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cune n'a respecté davantage, et la volonté du Peuple, et les décrets de ses mandataires; aucune enfin n'a témoigné à la Commune de Paris une fraternité plus étroite et plus intime. Répétez donc, Citoyens, ce que vous avez déja déclaré: qu'au milieu même du Jeu de paume, sur ces murs sombres et nus, parés des souvenirs qu'ils rappellent, le Français et l'étranger lisent: Versailles a bien mérité de la Patrie.

Voici le projet de décret.

La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de ses comités d'Instruction publique et des Domaines sur la pétition des propriétaires du Jeu de paume de Versailles, décrète ce qui

suit :

ARTICLE PREMIER.

La maison du Jeu de paume de Versailles où l'Assemblée constituante a prononcé le serment du 21 juin 1789 est un domaine national.

Il.

Cette maison sera employée dans l'établissement de l'instruction publique, quand la Convention nationale en décrétera l'organisation.

III.

Le conseil exécutif provisoire est chargé de traiter, au nom de la Nation, avec les propriétaires du Jeu de paume, pour l'échange de cette maison

contre un bien national de même valeur, dans l'étendue du département de Seine-et-Oise.

IV.

La rente de quinze cents livres hypothéquée sur le Jeu de paume sera désormais hypothéquée sur le bien national cédé en échange.

V.

Sur les murs du Jeu de paume seront gravés ces mots: La Commune de Versailles a bien mérité de la Patrie.

La Convention adopte ce Décret, et ordonne l'impression du Rapport.

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DISCOURS

SUR L'INSTRUCTION PUBLIQUE.

Séance du 15 brumaire an II ( 5 novembre 1793, vieux style),

CITOYENS,

Vous cherchez, au milieu des orages révolutionnaires, les moyens de rendre le calme à la République; et, sans doute, le moyen le plus efficace est d'organiser l'Instruction, premier besoin de l'homme en société, première dette de la société envers ses membres. Quel est notre devoir, en organisant l'Instruction? c'est de former des Républicains; c'est encore de former des Français, de faire adopter à la Nation une physionomie qui lui soit propre et particulière; c'est enfin de songer à l'importance, à l'étendue, à la situation géographique de la France, à son influence sur l'Europe et sur le Monde, à l'intérêt puissant qui lui commande de perfectionner la raison publi

que, et d'accélérer les progrès de l'esprit hu

main.

Mais, au moment, Citoyens, où nous allons nous engager dans cette vaste et belle carrière, il faut marcher avec méthode. Il est nécessaire que chacun de nous se rende à lui-même un compte fidèle et précis de tout ce qui doit concourir à former l'établissement de l'Instruction publique; il est important de ne pas prendre une idée isolée pour un plan, ou les diverses parties d'un systême complet pour des systêmes différens. Nous ne devons pas plus bâtir à la fois toutes les parties de l'édifice; il faut bien nous garder de discuter simultanément des questions délicates qui sont liées par un ordre successif, que la nature même des choses nous indique d'une manière évidente.

Il est aisé de distinguer dans l'Instruction publique, quand on veut en saisir l'ensemble et ne pas confondre toutes les idées, trois parties qui concourent également à former l'homme en société : je veux dire la partie de l'enseignement, la partie morale, et la partie physique. La première développe les facultés intellectuelles. Aussi vaste que l'esprit humain, dont elle offre l'état de situation, elle recule chaque jour ses limites, et fait par lui de nouvelles conquêtes; elle embrasse tout ce qui peut se réduire en théorie. La se

conde s'occupe, pour ainsi dire, de l'éducation du cœur; l'enseignement n'est pas de son ressort. On enseigne les métiers, les sciences, les arts; mais les mœurs et la vertu s'inspirent. La troisième, appelée Gymnastique dans les républiques de la Grèce, comprend tous les exercices qui peuvent entretenir et augmenter la force ou la souplesse du corps.

C'est sous ce triple rapport, donné par l'essence de l'espèce humaine, que doit être considérée l'Instruction publique. J'avoue, Citoyens, que je n'ai pas été médiocrement surpris d'entendre quelques orateurs reprocher dans cette tribune à ceux qui ont déja parlé sur cette matière de ne vous avoir pas encore proposé un systême complet d'Instruction publique. Il est des hommes qui ne trouvent jamais un sujet vaste, par la raison qu'ils n'embrassent jamais qu'une très-petite partie de la matière, et qu'ils prennent cette petite partie pour l'ouvrage entier. Une seule observation peut suffire à ceux qui voudront concevoir l'étendue de l'institution dont il s'agit. Les philosophes qui ont consacré leurs travaux au perfectionnement de l'Instruction, et, certes, il n'est pas d'étude plus digne des méditations philosophiques, se sont tous circonscrits dans des bornes rigoureuses et resserrées. Aucun écrivain célèbre, chez aucune nation, n'a pu donner une

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