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Dieu, sur-tout quand on participe aux saints mystères. Il avoit une conscience si délicate, qu'il ne pouvoit retenir ses larmes en faisant l'aveu de ses fautes les plus légères; il craignoit jusqu'à l'ombre même du péché.

Clément VII l'ayant créé cardinal sous le titre de Saint-George, le fit venir à Avignon, et l'obligea de rester auprès de sa personne. Pierre ne diminua rien de ses austérités. Lorsque Clément lui eut ordonné de ménager davantage sa santé, qui dépérissoit insensiblement, il lui répondit : «Saint Père, si je suis un serviteur inutile, je >> sais du moins obéir. » Il redoubla ses aumônes pour compenser će qui avoit été retranché de ses pratiques de pénitence. Sa table étoit frugale, son domestique peu nombreux, ses ameublemens simples et ses habits pauvres, encore n'en changeoit-il que lorsqu'ils étoient entièrement usés. Il paroissoit, à ceux qui connoissoient ses aumônes, qu'elles ne pouvoient aller plus loin; il trouva cependant de nouveaux moyens de les augmenter, en se défaisant de ses meubles et de ses équipages; il vendit jusqu'à son anneau pastoral pour assister les indigens. Tout ce qui l'environnoit annonçoit en lui l'esprit de pauvreté, et témoignoit son immense charité pour les pauvres. Enfin on ne lui trouva que vingt sous à sa mort.

Jamais il ne perdoit de vue la présence de Dieu, même dans les actions qui sembloient les plus indifférentes. Plusieurs fois il lui arriva d'avoir des ravissemens en public. On garde dans la collégiale de Notre-Dame d'Autun un tableau qui le représente en extase, et au bas duquel on lit ces paroles qu'il répétoit souvent : « Méprisez le monde, » méprisez-vous vous-même; réjouissez-vous dans

» le mépris de vous-même, mais prenez garde de » mépriser qui que ce soit. »>

Dix mois après sa promotion au cardinalat, il fut attaqué d'une fièvre violente qui altéra tout-àfait son tempérament. Sa santé parut d'abord vouloir se rétablir; mais ce n'étoit qu'une guérison imparfaite, qui fut suivie d'une langueur dont on craignit bientôt les suites. On lui conseilla de se retirer à Villeneuve, petite ville fort agréable située de l'autre côté du Rhône, vis-à-vis d'Avignon. Il saisit volontiers cette occasion de s'éloigner du tumulte de la cour de Clément VII. Durant sa maladie, il se confessoit et communioit tous les jours. Sa piété et sa ferveur croissoient à mesure qu'il approchoit de sa fin.

André son frère étant venu le voir, il lui parla avec tant de force des vanités du monde et des avantages de la piété, que ses paroles firent sur le cœur de celui-ci une impression qui ne s'effaça jamais. André prit depuis les ordres, devint évêque de Cambrai, et fut un des plus saints prélats de son temps. Pierre lui recommanda en particulier Jeanne de Luxembourg, sa sœur, qu'il avoit engagée à vivre dans une continence perpétuelle, et qui fut toute sa vie un parfait modèle de la perfection chrétienne; il le chargea aussi de lui remettre un petit traité qu'il avoit fait pour son Instruction.

Sentant que ses forces l'abandonnoient, il demanda les derniers sacremens. Ayant fait venir ses domestiques qui se rangèrent en pleurant autour de son lit, il les pria de lui pardonner le scandale qu'il leur avoit donné, en ne les édifiant point par ses exemples, comme il l'auroit dû; il les conjura ensuite de lui promettre tous qu'ils feroient pour l'amour de lui ce qu'il alloit leur

prescrire. Ils furent extrêmement surpris quand ils l'entendirent leur donner l'ordre suivant : «Prenez » la discipline qui est sous mon chevet, et que cha> cun de vous m'en donne plusieurs coups sur le >> dos, pour me punir des fautes que j'ai commises » envers vous, qui étiez mes frères en Jésus-Christ >> et mes maîtres: » Malgré la répugnance qu'ils avoient à exécuter un pareil ordre, ils obéirent cependant pour ne pas contrister le Saint. Après cet acte de pénitence et d'humilité, Pierre s'entretint en silence avec Dieu jusqu'au moment où il rendit l'esprit.

Sa bienheureuse mort arriva le 2 Juillet 1387. Il n'avoit point encore dix-huit ans accomplis. Quoiqu'il eût le gouvernement de son diocèse il n'étoit point prêtre. II, semble cependant qu'il étoit diacre, et sa dalmatique se garde à Avignon. Il fut enterré sans pompe comme il l'avoit demandé, dans le cimetière de Saint-Michel de cette ville.

Les miracles opérés par son intercession portèrent les Avignonais à construire une chapelle sur son tombeau. On a depuis bâti un couvent de Célestins au même endroit, et c'est dans l'église de ces religieux que se garde le corps du Saint, enchâssé sous un magnifique mausolée. La ville d'Avignon le choisit pour patron en 1432, à l'occasion d'un miracle qui s'étoit opéré à son tombeau (b). Voici de quelle manière il est rapporté. Un enfant âgé d'environ douze ans, tomba du haut d'une tour sur un roc escarpé. Son corps fut brisé, sa tête s'ouvrit, et la cervelle en tomba par terre. Le père de cet enfant, instruit de ce qui étoit arrivé, accourt, se met à genoux, im(6) L'histoire des miracles opérés au tombeau de saint Pierre de Luxembourg a été publiée par les Bollandistes. Tome VI.

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plore l'intercession de saint Pierre; ramassant ensuite la cervelle avec le corps de son fils, il les porte sur le tombeau du Saint. Le peuple et les Célestins se mettent en prières, et quelques instans après l'enfant ressuscite. On le plaça sur l'autel, afin que ceux qui l'avoient vu mort pussent le voir vivant. Ce miracle arriva le 5 de Juillet, jour auquel on a depuis célébré la fête du Saint à Avignon.

La vie et les miracles du serviteur de Dieu ayant été juridiquement examinés, la bulle de sa béatification fut expédiée en 1527 par le vrai pape Clément VII, qui étoit de la famille des Médicis.

Le bienheureux Pierre de Luxembourg fut un Saint dès son enfance, parce qu'il n'eut jamais d'autre désir que celui de plaire à Dieu, et de procurer sa gloire. S'il y avoit dans nos cœurs une étincelle du feu sacré qui le brûloit, nos ames s'élèveroient au Seigneur dans tout ce que nous ferions; nous lui consacrerions tous nos momens, et chacune de nos actions deviendroit un sacrifice agréable à ses yeux. «Dieu, dit saint Cyprien (1), » considère moins ce que nous lui donnons, que les > dispositions intérieures qui accompagnent notre » don. Nos actions, suivant saint Ambroise (2) » n'ont d'autre prix que celui qu'elles tirent des » sentimens du cœur, et elles sont plus ou moins » méritoires, selon que ces sentimens ont plus ou moins de vivacité. Voyez, continue ce Père, jus» qu'où va la justice de votre juge................. Il ne demande à votre ame que le prix qu'il doit mettre

» à vos œuvres. »

(1) De oper. et Eleem.

(2) L. 1. de Offie. e. 30.

S.te MODWÈNE, Vierge en Angleterre. SAINTE MODWENE étoit Irlandaise de naissance. Ayant embrassé la vie religieuse dans sa patrie elle y vécut plusieurs années avec une grande édification. Elle passa en Angleterre vers l'an 840, sous le règne d'Ethelwolf. Ce prince, connoissant sa sainteté, lui confia l'éducation de sa fille Edithe, et fonda pour elle le monastère de Pollesworth, près de la forêt d'Arden, au comté de Warwich. Ce monastère a subsisté jusqu'à la prétendue réforme, sous le nom de sainte Edithe, qui en avoit été seconde abbesse, et qui en étoit patronne.

Sainte Modwène avoit auparavant fondé deux célèbres abbayes de religieuses en Ecosse, dont l'une étoit à Sterling, et l'autre à Edimbourg; elle fit aussi plusieurs autres fondations pieuses en Angleterre.

Le désir de s'appliquer plus parfaitement à la sanctification de son ame, lui inspira le dessein de mener la vie anachorétique. Elle passa sept ans ⚫ dans une île de la Trent, qui s'appeloit Andresey, du nom de l'apôtre saint André, sous l'invocation duquel elle avoit dédié son oratoire.

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L'abbaye de Burton sur la Trent, fondée en 1004, fut dédiée sous le nom de la sainte Vierge et de sainte Modwène. On y apporta d'Andresey les reliques de notre sainte; et c'est pour cela, dit Léland, que le Monastère fut appelé Burton Modwenestow.

Voyez Pinius, un des continuateurs de Bollandus, t. II, Julii, p. 241; la Notitia monastica de Tanner, etc.

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