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en bas âge, Edwi et Edgard, et il eut pour suc cesseur Edred, son frère. Ce fut durant le règne de ce prince qu'arriva le miracle que nous allons rapporter, d'après les anciens historiens d'Angleterre (g). Quelques personnes du clergé de Cantorbéry ayant une tentation de doute sur la présence réelle de Jésus-Christ dans l'eucharistie saint Odon pria Dieu de les en délivrer, et de leur confirmer d'une manière éclatante la vérité du mystère. Il obtint ce qu'il avoit demandé au ciel. Un jour qu'il disoit la messe dans sa cathédrale, quand il fut à la fraction de l'hostie, il en sortit deux gouttes de sang qui tombèrent dans le calice à la vue de tout le peuple. Le Saint fit venir à l'autel ceux qui avoient la tentation du doute. Ceux-ci, pleins de reconnoissance pour la grâce que Dieu leur avoit faite, l'en remercièrent solennellement avec leur archevêque.

Edwi, l'aîné des fils d'Edmond, fut roi après la mort d'Edred, arrivée en 955 (h). L'archevêque de Cantorbéry fit la cérémonie de son sacre à Kingston. Edwi étoit un prince livré à la débauche. Dans le repas qui suivit son couronnement, il quitta les évêques et les seigneurs qui étoient à table avec lui, afin d'aller avec Ethelgive, pour laquelle il avoit un amour impudique, dans un festin qui se donna à la cour, le jour de la fête de saint Augustin, archevêque de Cantorbéry.

(g) Nous parlons d'après Eadmer, qui a donné une bonne vie de saint Odon; d'après Guillaume de Malmesbury, et la chronique de l'église de Cantorbéry, cités dans les antiquités de la Bretagne, par Parker.

(h) Edred mourut après une maladie de langueur qu'il souffrit avec beaucoup de patience et de résignation; son règne fut de neuf ans et demi. Il prit le titre de roi de la GrandeBretagne, dans une charte qu'il donna à l'abbaye de Croyland, et qui est rapportée par Ingulphe. Il s'appelle monarque de toute l'Angleterre dans une autre charte donnée à l'abbaye de Réculver, Monast. Angl. App. t. I,

quoiqu'elle fût sa proche parente. Saint Dunstan, pour lors abbé de Glastembury, l'en reprit par l'ordre de saint Odon : mais sa généreuse liberté le fit condamner à l'exil; ses religieux furent aussi chassés de leur monastère. Saint Odon laissa agir son zèle contre l'infâme Ethelgive. Elle se retira à Glocester, où le roi ne rougit pas d'aller la joindre. Les Merciens et les Northumbres, indignés des horreurs qui se passoient sous son règne, prirent les armes contre lui, et proclamèrent roi son frère Edgard (i). Ce dernier honora singulièment saint Odon; il rappela saint Dunstan, et le fit placer sur le siége épiscopal de Worcester. Pendant son règne, qui fut d'environ seize ans il mérita l'amour de ses sujets et le respect des étrangers, qui n'osèrent jamais troubler la paix et la tranquillité de ses états. On attribue principalement à saint Odon et à saint Dunstan les lois utiles qu'il porta. Toujours guidé par les avis de ces deux grands hommes, il répara les maux causés par la tyrannie et les autres crimes de son frère (k).

Saint Odon travailloit avec un zèle infatigable, même dans une extrême vieillesse, à l'instruction

(i) Edwi conserva le royaume des Saxons occidentaux jusqu'à sa mort, qui arriva en 959, selon Florent de Worcester et le manuscrit des annales saxones de Laud.

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(k) Edgard mourut en 975. On lit dans Guillaume de Malmesbury et dans Florent de Worcester, qu'il avoit deux grandes flottes composées de 1600 vaisseaux, avec lesquelles il parcouroit tous les ans les mers de la Grande-Bretagne. Les mêmes auteurs ajoutent qu'il avoit souvent à sa suite six ou huit petits rois, nommément Keneth, roi des Ecossais, Malcolm, roi de Cumberland, Maccuse, seigneur de Man et des Isles, et cinq princes gallois, qui tous conduisoient sa galère depuis Chester en descendant la Dée. Ces princes gallois étoient les successeurs de Howel Dha; qui donna de sages lois à tout le pays de Galles, qui le reconnoissoit pour souverain. Ces lois ont été publiées par Wotton en 1735, in-fol.

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de son clergé et du reste de ton troupeau; on le voyoit aussi redoubler de ferveur dans tous ses exercices, à mesure qu'il approchoit de la mort, Il mourut en 961 (). Son nom est célèbre dans tous les martyrologes d'Angleterre. Sa vertu le faisoit appeler de son vivant, Odo se gode, ce qui en langue saxone signifioit, Odon le bon (m).

Ses reliques étoient anciennement dans une châsse. Il paroît que lors de la prétendue réforme, on les mit sous une petite tombe que l'on voit encore aujourd'hui à l'endroit où la châsse étoit autrefois.

S. SISOÈS OU SISOY, ANACHORÈTE EN ÉGYPTE.

SAINT SISOÈS fut une des plus éclatantes lumières des déserts d'Egypte, après la mort de saint Antoine. Il étoit Egyptien de naissance. Ayant quitté le monde dès sa jeunesse, il se retira dans le désert de Scété, et vécut quelque temps sous la conduite de l'abbé Hor. Le désir de trouver un lieu encore plus solitaire lui fit passer le Nil, et il alla se cacher sur une montagne où saint Antoine étoit mort depuis peu. La mémoire toute récente des vertus de ce grand homme soutenoit merveilleusement sa ferveur; il s'imaginoit le voir, et entendre de sa bouche les instructions qu'il avoit données à ses disciples. Il s'appliqua donc de toutes ses forces à imiter ses pratiques les plus

par

(4) Mabillon a prouvé la vérité de cette date l'autorité de la chronique sax one.

(m) Les constitutions de saint Odon paroissent être les instructions que le Saint donnoit à son clergé. Voyez Inett, Hist. de l'église d'Anglet. t. I.

Les lois d'Athelstan, d'Edmond et d'Edgard regardoient en partie l'état, et en partie l'église; elles furent portées dans des assemblées générales, et saint Odon en est regardé comme le principal auteur,

héroïques. Sa pénitence étoit très-austère, son silence rigoureux, sa prière ardente et presque continuelle. Sa sainteté lui acquit une telle réputation, qu'il mérita la confiance de tous les solitaires des environs. Il y en avoit même qui venoient de fort loin pour lui demander des avis sur les voies intérieures de la perfection; et malgré le soin qu'il prenoit de se cacher, il étoit contraint de faire céder à la charité son amour pour le silence et la retraite. Souvent il passoit deux jours sans manger; il étoit tellement mortifié et absorbé en Dieu, qu'il oublioit de prendre sa nourriture, et il falloit qu'Abraham son disciple l'avertit lorsque l'heure de manger étoit venue; encore s'en étonnoit-il quelquefois, croyant l'avoir déjà fait, tant il faisoit peu d'attention aux besoins du corps (1).

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Son oraison étoit si sublime, qu'elle alloit fréquemment jusqu'à l'extase. D'autres fois son cœur étoit si fort embrasé du feu de l'amour divin,

que n'en pouvant presque soutenir la véhémence,

se soulageoit par de fréquens soupirs qui lui échappoient sans qu'il s'en aperçût, et même contre sa volonté (2). Il tenoit pour maxime qu'un solitaire ne doit point choisir le travail des mains qui lui plaît le plus (3). Ordinairement il s'occupoit à faire des paniers. Un jour qu'il vendoit le fruit de son travail, il eut une tentation de colère; aussitôt il jeta ses paniers par terre, les y laissa et prit la fuite. A force de se vaincre lui-même, il acquit une douceur que rien ne pouvoit altérer. Son zèle contre le vice n'avoit aucune amertume. Il ne s'étonnoit point des fautes de ses frères, et

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(1) Rosweide, Vit. Patr. l. 5, lib. 4, n. 38.

(2) Ibid. l. 6, lib. 2, n. 14.

Coteler. Monum. gr. t. I, p. 675.

au lieu de les leur reprocher avec indignation, il leur aidoit à s'en relever avec une tendresse vraiment paternelle (4). Lorsqu'il vouloit recommander aux autres la douceur et l'exactitude à observer les règles, il racontoit l'histoire suivante:

Des frères, au nombre de douze, étant en chemin, la nuit les surprit, et ils s'aperçurent que leur guide s'égaroit. Ils ne l'en avertirent cependant point, de peur de rompre le silence, pensant en eux-mêmes qu'il verroit sa méprise quand le jour seroit venu, et qu'alors il les remettroit dans le véritable chemin ils le suivirent donc en patience, et firent jusqu'à douze milles. Le jour venu, le conducteur remarquant qu'il s'étoit égaré, leur fit de grandes excuses; et comme il étoit permis de parler, les frères lui répondirent tranquillement « Nous avons bien vu que vous quittiez » le chemin, mais nous n'avons rien voulu dire. » Cet homme admira leur patience, et fut très-édifié de leur exactitude à garder la règle (5).

Quelques Ariens étant venus sur sa montagne, osèrent y dogmatiser parmi les frères. Le Saint ne leur répondit rien; mais il ordonna à son disciple de lire en leur présence un traité de saint Athanase contre l'arianisme, ce qui leur ferma la bouche. Après les avoir ainsi confondus, il les renvoya avec sa douceur ordinaire.

Saint Sisoès fut aussi un modèle accompli d'humilité; il revenoit toujours à cette vertu, dans les avis et les instructions qu'il donnoit aux autres. Un solitaire lui ayant dit un jour : « Mon père, je

me considère comme étant toujours devant » Dieu, il lui répondit : Ce n'est pas assez, mon

(4) Coteler. Monum. gr. t. 1, p. 670; Rosweide, 1, 3, P. 103.

(5) Coteler, Ibid. p. 672.

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