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Avant que de fuivre du Perron dans le cours de fa vie, M. de Burigny cite cette anecdote tirée du Journal de Henri III,& la réfute.» Du Perron étant au » dîner du Roi fit un excellent difcours » contre les Athéiftes, & comme il y avoit un Dieu; ce qu'il prouva par » belles raifons: à quoi le Roi prit grand plaifir & l'en loua. Mais, ajoûte » l'auteur du Journal, du Perron dit au » Roi, j'ai prouvé aujourd'hui qu'il y a' » un Dicu: s'il plaît à Votre Majesté » me donner audience, je vous prou» verai par raisons auffi bonnes qu'il » n'y en a point du tour. Sur quoi le Roi entra en colère, chaffa ledit du » Perron, l'appella méchant, lui dé» fendant de fe plus trouver devant » lui. Il est conftant, ajoûte M. de Burigny, que cette hiftoire a en cours, » & qu'elle eft confirmée par ceux qui » n'aimoient pas du Perron. Le fatyri» que d'Aubigné afsûre dans fon Epitre » Dédicatoire de la Confeffion de San»cy, que le Roi Henri III fit taire du » Perron, & que l'Avecat-Général Ser» vin avoit en vue cette hiftoire, lorf que du Perron l'ayant traité d'ignorant,

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il lui répondit: Il est vrai, Monfieur, » que je ne fuis pas affez fçavant pour » prouver qu'il n'y a point de Dieu. Il » eft très-poffible que du Perron par va»nité & pour faire briller fa fcience & »fon éloquence ait pu avancer des thè fes indifcrètes. »

Ce fut du Perron qui fit la harangue que le Roi prononça devant les Etats de Blois, le Prince y fit quelques changemens & n'en prit que la fubftance. D'Aubigné afsûre qu'elle fut fort blâmée, & qu'elle étoit trop mendiante & trop longue pour un Roi, » Henri avoit dit dans cette harangue: Aucuns » Grands de mon Royaume ont fait des ligues & affociations; mais témoignant 22 ma bonté accoûtumée, je mets fous le "pied pour ce regard tout le paffe. Le » Duc de Guife & le vieux Cardinal de » Bourbon fe plaignirent au Roi de cette phrafe comme d'une injure per»fonnelle qui leur étoit faite, & le Roi » fe vit obligé de la faire fupprimer dans » la harangue qui étoit déja impri»mée...

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A la mort de Henri III, affaffiné à S. Cloud, du Perron s'attacha au Cardinal

de Bourbon; il eut l'art de s'in Ginuer dans les bonnes graces de Henri IV. Ce Prince le nomma à l'Evêché d'Evreux. Ce fut le nouveau Prélat qui lui donna des inftructions fecrettes lorfqu'il réfolut d'embraffer la Religion Catholique; il affifta à la cérémonie de fon abjuration à Saint Denis. Cette affaire fi glorieufe pour lui ne contribua pas peu à lui attirer la haine des Proteftans; la manière dont il fe montra dans l'affemblée des Miniftres Calviniftes & la force avec laquelle il terraffa Rotan qui avoit confondu auparavant les Docteurs Catholiques, en lui faifant beaucoup d'honneur, aigrirent encore certe haine.

Il fut envoyé à Rome pour négocier l'affaire de l'abfolution; on s'accorde à dire qu'il fe conduifit très-bien dans cette négociation importante, de concert avec le Cardinal d'Offat. » Il fe paffa dans la cérémonie de l'abfolution un fait qui excita beaucoup de » murmure en France. Les deux Procu»reurs du Roi étant à genoux devant le » Pape pendant qu'on chantoit le Mife

»rere, le maître des cérémonies donna » au Saint Père une baguette, de la» quelle il frappoit les épaules de du » Perron & d'Offat; ce qui étoit exprimé » en termes humilians pour le Roi & » pour fes Procureurs, dans le procès-ver» bal où il eft dit en termes exprès que, » tandis que les chantres entonnoient le » Pleaume Miferere, le Pape, à chaque

verfet, verberabat & percutiebat hu» meros Procuratorum & cujuslibet ip» forum,cum virgâ quam in manibus ha» bebat. D'Offat ayant vu ce procès» verbal, foutint que cette expreffion » étoit hyperbolique. Il ajoûte: C'est » une cérémonie du Pontifical, laquelle » nous ne fentions non plus que fi une » mouche nous eût paffé par deffus nos » vêtemens néanmoins à voir cette » écriture vous diriez que nous en du» mes demeurer tout épaulés. » Les excufes des Procureurs ne les juftifièrent pas. On fit contre eux des épigrammes & fur tout contre du Perron; telle est celle-ci.

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D'un fi léger bâton ne doit être battu
Le Perron à vos pieds lâchement abbatu;

Sa coulpe envers fon Roi eft par trop crimi

nelle;

Si la verge de fer que Chrift tient en fa main, Vous tenez en la vôtre, ô Vicaire Romain, Rompez lui tout d'un coup les reins & la cer• velle.

Cette Epigramme fut auffitôt traduite en vers latins qui valent mieux que les François.

Quid tenui hos humeros cædis, Romane, bacillo?

In tante hoc nimium eft crimine pæna levis. Si tibi qua Chrifti communis ferrea virga Debueras facrum hoc comminuiffe caput.

Du Perron parvint bientôt au Cardinalat. Ses Livres de controverfe mortifièrent beaucoup les Réformés, qui ne manquèrent pas dans les fatyres qu'ils firent contre lui de rappeller tout ce qui s'étoit dit au fujet de l'abfolution. Ce fut lui qui convainquit Dupleffis Mornay d'avoir cité prefque toujours à faux dans fon Livre contre la Meffe. » Non-feulement le Roi fe fervoit de lui dans les affaires impor

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