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solitude n'était pas éloignée d'Aureil. Il mourut d'une chute le 9 Avril 1130, à l'âge de quatre-vingts ans. Le Pape Célestin III le canonisa en 1194. On l'honore en ce jour à Aureil et à Meulan

Voyez son ancienne vie, écrite avec beaucoup d'exactitude et de sincérité. Elle a été publiée en latin par le P. Labbe, Bibl. Ms. t. II, et par Henschénius. Voyez aussi la vie du même Saint, par François de Blois, lieutenant-général de Meulan. Paris, 1652.

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+ LA VÉNÉRABLE MARIE CRESCENTIA, SUPÉRIEURE

DU COUVENT DE KAUFBEUERN.

Voyez l'histoire de sa vie par Joseph Placidi, et Simon Buchfelner et l'ouvrage allemand de Placide Braun, Vies de tous les Saints et Bienheureux du diocèse d'Augsbourg, p. 207 sq¶.

L'AN 1744.

CETTE digne servante de Dieu, qui fut si renommée durant sa vie dans la partie méridionale de l'Allemagne, et dont de nos jours encore on raconte tant de choses étonnantes, vit le jour le 20 Octobre 1682 à Kaufbeuern, dans le diocèse d'Augsbourg, et reçut dans le baptême le nom d'Anne, qu'elle changea, en prenant le voile, pour celui de Marie Crescentia.

Elle était fille de Mathias Höss, tisserand de son métier, et de Lucie Hörmann, estimés l'un et l'autre pour leur piété et leur grande probité. Sa mère était un modèle de charité envers les pauvres et les malades, et son père ne semblait vivre que dans la méditation de la pas`sion de notre Seigneur Jésus-Christ. Le feu de l'amour divin qui sortait du cœur de cet homme simple et pieux, embrasa de bonne heure la docile Crescentia, à qui cet adorable mystère se révéla peu à peu d'une manière étonnante. Voulant offrir à Jésus crucifié sa vie et son amour,

et subjuguer entièrement la chair, elle eut la force, étant encore enfant, de mêler des sucs amers à tout ce qu'elle mangeait, et de s'abstenir de toute nourriture qui n'était pas rigoureusement nécessaire pour se soutenir. Ce que cette pieuse mortification lui permettait d'épargner tournait au profit des pauvres, dans lesquels elle voyait avec une tendre vénération les biens-aimés du Seigneur.

Crescentia fut pour la maison de son père un véritable génie tutélaire, qui en écartait le mal, sous quelque forme qu'il menaçât d'y entrer, et savait conduire à la vertu tous ceux qui en faisaient partie.

Aspirant à s'unir tout entière à son céleste Époux, elle prononça de très-bonne heure ses vœux de chasteté, et ce sacrifice d'innocence fut si agréable au Seigneur, qu'il la combla des trésors de sa grâce, et que toute sa vie, comme on croit, elle n'éprouva pas la moindre tentation d'impureté. Elle fut néanmoins toujours attentive à étouffer en elle la voix des sens par la plus grande vigilance, la mortification et les castigations. Un cœur comme le sien brûlant de l'amour des anges, n'était-ce pas un autel sacré, sur lequel montaient vers le ciel les prières les plus ferventes et les plus doux parfums de dévotion? Souvent pendant le saint Sacrifice de la messe elle avait des ravissemens d'esprit. Chaque fois qu'elle approchait de la sainte Table elle sentait croître en elle son amour pour son divin Époux, et elle avait pris de bonne heure l'habitude de nourrir son ame du pain des anges les dimanches et jours de fête.

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En avançant en âge elle reconnut de plus en plus sa vocation, et sentit un attrait irrésistible pour la retraite du cloître. Un jour qu'elle priait devant un crucifix au couvent des religieuses du tiers ordre de saint François, et qu'elle était plongée dans ses méditations, elle entendit distinctement ces paroles: Voici le lieu de ta demeure.

T. V.

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La Providence lui offrit les moyens d'atteindre le but qu'elle lui avait montré; car le bourgmestre du lieu, qui, bien que protestant, était un grand protecteur de cette maison, la fit recevoir et paya les frais de son entrée. Elle prit l'habit en 1701, à l'âge de 20 ans, et rendit grâces au Seigneur, qui lui avait fait trouver un lieu de repos et l'objet de ses plus ardens désirs.

Crescentia avait joui jusqu'alors de la paix de l'ame la plus parfaite, elle n'avait pas encore passé par le feu des tribulations, que le Seigneur réserve cependant presque toujours à ses serviteurs, avant de les mener au plus haut point de perfection. La pieuse vierge devait avoir à son tour ses jours d'épreuve, et, nous regrettons de le dire, ce fut sa propre supérieure, ce furent les plus anciennes religieuses du couvent qui s'en firent les instrumens: elles la méprisaient à cause de sa pauvreté, elles l'abreuvèrent d'insultes et de mauvais traitemens, partout où elles en trouvèrent l'occasion. Se soumettant à la sainte volonté de Dieu, et songeant sans cesse à Jésus crucifié, elle se résigna, et les humiliations qu'on lui fit endurer ne devaient servir qu'à l'éléver devant le Seigneur. Elle sut résister aussi aux insinuations de l'esprit malin, qui la menaça et l'insulta par ces paroles « Misérable! tu es condamnée à » passer vingt-deux ans au milieu de ces tribulations, au » milieu des calomnies, des insultes et des persécutions » de tes sœurs. Ta charité, ta bienfaisance et ton humilité n'éprouveront de leur part que haine, oppression » et châtiment. Comment veux-tu si long-temps supporter >> tant de maux? » Inébranlable dans sa vocation elle répondit : « Je me félicite de pouvoir souffrir toutes ces choses » pour l'amour de Jésus-Christ. Ce n'est pas encore assez » de ces peines pour mon cœur. »

Bientôt la foi simple et naïve de Crescentia reçut une autre récompense. Les divins mystères se déroulèrent à ses

yeux; des ailes de colombes semblaient l'enlever à cette terre, et la porter au sein des vérités célestes; quand elle était plongée dans la contemplation de la très-sainte Trinité, elle s'épanchait en cantiques, qui semblaient appartenir aux concerts des anges.

La foi avait jeté de si profondes racines dans son cœur, que souvent on l'entendait dire : « Quand même j'en ver>> rais plusieurs, quand je les verrais tous abandonner la > foi, ma confiance en Dieu m'y ferait persévérer. »> Elle était tellement pénétrée de la présence réelle de JésusChrist dans le très-saint Sacrement de l'autel, que souvent, à l'exemple du saint Roi Louis, elle assurait, qu'elle n'ouvrirait pas les yeux pour les porter sur la sainte hostie, quand même le Sauveur se montrerait visiblement.

Souvent les ames pieuses, abîmées dans le Seigneur et cachées aux yeux du monde exercent une plus grande influence sur les événemens dont dépend le bonheur des hommes, que ne se l'imaginent les gens devenus étrangers à la piété. Chaque jour Crescentia priait pour le Chef de l'Église, pour tout le clergé catholique, pour les princes et toutes les autorités. Ses prières les plus ferventes elle les réservait aux grands pécheurs qu'on lui recommandait, et il arrivait souvent que sa ferveur, passait miraculeusement dans l'ame de ces hommes égarés, et, attendrissant leur cœur, les faisait retourner spontanément au Père de toute miséricorde.

D'après le vœu de son père spirituel elle approcha tous les jours de la sainte Table; ce qui fut non-seulement pour elle une source de consolation et de force, mais aussi pour les autres, à qui le feu de sa dévotion se communiquait involontairement. Malgré cela elle ne croyait pas encore avoir assez d'amour pour son Sauveur, et s'efforça, à l'exemple d'autres Saints, d'atteindre non-seulement le bien, mais le plus haut degré de perfection, et de se rendre de plus en plus agréable au Seigneur.

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Ses vertus étant généralement appréciées, on lui conféra les charges les plus importantes du couvent. Elle fut d'abord portière, et s'acquitta de cet emploi en joignant la prudence et la sévérité à la charité. Puis elle devint maîtresse des novices, et s'attacha à former des sœurs pleines de piété et de soumission à la volonté de Dieu. Enfin elle fut élue supérieure dans la même maison, où déjà son esprit de douceur s'était communiqué à tous les membres. Jamais supérieure ne mérita mieux ce titre. Donnant l'exemple de toutes les vertus, elle n'exigeait de ses filles spirituelles d'autres devoirs que ceux qu'elle s'était imposés à elle-même. Elle n'accueillait les plaintes qu'avec beaucoup de circonspection, et ne punissait personne sans l'entendre. Quand la sévérité était nécessaire, elle devait servir à corriger la coupable. Toutes ses actions étaient empreintes d'une douceur, d'une sérénité qui adoucissait ce qui aurait pu paraître trop austère. Ses ordres ressemblaient à des prières, de sorte que ses paroles ne rencontrèrent jamais d'opposition dans les esprits. Elle savait sur-tout dissiper la mélancolie dans les autres : dès qu'elle voyait quelque sœur en proie à la tristesse, elle la menait au Seigneur, afin qu'elle cherchât en lui la source de toutes les joies.

Tandis qu'elle faisait régner l'amour et la concorde dans sa propre maison, sa voix plus d'une fois fit rentrer la paix dans la grande maison de Dieu au dehors. Des cardinaux et des évêques lui témoignèrent leur estime et leur considération, et l'Impératrice Marie-Thérèse elle-même, dans des affaires de haute importance, eut quelquefois recours à son conseil. Croirait-on que cela n'empêcha pas la servante de Dieu de s'élever au plus haut degré d'humilité, de se méfier de sa propre sagesse, et d'observer envers son confesseur l'obéissance la plus absolue?

Enfin elle tomba malade, à l'âge de soixante-deux ans ;

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