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vous mettre immédiatement en mesure de connaître le terrain sur lequel vous aurez à agir, pour me soumettre, le 17 au matin, le projet d'action. C'est une question que le général Bosquet a été en position de préparer, et dont il vous remettra les données. Vous irez recevoir de ce général le commandement demain, à deux heures de l'après-midi, et vous vous installerez au quartier général actuel du 2° corps, dont l'emplacement est

connu.

« Vous enverrez demain de très-bonne heure votre chef d'état-major s'aboucher avec le général de Cissey, afin d'en recevoir tous les renseignements qui devront assurer l'heureuse continuation des attaques et de tous les services.

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Le sous-chef d'état-major du 2° corps, le commandant Henry, restera avec le colonel Vaudrimey jusqu'après le succès de l'assaut. Vous inviterez M. l'intendant du corps de réserve à se rendre auprès de M. l'intendant de Molines, demain matin de très-bonne heure, pour prendre la direction des services administratifs du nouveau corps d'armée placé sous vos ordres, afin d'être en mesure de satisfaire à tout ce qu'exigent les circonstances, comme ambulances, distributions, etc.

« Les compagnies du génie engagées dans les travaux de siége y resteront. Vous aurez sous vos ordres, pour l'attaque sur Malakoff, MM. les généraux Frossard, du génie, et Beuret, de l'artillerie. »>

LXII. Dès que le général Regnaud de Saint-Jean

d'Angély reçut ces instructions qui lui donnaient le commandement des attaques, il se rendit aussitôt (le 15 au soir) chez le général Bosquet, et lui communiqua la lettre qu'il venait de recevoir. Comprenant, sans nul doute, le sentiment qui devait être au fond du cœur du général, il lui assura, avec une netteté qui ne permettait pas de doute, qu'aucune démarche de sa part n'avait motivé cette résolution, dont il venait seulement d'être instruit par les instructions que lui adressait le général en chef.

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Le 16, le général Regnaud de Saint-Jean-d'Angély vint prendre le nouveau commandement dont il était investi, et le général Bosquet, après lui avoir donné tous les renseignements utiles à l'attaque projetée, fruit de ses observations de chaque jour et de ses longues et profondes méditations, descendit dans la plaine et alla établir son quartier général sur les monts Fédiukines, occupés par les divisions Canrobert et Camou, et par la 1 division du corps de réserve, sous les ordres du général Herbillon.

Dès son arrivée, le général Bosquet alla visiter les différents emplacements de ses troupes et ceux des armées alliées (1); puis, prenant avec lui une forte escorte de chasseurs d'Afrique, ses aides de camp et deux officiers de son état-major, il poussa une reconnaissance un peu au delà de la position avancée des Sardes, dans

(1) L'armée sarde était à cheval sur un affluent de la Tchernaïa, la hauteur de Tchergoun; les Turcs s'étaient portés sur les bois avoisinants, que l'on appelait bois de la Tchernaïa.

le but d'étudier à fond le terrain et de pouvoir s'entendre avec le général de La Marmora, dans le cas où le mouvement offensif vers Mackenzie serait ordonné.

De son côté, le général Regnaud de Saint-Jean-d'Angély allait avec les chefs du génie et de l'artillerie, Frossard et Beuret, prendre connaissance du terrain et reconnaître les tranchées, ainsi que les abords de la place. Il réunissait ensuite à son quartier général les trois généraux commandant les divisions désignées pour l'assaut, et arrêtait le projet d'attaque.

LXIII. Cette attaque se composait de trois colonnes assaillantes, composées des divisions Mayran, Brunet, et de la division d'Autemarre, qui, revenue de l'expédition de Kertch à son ancien campement de l'attaque de gauche, dans les journées des 14 et 15 juin, se rendait, le 16 au soir, à l'attaque Malakoff.

La division Mayran devait sortir du ravin du Carénage, longer la berge gauche du ravin, se prolonger vers la droite, et attaquer avec sa 1o brigade la batterie de la pointe tournée par sa gorge, tandis que la 2° brigade, commandée par le général de Failly, dirigerait tous ses efforts sur la droite du Carénage, appelée le petit Redan. Sur la demande du général Mayran, le 1er régiment des voltigeurs de la garde lui avait été adjoint comme réserve, l'effectif de sa division étant trèsréduit.

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La division Brunet, qui formait la division du centre, avait une brigade, dans la tranchée en avant, et à droite

de la redoute Brancion, l'autre dans la parallèle en arrière, et devait entrer par la courtine, entre Malakoff et le petit Redan, attaquant à droite la face droite du petit Redan, à gauche la face gauche de Malakoff.

La division d'Autemarre devait arriver par le ravin de Karabelnaïa, tenant ses deux brigades, l'une en avant et à gauche de la redoute, l'autre dans la parallèle en arrière; cette colonne avait mission de pénétrer par la batterie Gervais, placée à droite de Malakoff, à mi-côte, et d'envahir la courtine qui, reliant la batterie à Malakoff, descendait dans le ravin de Karabelnaïa vers le grand Redan.

Ces trois attaques devaient s'opérer simultanément et se prêter l'une l'autre un puissant appui. Deux batteries d'artillerie attelées étaient placées en arrière de la redoute Brancion, prêtes à être portées immédiatement sur les positions ennemies aussitôt que les troupes s'en seraient solidement emparées.

Tel était le plan de cette attaque importante, qui allait, selon l'espérance des généraux en chef, porter un coup décisif à la ville assiégée.

Les Anglais devaient dans le même moment s'emparer du grand Redan, contre lequel s'étaient dirigés tous leurs efforts depuis le commencement du siége. Les 2 et 4 divisions légères, sous les ordres du lieutenant général Brown, formaient trois colonnes. - La droite attaquait la face gauche du Redan; la gauche se jetait contre l'angle rentrant formé par la face droite et le flanc de l'ouvrage; le centre, qui ne devait com

mencer son attaque qu'après le mouvement bien prononcé des deux ailes, marchait contre l'angle saillant. Le 17, au matin, le feu de nos batteries écrasa la place. C'était surtout sur les points dont on devait s'emparer le lendemain de vive force, qu'étaient dirigées toutes les ressources de notre artillerie.

Dans la journée, Malakoff et le grand Redan paraissaient avoir considérablement souffert, ce que l'on devait du moins supposer, non-seulement par les dégradations apparentes, mais aussi, par la diminution sensible du feu de l'ennemi. L'événement ultérieur prouva que celui-ci, prévenu, sans nul doute par les espions ou les déserteurs, de nos projets d'attaque pour le lendemain, ménageait ses batteries et réservait ses feux.

LXIV. On était à la veille de l'assaut; et, comme il arrive toujours pour les événements d'une haute et décisive importance, l'impatience, l'inquiétude, l'enthousiasme du combat dévoraient les esprits.

A sept heures, il y eut un grand conseil chez le général en chef de l'armée française. A ce conseil assistaient le général Niel, commandant le génie du siége; les généraux Thiry, Beuret, Dalesme, Frossard; les généraux de division Mayran, Brunet, Regnaud de Saint-Jean-d'Angély et d'Autemarre. Sir Harry Jones, général commandant le génie anglais, avait été appelé au sein du conseil. Dans cette séance furent arrêtées les dernières dispositions. Sur la demande des généraux commandant les colonnes d'assaut qui craignaient que le mouvement

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