipape Guibert. Othon fit tous ses efforts pour lui inspirer des sentimens de repentir, et ne balança point à se déclarer hautement contre le schisme.

Malgré cette généreuse liberté, l'empereur l'estima toujours singulièrement, et il lui en donna des preuves en le plaçant sur le siége épiscopal de Bamberg en 1103. Le Saint s'adressa à Rome pour être confirmé dans son élection, et reçut le pallium du pape Paschal II. Il s'employa de toutes

(a) La mort de saint Stanislas, assassiné par Boleslas II, fut cause qu'il n'y eut point de roi en Pologne depuis l'an 1079 jusqu'à l'an 1295.

ses forces à éteindre le schisme, et à prévenir les maux qui en sont les suites ordinaires. Ce fut surtout à la diète qui se tint à Ratisbonne, en 1104, qu'il montra sa capacité, son éloquence et son zèle pour le rétablissement de la paix dans l'église.

Deux ans après, Henri V succéda à son père, et persista dans le schisme. Il estima le Saint autant que l'avoit fait son prédécesseur, quoiqu'il fût attaché au pape légitime, et qu'il reçût les plus grandes marques de considération de la part de tous ceux qui occupèrent de son temps la chaire de saint Pierre : tant il est vrai que la vertu se fait estimer de ceux mêmes qui ne la pratiquent pas, et que la douceur sait désarmer les caractères les plus intraitables.

Saint Othon ne séparoit point les exercices de la vie intérieure des fonctions du ministère. Il fit de pieuses fondations, disant que c'étoit autant d'hôtelleries qu'il bâtissoit sur la route qui conduit à l'éternité.

Boleslas IV, duc de Pologne, fils de ce Boleslas qui avoit épousé la sœur de l'empereur Henri IV, avoit succédé à Ladislas II, son frère aîné. Ayant fait la conquête d'une partie de la Poméranie, il pria le Saint de venir instruire des vérités du christianisme les idolâtres de ce pays. Othon saisit cette occasion d'accroître le royaume de JésusChrist; il régla les affaires de son diocèse, puis il se mit en route avec un nombre considérable d'ouvriers évangéliques. Ayant traversé la Pologne et la Prusse, il arriva enfin dans la Pomeranie orientale. Uratislas II, duc de la Haute-Poméranie, reçut le baptême en 1124, avec la plus grande partie de ses sujets. Le saint missionnaire n'eut pas lieu de se plaindre de l'inutilité de ses soins; son zèle produisit des conversions innom

brables. Il établit des prêtres par-tout où ces établissemens étoient nécessaires, et pourvut avec sagesse aux différens besoins des nouveaux convertis. Il retourna l'année suivante à Bamberg, afin d'y célébrer la fête de Pâques.

Les villes de Stétin et de Juliers étant retombées dans l'idolâtrie, il fit un second voyage dans la Poméramie en 1128. Non-seulement il rétablit la profession du christianisme dans ces deux villes, mais il porta encore la lumière de l'évangile chez plusieurs autres peuples barbares. De retour dans son diocèse, il y mourut le 30 Juin 1139. On l'enterra le 2 de Juillet, jour auquel il est nommé dans le martyrologe romain. Il fut canonisé par Clément III en 1189. La châsse qui renferme ses reliques se garde à Hannover, dans le trésor de l'électeur (b).

Voyez la vie du Saint dans les dernières éditions de Surius, et dans le recueil des Bollandistes, t. I, Julii, p. 349 (c). Voyez encore une autre vie du même Saint, composée par D. Anselme Meiller, abbé d'Ensdorf, dans le Haut-Palatinat, sous ce titre : Mundi miraculum, S. Otho, episcopus Bembergensis, Pomerania apostolus, exempli monasterii Ensdorffensis præcipuus dotator, etc. Ambergæ, 1739, in-4.°

S. PHOCAS, JARDINIER, MARTYR.

Tiré de ses deux panégyriques, écrits l'un par saint Astère, et l'autre par saint Chrysostôme, t. 11, p. 704, édit. Ben. Voyez Ruynart, p. 627.

L'AN 303.

SAINT PHOCAS demeuroit près de la porte de Sinope, ville du Pont, et s'occupoit à cultiver un

(6) Voyez le Thesaurus reliquiarum electoris BrunswicoLuneburgensis, imprimé à Hannover, en 1713, in-fol.

(c) D. Friépeis, sous-prieur d'Andechs, autrement appelé Eeiligen-Berg ou la sainte montagne, prouve dans son histoire des anciens comtes d'Andechs, contre le P. Sollier, un des continuateurs de Bollandus, que saint Othon étoit de la famille des Andechs.

jardin qui lui fournissoit de quoi vivre, et de quoi faire aux pauvres des aumônes abondantes. Dans cette profession, vile aux yeux du monde, il imitoit la vertu des anciens patriarches, et retraçoit en quelque sorte l'état heureux où se trouvèrent Adam et Eve tandis qu'ils furent innocens.

Le Saint joignoit la prière au travail des mains. Sa maison étoit ouverte aux étrangers et aux voyageurs qui ne savoient où loger. Après avoir assisté libéralement les pauvres durant plusieurs années, il fut trouvé digne de donner sa vie pour Jésus-Christ. Malgré l'obscurité de sa profession, on le connoissoit dans tout le pays à cause de sa vertu et de sa charité.

On l'accusa d'être chrétien, durant une cruelle persécution, qu'on croit être celle qu'alluma Dioclétien en 303. Son prétendu crime étoit si notoire, qu'on n'observa point à son égard les formalités ordinaires. Les bourreaux eurent ordre de l'exécuter en quelque endroit qu'ils le rencontrassent. Arrivés à Sinope, ils s'arrêtèrent à la maison de Phocas, qu'ils ne connoissoient point, et se rendirent à l'invitation que le Saint leur faisoit de loger chez lui. Ils furent si charmés de son honnêteté et de ses attentions, qu'ils lui découvrirent en soupant le sujet de leur voyage, et le prièrent de leur dire où ils pourroient plus aisément rencontrer ce Phocas qu'on leur avoit ordonné de mettre à mort. Le serviteur de Dieu, sans témoigner la moindre surprise, leur répondit qu'il le connoissoit bien, et que le lendemain matin il leur donneroit toutes les instructions dont ils avoient besoin.

S'étant retirés pour aller se coucher, le Saint creusa un tombeau, prépara tout ce qui étoit nécessaire pour enterrer son corps, et employa le

reste de la nuit à se disposer à sa dernière heure. Quand le jour fut venu`, il alla trouver ses hôtes, et leur dit que Phocas étoit en leur puissance, et qu'il ne tenoit plus qu'à eux d'exécuter la commission dont ils étoient chargés. Comme ils lui demandoient où il étoit, il répondit avec tranquillité : « Le voici devant vous; c'est moi-même. » Frappés d'une pareille réponse, ils restèrent quelque temps immobiles, ne pouvant se résoudre à tremper leurs mains dans le sang d'un homme qui montroit tant de vertu, et qui les avoit reçus dans sa maison avec une si grande cordialité. Phocas les encourageoit indirectement, en leur répétant qu'il ne craignoit point la mort, puisqu'elle devoit lui procurer les plus précieux avantages. Revenant à la fin de leur surprise, ils lui coupèrent la tête. On bâtit depuis une église de son nom, qui devint célèbre dans tout l'Orient, et on y déposa la plus grande partie de ses reliques.

Saint Astère, qui étoit évêque d'Amasée, vers l'an 400, prononça le panégyrique du saint martyr dans une église qui possédoit une petite portion de sa dépouille mortelle. Il y dit (1) que « Phocas, depuis sa mort, est devenu l'appui et » la colonne des églises; qu'on vient de tous côtés » au lieu de prière dans lequel il a le bonbeur de » parler; que le magnifique temple (de Sinope), » qui possède son corps, procure de la consola» tion aux affligés, et la santé aux malades; qu'il » est comme un magasin public toujours ouvert » aux indigens; que tous les lieux où il y a une » portion de ses reliques sont célèbres par des » miracles, et l'objet de la vénération des Chré» tiens; que les Romains, dont la capitale possède » le chef du Saint, l'honorent de la même manière (1) P. 178, edit. Combefis.

« PrécédentContinuer »