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PROCLAMATION

RELATIVE A LA JOURNÉE DU 1er PRAIRIAL.

Séance du 2 prairial an III (21 mai 1795, vieux style).

BRAVES PARISIENS!

C'EST en vain que les factieux voudraient organiser encore le massacre et le pillage. La Convention, inébranlable à son poste, forte de son courage et du vôtre, forte de la justice et de l'humanité, dont elle défend la cause contre les brigands et les assassins, saura les terrasser et les punir.

Braves Parisiens! la victoire n'est pas douteuse: vous combattez pour la République et vos familles; vous défendez la liberté, la propriété. Les rebelles qui, maintenant, délibèrent à la Commune sont mis hors la loi. Poursuivons-les dans ce vil repaire, où les derniers complices de Robespierre attendent sa destinée. Périssent les factions! guerre aux hommes de sang! vive la République! vivent les amis de la justice et des lois! eux seuls sont des Français; eux seuls sont des Républicains. (On applaudit.)

RAPPORT,

AU NOM DES COMITÉS DE SALUT PUBLIC ET DE SURETÉ GÉNÉRALE ET MILITAIRE,

SUR LES HONNEURS A RENDRE

A LA MÉMOIRE DU CITOYEN FERRAUD1.

Séance du 6 prairial an III (25 mai 1795, vieux style).

CITOYENS,

TANT qu'a duré le combat de la vertu contre le crime, de la liberté contre l'anarchie, de la jus

1. Nous avons pensé que le public ne lirait pas sans intérêt quelques détails historiques sur la mort du député Ferraud, assassiné au milieu de la Convention dans la journée du 1er prairial an III. On n'en contestera pas l'authenticité : nous les empruntons au Moniteur du tems. (Note de l'Éditeur.)

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« Des cris réitérés se font entendre dans la salle de la Liberté. « La force armée qui était dans l'intérieur de la Convention s'y porte: les délibérations sont suspendues pendant quel«ques instans. Le tumulte s'apaise peu à peu; mais bientôt les «< cris aux armes! aux armes ! se renouvellent dans le salon « de la Liberté : la force y court. Le président se couvre; la Un bataillon traverse la salle

« Convention reste calme.

tice contre l'assassinat, de la propriété contre le brigandage, vos comités de salut public, de sû

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« pour se rendre au lieu du trouble, en criant: Vive la République! Bientôt, les baïonnettes se croisant, un combat s'engage à la porte, qui a été brisée; des coups de fusil sont << tirés ils sont dirigés sur la Convention. Tous les membres <«< se lèvent en criant: Vive la République !— De nouveaux dé<< tachemens de la force armée traversent la salle. On remarque « parmi eux un homme qui porte sur son chapeau ces mots « écrits avec de la craie: Du pain, et la constitution de 93! << Il frappe ceux qui défendaient l'entrée de la salle. Bientôt. << il est saisi par Dubois Crancé et d'autres membres qui se << portent au lieu du combat. Il se débat et leur échappe; il « est ressaisi: on l'entraîne hors de la salle.

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« Des coups de fusil se font encore entendre: ils partent « du côté de la porte. Le combat dure quelques instans; enfin « la garde est forcée. Le représentant du peuple Ferraud, qui se trouvait à cette porte, conjurait ceux qui venaient <«< d'obtenir le succès de ne pas violer la représentation na<«<tionale. — Tuez-moi, disait-il, en découvrant sa poitrine; <«< tuez-moi, si vous voulez du sang; vous n'entrerez dans la « salle qu'après avoir marché sur moi. Il se jette par terre pour empêcher que la multitude n'entre: on passe sur son «< corps.

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« A trois heures trente- trois minutes, une foule nom« breuse de femmes et d'hommes, armés de fusils, de piques << et de sabres, entrent dans la Convention. Ils portent tous « écrit sur leurs chapeaux: Du pain et la constitution de 93! <«<et font retentir la salle de ces mêmes expressions. Ils prennent place sur les bancs qu'ils forcent les députés de «< céder. D'autres remplissent le parquet; s'arrêtent en face du président (M. Boissy d'Anglas). Un citoyen arrache à l'un << d'eux son chapeau sur lequel était l'inscription que nous

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reté générale et militaire, ont pensé qu'il fallait organiser la victoire, et non venir réveiller vos regrets, et solliciter des honneurs pour un martyr de la cause républicaine. Aujourd'hui la Patrie, en jouissant du triomphe qu'elle vient d'obtenir, peut songer à la perte qu'elle a faite. Il est permis de verser des pleurs magnanimes sur le champ de bataille où l'on a vaincu. Dans cette enceinte, y a trois jours, les meurtriers faisaient des lois. Un Représentant du Peuple est mort égorgé au pied de cette tribune. Quel était son crime? il

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• avons rapportée : la foule se précipite sur lui. Il s'élance à << la tribune; un coup de fusil part: il tombe sur les marches. « Aussitôt vingt sabres sont levés sur ce malheureux, et le frappent; on l'enlève, on le porte hors de la salle. C'est le << jeune citoyen Mally.

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<< Ferraud, qui était au pied de la tribune, se frappait la tête, et s'arrachait les cheveux. Dans le même moment, vingt fusils couchent en joue le président. - Ferraud, qui s'en aperçoit, veut escalader la tribune, pour l'aller couvrir de «son corps: un officier le soutient par le bras, et l'aide à << monter. L'un des séditieux le tire de son côté par son habit; l'officier, afin de lui faire lâcher prise, assène à cet homme

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un coup de poing sur la poitrine. Celui-ci, pour s'en venger,

tire un coup de pistolet, qui atteint Ferraud. Il tombe; on

s'en empare; on l'accable de coups; et on le traîne pår les cheveux jusque dans le couloir voisin.

<< Pendant tout ce tumulte, Boissy, la tête couverte, est impassible aux injures: il reste dans l'attitude du calme et « de la fierté, et ne paraît pas s'apercevoir du danger. Il invite << la Convention à observer le plus profond silence, etc., etc. » OEuvres anciennes. V. 16

avait voulu conserver la dignité de la Représentation nationale. La Liberté, un moment près de périr, survit à notre généreux collègue. Rendons grâces aux destinées de la République! Ferraud a fait son devoir; sa vie est pleine, puisqu'il est mort pour la Patrie. Faisons notre devoir comme lui, en imitant son héroïsme, en célébrant sa mémoire. Les honneurs décernés aux morts rendent les vivans plus vertueux.

N'oubliez jamais, Représentans, cette journée horriblement mémorable où la Convention nationale, outragée par des factieux, investie, forcée, envahie par une horde avide de sang et de pillage, a vu la majesté du Peuple foulée aux pieds, et la volonté du crime insolemment appelée loi dans le sanctuaire de la loi même. N'oubliez jamais ces cris séditieux, ces vociférations atroces, cette ivresse délirante et homicide, ce spectacle déplorable des Représentans du Peuple assis sur les mêmes bancs qu'usurpaient leurs bourreaux. Ayez toujours devant les yeux cette auguste assemblée, écoutant, dans un silence imposant et morne, les décrets d'une populace effrénée; quelques députés coupables se mêlant avec elle, la flattant avec bassesse, se croyant encore législateurs, quand il n'existait plus de législature; deux présidens',

1. Dans la même séance, le député Verneuil prit la place

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