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de cette dispute, et pour lequel il avoit été dégradé par le pape Eleuthère, fut sans doute ce qui détermina saint Victor à faire paroître de la vigueur, afin de prévenir les maux qui pouvoient naître de la diversité dont il s'agissoit; mais par un motif de charité et de prudence, il évita de porter trop loin la sévérité, et il suivit en cela les avis que lui avoient donnés saint Irénée dans une lettre qu'il lui écrivit à ce sujet en son nom et au nom des fidèles des Gaules. Il mourut l'an 202 de Jésus-Christ, le neuvième du règne de Sévère, et le dixième de son pontificat. Quelques écrivains du cinquième siècle l'appellent martyr, et son nom se trouve avec ce titre dans un ancien pontifical écrit en 530; ce qui pourroit lui convenir car, suivant la remarque de Sillemont (7), il y avoit eu beaucoup de Chrétiens martyrisés sous le règne de Sévère, avant que ce prince donnât des édits pour la persécution de l'an 202. Le pape Pagi croit cependant que saint Victor ne mourut point par le glaive, parce qu'il n'est appelé que confesseur dans quelques martyrologes. au reste, sa dignité et son zèle l'exposoient si naturellement au martyre, qu'on ne peut lui en refuser la gloire.

Voyez Eusèbe, Hist. l. 5, c. 23; Orsi, Berti, Diss. hist. t. II, p. 88, etc.

S. INNOCENT I, PAPE.

SAINT INNOCENT, né à Albano, près de Rome, fut élu d'une voix unanime pour succéder au pape Anastase, mort en 402. Ce fut malgré lui qu'il monta sur la chaire de saint Pierre. Saisi de

(7) T. III, p. 112.

frayeur à la vue des dangers inséparables de sa place, il ne cessoit de demander à Dieu cet esprit de sagesse et de prudence dont il avoit besoin pour bien gouverner l'église. Les temps étoient alors très-difficiles.

Alaric, à la tête d'une nombreuse armée de Goths, menaçoit de porter la désolation dans toute l'Italie. Le saint pape exhorta les fidèles à faire un bon usage des malheurs auxquels ils étoient exposés, et à recevoir les coups de la main céleste avec résignation et humilité. Cela ne l'empêcha cependant pas d'employer les moyens que prescrivoit la prudence. Il fit plusieurs voyages dans le dessein de ménager une réconciliation entre Alaric et l'empereur Honorius; mais ses démarches n'eurent aucun effet. L'armée de l'empire, commandée par Stilicon, et celle des Goths, en vinrent aux mains en 403. La victoire se déclara pour les premiers. Les barbares travaillèrent fortement à réparer leurs pertes. Alaric marcha contre Rome, et sur le refus que fit l'empereur de lui donner le commandement de ses troupes, il prit cette ville le 24 Août 410, et l'abandonna au pillage. Rien ne fut épargné que l'église de Saint-Pierre et de Saint-Paul, à laquelle le vainqueur avoit accordé le privilége de sanctuaire. Le pape étoit alors à Ravenne avec Honorius. Alaric mourut l'année suivante; mais Ataulphe son beau-frère lui succéda, et saccagea Rome une seconde fois.

Après le départ des barbares, le saint pape revint à Rome, et par sa présence seule il consola son peuple affligé. Il apprit aux fidèles à profiter pour leur salut des calamités qui venoient de fondre sur eux. La patience avec laquelle ils souffrirent la perte de leurs biens, et tout ce qu'ils

avoient de plus cher, édifia singulièrement les païens. Ceux-ci ne s'en tinrent point à une stérile admiration des vertus dont ils étoient témoins, ils se présentèrent en foule pour se faire instruire, et pour demander le baptême. Le pape les confirma dans leurs saintes dispositions, et forma d'eux un peuple nouveau, qui ne s'occupa plus que de la pratique des bonnes œuvres.

Innocent ne se bornoit pas au soin de l'église romaine; il écrivit plusieurs lettres qui seront des monumens éternels de son savoir et de son zèle. Celles sur-tout qu'il adressa à saint Exupère, évêque de Toulouse, et à Décentius, évêque de Gubio, en réponse à plusieurs questions qu'ils lui avoient faites, contiennent des règles utiles, et des décisions fort sages. Il dit dans la première qu'on ne doit jamais refuser l'absolution aux pénitens qui sont au lit de la mort, pour ne pas imiter la dureté des Novatiens. Il dit dans la seconde qu'il n'appartient qu'aux évêques de conférer le Saint-Esprit dans la confirmation, en oignant d'huile le front des personnes baptisées, parce qu'ils sont les seuls qui aient la plénitude du sacerdoce, et il ajoute qu'il ne peut réciter les paroles dont on se sert en conférant ce sacrement, de peur de dévoiler les mystères aux infidèles. Il use de la même réserve en parlant du saint sacrifice, tant étoit inviolable le secret avec lequel les premiers Chrétiens traitoient tout ce qui avoit rapport aux sacremens. Dans cette mê– me lettre, Innocent parle aussi de l'extrême-onction donnée aux malades, ce qui ne doit se faire, dit-il, qu'à l'égard des pénitens qui ont été réconciliés, parce que l'extrême-onction est un sacrement, et que les sacremens ne peuvent être administrés à ceux qui sont encore en pénitence.

Cet endroit remarquable prouve que dans les premiers siècles, l'extrême-onction étoit aussi bien regardée comme un sacrement que l'eucharistie. Innocent ne condamne point les laïques qui, par une dévotion usitée dans ce temps-là, se servoient des saintes huiles, mais sans employer les paroles sacramentelles. A la demande qu'on lui fit, savoir si les évêques pouvoient donner l'extrême-onction, qui étoit communément administrée par les simples prêtres, il répond qu'ils le peuvent sans doute, puisque les prêtres le font. suppose donc comme une chose indubitable que c'est aux prêtres, et non aux laïques, à administrer ce sacrement.

Il

Les conciles de Carthage et de Milève ayant condamné, en 416, les erreurs des Pélagiens, écrivirent au saint pape pour l'informer de ce qui avoit été fait. Les deux lettres synodales furent rédigées par saint Augustin. Innocent, dans sa réponse aux Pères de Milève, dit, « que toutes > les matières ecclésiastiques du monde chrétien » doivent être portées, de droit divin, au siége » apostolique, c'est-à-dire, à saint Pierre, l'au>>teur de ce nom et de cet honneur.» Il recommande aux mêmes évêques d'en agir ainsi. « Par» là, dit-il, vous suivrez l'ancienne coutume que » vous savez aussi bien que moi avoir toujours » été observée par tout le monde (a). » Lorsque

(a) On voit par-là que les évêques d'Afrique portoient au saint siége les causes majeures, celles au moins qui avoient la foi pour objet, et que dans ces sortes de causes, l'appel à Rome étoit toujours légitime. Ainsi les contestations qu'ils eurent avec les papes Innocent, Zozime et Célestin, ne tomboient que sur les appels touchant les faits personnels. Effectivement le recours à des juges éloignés entraîne avec soi des inconvéniens, et s'il est facile et fréquent, il peut être préjudiciable à l'exécution des ordres de la justice. Cependant les appels et la révision de certaines causes sont quelquefois Tome VI.

X

l'acte de confirmation donnée par le pape aux conciles de Carthage et de Milève fut arrivé en Afrique, saint Augustin dit dans un de ses discours : « Les décisions de ces deux conciles ont » été envoyées au siége apostolique; les rescrits de ce siège sont venus, la cause est présentement » finie: fasse le ciel que l'erreur puisse aussi fi» nir (1) ! »

Saint Innocent termina sa vie en défendant avec zèle la doctrine de la grâce de Jésus-Christ. Il mourut en 417, après avoir siégé quinze ans. Voyez ses lettres, les conciles, Cuper, Act. Sanet. t. VI, Jul. p. 548; Geillier, t. X, p. 104.

S. SAMSON, ÉVÊQUE.

et

SAINT SAMSON fut un enfant de prières. Il naquit vers l'an 490, dans cette partie du SouthWales, aujourd'hui connue sous le nom de Glamorhanshire (a). Ses parens, distingués par leur naissance, eurent son éducation fort à cœur, le mirent, lorsqu'il n'avoit encore que sept ans, sous la conduite du saint abbé Iltut. Le jeune Samson ayant fait de rapides progrès dans les sciences et la vertu, fut ordonné prêtre par saint Dubrice, évêque de Caërléon. En 512, il se reti

nécessaires pour empêcher l'injustice et l'oppression. On fit donc des règlemens sur la manière de restreindre les appels dans les causes ecclésiastiques qui n'étoient pas majeures ; mais le concile général de Sardique, qui fut comme une suite de celui de Nicée, décida qu'on pourroit appeler aux évêques de Rome, de tout le monde chrétien, dans les affaires de discipline, et les évêques d'Afrique acquiescèrent peu après à cette décision.

(1) Serm. 131, n. 10.

(a) Cette contrée faisoit partie du pays des Démètes, et étoit sur les frontières des Wénètes, qui habitoient la province appelée Guent par les Bretons, et présentement connue sous le nom de Monmouthshire.

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