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La nouvelle de son retour ne se fut pas plus tôt répandue, que les habitans de Prague sortirent en foule pour aller au devant de lui. Ils le reçurent avec de vives démonstrations de joie, et lui promirent de se conformer à toutes ses instructions; mais ils oublièrent bientôt leurs promesses. Le Saint résolut donc de les abandonner pour toujours. En retournant dans son monastère, il prêcha l'évangile dans la Hongrie. On compte parmi ceux qu'il gagna à Jésus-Christ, le Roi Etienne, qui depuis se rendit recommandable par sa sainteté. Quelques auteurs mettent cette mission en Hongrie six ans plus tôt, c'est-à-dire, au temps où le Saint quitta son diocèse pour la première fois.

Lorsqu'Adalbert fut rentré dans son monastère, l'abbé Léon lui donna la charge de prieur. Il s'en acquitta avec beaucoup de zèle et d'humilité. L'Empereur Othon III étant à Rome, lui faisait de fréquentes visites. Il prenait tant de plaisir à s'entretenir avec lui, qu'il eût voulu ne quitter jamais sa compagnie.

Le Pape Grégoire V, successeur de Jean XV, renvoya encore une fois Adalbert à son église. Il y avait été déterminé par les pressantes sollicitations de l'archevêque de Mayence. Le Saint obéit au Souverain-Pontife, quoiqu'il prévît bien l'inutilité de la démarche qu'on lui faisait faire. Ses diocésains, loin de se disposer à le recevoir comme auparavant, entrèrent en fureur quand ils apprirent la nouvelle de son retour. Ils ne s'en tinrent pas là, ils massacrèrent unanimement plusieurs de ses proches, pillèrent leurs biens, et mirent le feu aux châteaux qui leur appartenaient. Adalbert, informé de tout ce qui s'était passé, quitta la route de Prague, et se rendit auprès de Boleslas son ami, fils de Micislas, duc de Pologne. Ce prince envoya quelque temps après des députés aux habitans de Prague, pour leur demander s'ils voulaient recevoir Adalbert comme leur évêque, et s'ils étaient résolus de lui obéir. T. V. 26

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Ils répondirent, avec un ton moqueur, qu'ils ne méritaient pas d'avoir un si saint évêque, et qu'ils étaient trop méchans pour qu'il pût vivre avec eux. « Au reste, ajoutè>> rent-ils, nous sentons l'artifice des propositions que l'on » vient nous faire. Ce n'est rien moins que le zèle de notre » salut qui anime Adalbert: son unique dessein est de ven» ger la mort de ses proches, il doit donc s'attendre à être » mal reçu.

Après une telle réponse, le Saint comprit qu'on ne le souffrirait pas dans le diocèse de Prague; il résolut donc de travailler à la conversion des idolâtres de la Pologne. Il eut la consolation d'en voir un grand nombre embrasser le christianisme. Il passa ensuite avec Benoît et Gaudence, tous deux compagnons de ses travaux apostoliques, dans la Prusse, qui n'avait point encore été éclairée de la lumière de l'évangile. Ses prédications eurent un très-heureux succès à Dantzig. La plupart des habitans de cette ville renoncèrent à leurs superstitions, et se firent baptiser. De Dantzig, le Saint passa dans une petite ile, où les infidèles l'accablèrent d'outrages. L'un d'eux le prit par derrière lorsqu'il récitait le psautier, et lui déchargea un coup d'aviron avec tant de violence, qu'il le renversa par terre à demi-mort. Adalbert étant revenu à lui, rendit grâces à Dieu de l'avoir jugé digne de souffrir pour la cause de Jésus-Christ. Il alla dans un autre endroit, où il ne fut pas mieux reçu; on lui ordonna même, sous peine de mort, de partir au plus tard le lendemain.

Adalbert, accompagné de Benoît et de Gaudence, se retira conformément à l'ordre qu'on lui avait donné. Enfin, épuisé de fatigues, il s'arrêta quelques momens près de Fischhausen (1), pour prendre un peu de repos. Les

(1) Petite ville de Prusse, avec un château, dans la province de Samland, sur la baie appelée Curisch-Haff, à cinq lieues de Koenigsberg, bâtie en 1269 par l'évêque de Samland. Note de l'édit. allem.

infidèles s'en étant aperçus, accoururent vers lui, se saisirent de sa personne, ainsi que de celle de ses deux compagnons, et les chargèrent de chaînes tous les trois. Adalbert offrit sa vie à Dieu par une prière fervente, dans laquelle il demanda le pardon et le salut de ses ennemis. Le prêtre des idoles le perça de sa lance, en lui disant par dérision: « Vous devez vous réjouir présentement, puisque, à vous entendre, vous ne désiriez rien tant » que de mourir pour votre Christ. » Six autres païens lui portèrent aussi chacun un coup de lance. Ce fut ainsi qu'il consomma son glorieux martyre le 23 Avril 997. Ses bourreaux lui coupèrent ensuite la tête, qu'ils attachèrent au haut d'un pieu. Benoît et Gaudence furent emmenés en captivité.

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Boleslas, qui fut depuis duc de Pologne, racheta le corps du Saint, qu'on déposa dans l'abbaye de Tremezno ; on le porta l'année suivante dans la cathédrale de Gnesne où il est exposé à la vénération des fidèles. Dieu a glorifié son serviteur par un grand nombre de miracles. Dans le catalogue des reliques qui se gardent au palais électoral de Hanovre (1), il est parlé d'une châsse précieuse qui contient une portion de celles de saint Adalbert. Ce Saint a le titre d'apôtre de Prusse, quoiqu'il n'ait planté la foi que dans la ville de Dantzig (2).

(1) Ce catalogue fut imprimé à Hanovre en 1713, in-fol.

(2) Les habitans de la Prusse, Sarmates d'origine, étaient les plus sauvages de tous les païens du nord. Ils se souciaient peu de la beauté des temples; ils adoraient leurs idoles sous des chênes, et leur immolaient les prisonniers faits sur l'ennemi. Après le martyre de saint Adalbert, trois Rois de Pologne, nommés Boleslas, essayèrent inutilement de les soumettre. Enfin les chevaliers teutoniques conquirent leur pays en 1239, et leur procurèrent des missionnaires qui les instruisirent dans la religion chrétienne. Voyez les Mémoires sur la maison de Brandebourg, parle Roi de Prusse, p. 36 et 264. On lit dans le même ouvrage,

loc.

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S. FÉLIX, PRÊTRE, S. FORTUNAT ET S. ACHILLÉE, MARTYRS A VALENCE, EN DAUPHINÉ.

L'AN 211 OU 212.

Ces trois Saints allèrent prêcher l'évangile à Valence en Dauphiné, par l'ordre de saint Irenée de Lyon, dont ils étaient disciples. Leur constance et leurs miracles ajoutérent une nouvelle force à leurs discours. Ils convertirent un grand nombre de païens. Ayant été arrêtés pour la foi, ils furent condamnés à mort par un officier nommé Corneille, qui faisait à Valence la fonction de juge. Leur martyre arriva, selon l'opinion la plus probable, en 211 ou 212. On bâtit une église à l'endroit où ces Saints avaient été enterrés. Leurs reliques furent depuis transférées dans la cathédrale de Valence, qui en donna dans la suite une portion considérable à un seigneur de la maison de Boucicaut, lequel les déposa à Arles, dans l'église des religieux de la Sainte-Trinité. Ce qui restait à Valence de ce précieux dépôt, fut brûlé et dissipé par les calvinistes, vers la fin du seizième siècle : mais l'église de cette ville vit revenir au milieu d'elle, il y a quelques années, une petite partie des reliques qui étaient à Arles, et on les y vénère avec beaucoup de dévotion dans la chapelle de l'Hôtel-Dieu. Saint Félix, saint Fortunat et saint Achillée font nommés dans les plus anciens martyrologes latins, sous le 23 Avril, jour auquel on les honore à Valence; mais leur fête ne se célèbre à Arles que le 24 du même

mois.

cit., que la conversion du Brandebourg fut commencée par le zèle de Charlemagne, et achevée en 928 sous Henri l'Oiseleur, qui soumit entièrement le pays.

Voyez Tillemont, t. III, p. 97 et 628; Baillet, sous le 23 Avril, et sur-tout M. de Catellan (1), Antiq. de l'église de Valence, 1724, in-4o.

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GÉRARD naquit à Cologne de parens distingués par leur naissance. Il se consacra de bonne heure aux exercices de la piété et de la pénitence; il entra ensuite dans la communauté des cleres qui desservaient la cathédrale de Cologne, et qui suivaient la règle des chanoines réguliers (2). Ayant été chargé de l'emploi de cellérier, il s'en acquitta avec beaucoup de sagesse. Il était singulièrement estimé à la cour de l'Empereur, tant à cause de son mérite que de ses rares vertus.

Après la mort de Gauzlin, évêque de Toul, arrivée au commencement de l'année 963, Gérard fut élu pour lui succéder, par Brunon, archevêque de Cologne, duc de Lorraine, et premier ministre de l'Empereur Othon son frère. Il accepta cette dignité par obéissance à ses supérieurs, mais il ne diminua rien de sa première ferveur. Chaque jour il récitait treize heures canoniales, joignant l'office des moines à celui des chanoines, par une dévotion

(1) Jean de Catellan parle, dans les Antiquités de son église, comme un père tendre parlerait à ses enfans. Partout il annonce le plus grand zèle pour la conservation du dépôt de la foi; partout il se montre pénétré de cet esprit de piété qui le caractérisait. Il mourut, généralement regretté de son troupeau, au commencement de 1723, après vingt ans d'épiscopat. Il était de Toulouse, et sortait d'une famille distinguée dans la robe, laquelle a donné au milieu de ce siècle un évêque à l'église de Rieux.

(2) Il paraît que cette règle était celle de saint Chrodegand, ou du concile d'Aix-la-Chapelle.

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