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peut même dire en général qu'on ruine sa santé à force de vouloir la ménager; mais comme nous ne pouvons disposer de notre vie, il faut prendre de sages précautions pour la conserver (7). Ce seroit donc manquer à la charité que chacun doit avoir pour soi-même, que de ne pas user des secours ordinaires de la médecine quand ils sont devenus nécessaires (8); et les Saints qui, avec saint Charles Borromée, réprouvoient les précautions outrées de certaines personnes pour éloigner les maladies, se montroient fort exacts à observer ce que leur prescrivoient les médecins par rapport aux remèdes simples et ordinaires.

Mais que le chrétien se souvienne, dans la maladie, qu'il doit avant tout chercher la guérison de son ame par la pénitence et par la pratique des autres vertus; qu'il regarde Dieu comme son principal médecin; qu'il lui demande le rétablissement de sa santé, si toutefois il n'est point contraire à la gloire du Seigneur; qu'il prie Jésus-Christ d'étendre sur lui cette main qui durant sa vie mortelle guérit tant de malades. Celui qui compte plus sur l'art des médecins que sur la puissance divine, doit craindre le reproche qui fut fait autrefois à Asa, roi de Juda (9). D'ailleurs les causes des maladies sont souvent si cachées, l'efficacité des remèdes dépend de tant de circonstances, la science des plus habiles médecins est si incertaine, que souvent ils détruisent la nature, au lieu de seconder ses efforts, et qu'ils accélèrent par-là le moment de la mort. Il faut donc que le chrétien attende de la bénédiction du ciel l'effet des remèdes qui lui sont prescrits. En se résignant à la vo

(7) Estius, in Eccl. XXXVIII.

(8) Ephes. V, 29.
(9) 2. Paral. V, 12.

Aug. ep. 130, ol. 121, ad Probam.

lonté divine, il jouira d'une parfaite tranquillité, et les vertus qu'il pratiquera lui feront tirer de sa maladie l'avantage le plus précieux.

S. MAXIMILIEN, S. MALCHUS,
S. MARTINIEN, S. DENYS, S. JEAN,
S. SERAPION ET S. CONSTANTIN,
VULGAIREMENT APPELÉS

LES SEPT DORMANS, MARTYRS.

CES Saints confessèrent la foi à Ephèse, en 250, devant le proconsul, sous le règne de l'empereur Dèce. Ayant été trouvés dans une caverne où ils #s'étoient cachés, on en mura l'entrée, et ils s'y endormirent dans le Seigneur. Quelques modernes prenant mal ces expressions, ont imaginé que les serviteurs de Dieu s'étoient endormis d'un sommeil véritable, et qu'on les retrouva, en 479, sous le règne de Théodose-le-Jeune. La vérité est que leurs reliques furent découvertes en cette année. On les porta à Marseille, et l'on montre encore dans l'église de Saint-Victor un grand coffre de pierre qu'on prétend avoir servi au transport. La mémoire de ces saints martyrs est en grande vénération chez les Grecs, les Syriens, et tous les peuples de l'Orient.

On voit à Rome, dans le Musæum Victorium, une pierre factice qui ressemble assez à une pierre précieuse. On a gravé dessus un groupe de figures qui représentent les sept Dormans, chacun avec son nom. Jean et Constantin ont deux massues près d'eux; il y en a une pleine de nœuds près de Maximilien. Malchus et Martinien ont deux haches à leurs côtés; Sérapion, une torche enflammée; et Danésius ou Denys, un grand clou (a). On a (a) Ces grands clous, clavi trabales, dont on se sert daps

peut-être voulu représenter les différens genres de supplices qu'on leur fit souffrir. Les sept martyrs paroissent fort jeunes, ce qui s'accorde avec plusieurs anciens monumens où ils sont appelés enfans (b).

La caverne où leurs corps furent trouvés devint célèbre par la dévotion des fidèles. On la montre encore aux voyageurs qui vont dans le Levant (c).

Voyez saint Grégoire de Tours, l. 1 de Glor. martyr. c. 95; le P. Cuper, Act. Sanct. t. VI, Jul. p. 175; l'ouvrage imprimé à Rome en 1741, in-4.°, sous le titre de Dissertatio de sanctis septem Dormientibus. On y trouve l'explication de ce groupe de figure, dont nous venons de parler.

S. NAZAIRE ET S. CELSE,

MARTYRS A MILAN.

Tiré de deux discours prononcés le jour de leur fête, l'un par saint Ennode, l'autre par un auteur contemporain de saint Ambroise, auquel on l'attribue communément. Cet auteur pourroit être saint Gaudence de Bresse. Voyez la vie de saint Ambroise, par le diacre Paulin ; Tillemont, t. II, et Pinius, Act. Sanct. t. VI, Jul. p. 503.

Vers l'an 68.

SAINT NAZAIRE eut le bonheur d'avoir pour mère une femme remplie de piété. Elle avoit été instruite dans la religion chrétienne par saint Pierre, ou du moins par ses premiers disciples. Son nom étoit Perpétue. Quoique son mari, qui

les bâtimens pour lier les poutres ensemble, étoient autrefois des instrumens de supplice. C'est ce qui se prouve par l'autorité d'Horace, l. 1, od. 3, et par celle de saint Paulin, Nat. 9, ou Carm. 24.

(6) Pueri. Voyez la Dissert. de SS. 7 Dorm. c. 18, p. 65 et c. 6, p. 11; le ménologe de l'empereur Basile, imprimé à Rome en 1727, etc.

(c) Voyez Spon, Voyage d'Italie et du Levant, t. I, l. 3, p. 327.

occupoit une place distinguée dans les troupes de l'empire, fût païen, elle inspira au jeune Nazaire son fils un désir ardent de se consacrer à JésusChrist. Ses leçons produisirent des effets qui surpassèrent ses espérances. Nazaire devint un modèle accompli de toutes les vertus chrétiennes. Enflammé de zèle pour le salut des ames, il quitta la ville de Rome sa patrie, et alla prêcher la foi en plusieurs lieux avec une ferveur et un désintéressement digne d'un disciple des apôtres. Etant arrivé à Milan, les païens l'y arrêtèrent, avec un jeune homme appelé CELSE, qui l'accompagnoit pour l'assister dans ses voyages. Ils furent l'un et l'autre condamnés à perdre la tête. Ils souffrirent peu après que Néron eut excité la première persécution contre l'église. On les enterra séparément dans un jardin situé hors de la ville. Saint Ambroise découvrit leurs corps, et les leva de terre en 395. On trouva dans le tombeau de saint Nazaire une fiole pleine du sang du martyr, lequel étoit aussi rouge et aussi vermeil que s'il eût été versé le jour même. Les fidèles en mirent quelques gouttes sur des mouchoirs, et ils en firent ensuite une espèce de pâte, dont saint Ambroise envoya un morceau à saint Gaudence de Bresse. Le saint archevêque de Milan transporta les reliques des deux martyrs dans l'église qu'il venoit de bâtir en l'honneur des apôtres; il en détacha une petite partie, qu'il envoya à saint Paulin de Nole, par lequel elle fut reçue comme un présent de grand prix, ainsi qu'il le dit lui-même (1).

Le chapitre de Beaucaire, au diocèse d'Arles, honore saint Nazaire et saint Celse comme ses patrons. On y a adopté office qu'en fait la ca(1) Carm. 24, et ep. 12.

thédrale de Beziers, qui a été consacrée sous le nom de ces saints martyrs. (a).

Les martyrs furent traités comme le rebut du monde; mais ils ont reçu de Dieu une couronne dont l'éclat ne se flétrira jamais. La gloire du monde est fausse et passagère; c'est une ombre qui s'échappe, et que l'on ne peut retenir. Il n'en est pas ainsi de la gloire de la vertu; elle est solide et véritable; elle gagne même le cœur des mondains. Plus nous considérons le soleil, dit saint Basile (2), plus nous sommes frappés d'admiration, et toutes les fois que nous le revoyons, nous lui trouvons toujours le même éclat et la même beauté. C'est ainsi que la mémoire des martyrs nous est encore précieuse après tant d'années; elle deviendra même plus célèbre à mesure que les siècles s'écouleront.

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SAINT VICTOR, Africain de naissance, fut élu pape après la mort de saint Eleuthère, arrivée l'an 193 de Jésus-Christ, après celle de l'empereur Commode, dans le temps où, suivant Eusèbe, Pertinax jouissoit de l'empire. Il se montra digne successeur des apôtres, en s'opposant avec vigueur aux hérésies qui s'élevèrent de son temps.

Théodote de Bysance, corroyeur de profession, ayant apostasié pour sauver sa vie dans la dernière persécution, osa dire, pour diminuer l'énormité de sa faute, que Jésus-Christ, qu'il avoit renié, n'étoit point Dieu, que ce n'étoit qu'un pur homme; en quoi il enchérissoit sur les

(a) Les hymnes de cet office sont du célèbre P. Vanière, jésuite, auteur du Prædium rusticum.

(2) Hom. de S. Gordio.

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