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Que fon goût pour la France ici vient de conduire,
J'ai fuivi le Marquis en qualité d'ami;
Officier de Huffard, plus craint que le tonnerre

Je brave les faifons ; quand je can pe la nuit,

Le ciel feul eft ma tente, & la terre eft mon lit; Mon fabre & mon courfier font tout mon train de

guerre :

Je joins à la valeur, la fuite & les détours ;
La retraite pour moi devient une victoire;
J'illuftre le pillage, & j'en tire ma gloire ;
J'imite, en ravageant, un torrent dans fon cours;
Je ne me laifle jamais joindre,

Pour être sûr de vaincre & d'impofer des loix,
J'évite le grand nombre, & j'attaque le moindre;
J'enleve des Partis, je pille des Convois,

Et je répands fouvent l'allarme Sans poudre ni canon je livre des affauts

;

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Et n'ayant que ce fer pour arme;

Je force une muraille, & je prens des Châteaux; J'emporte tout dans mon passage;

Je fais couler le fang de toutes parts, Rien n'arrêté non bras ; je brûle, je faccage; Je ravis, je détruis, je massacre, & je pars.

Il prend la fuite.

CRISPIN.

Arrêtez-vous; fied-il, après tant de carnage;

De battre la retraite, intrépide Héros.

FINETTE.

La valeur d'un Huffard eft de fuir à propos;

CRISPIN.

Et celle des Crifpins, dont j'ai fuivi la trace;
Eft toujours de fermer les chemins aux Huffards:
Je ne leur fais aucune grace,

Et je tombe fur les fuyards;

Avec ce fier courage, & cette noble audace,
Si naturelle à tous ceux de ma race.
FINETTE à part.

1

Je fçai qu'il eft poltron, feignons d'avoir du cœur
Pour foutenir mon rôle, & pour lui faire peur.
A Crifpin, mettant le fabre à la main.

Dans ma fuite toujours, malheur à qui m'arrête;
Garde-toi d approcher, ne retiens plus mes pas,
Ou, par la mort, avec ce coutelas,
Je te ferai l'honneur de te trancher la tête.

CRISPIN.

Ma tête me fied bien, & nous la défendrons;
Mais, croyez-moi plûtôt, ensemble compofons.
Par un feul mot, daignez me satisfaire
Sur une question que je m'en vais vous faire.

FINETTE.

Je n'écoute jamais qu'après m'être battu.

C

CRISPIN.

CRISPIN.

Et moi, je ne me bats, qu'après être entendu.
Seigneur Zafki votre fierté m'étonne,

Et fi vous êtes brave, autant que l'eft votre air, Non, vous n'êtes plus la perfonne

Pour qui d'abord je vous prenois.

Vous en avez pour tant la voix comme les traits. Auriez-vous une fœur ?

J'aurois en ce cas

FINETTE.

Non, je fuis fils unique.
CRISPIN.

là regret de vous tuer;
Et ce difcours me laiffe fans réplique,

Je ne fçai plus comment vous bien évaluer.
Le Marquis appelle dans la couliffe.

Zaski!

CRIS PIN.

L'on vous appelle, & nous nous retirons,

Nous obfervons en tout l'exacte bienséance. Adieu, Huffard charmant; mais douteux dans le fonds;

Je n'ai fait avec vous qu'ébaucher connoiffance, Je me flatte dans peu que nous nous reverrons; Vous parlerez alors ou nous feraillerons.

Il fort.
D

J

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E te cherche par tout, & ma joye est parfaite.
Je viens l'épancher dans ton fein;

Tu ne dois plus être inquiete.

Tout a favorifé mes vœux & mon deffein:

Eh bien une autre fois m'en croiras tu, Finette?

Tu vois qu'ils ont un fuccès plein.

Dis, parle, comme moi n'es tu pas
fatisfaite,
De la reception qu'ici l'on nous a faite?
Ma rivale eft fur-tout dans une bonne foi,

Qui me ravit autant qu'elle m'étonne:

Elle m'époufera fans peine, je le voi;
Elle a déja du goût pour ma perfonne;
Mais dans le fonds la chose est trop

fonne.

bou

Partage mes tranfports, & ris-en comme moi.

FINETT E.

Je ne fcaurois. Crifpin, puifqu'il faut vous l'ap

prendre....

LAURE.

Finette, rens auffi juftice à mes talens.
Conviens, avoue en même tems

Que des yeux bien plus fins auroient pû s'y mé

prendre.

N'ai-je pas bien joué le rôle de Marquis ?
Attrapé tous ces airs difficiles à prendre,
Penchés avec aifance, & décemment hardis?
FINETT E.

Moi, j'ai fait le Huffard au mieux, dont bien m'a

pris;

Sans quoi Crifpin qui me foupçonne...

LAURE.

Laiffe-là ton Crifpin.

FINETT E.

Le péril me talonne.
LAURE.

Pour trois heures de tems que nous ferons ici,
Ne va pas dans l'efprit, te mettre ce fouci,
Parlons uniquement de ce qui m'intereffe.
Tu viens de voir cette Comteffe

Dont la beauté fait du bruit à Paris,
Mérite t'elle cette gloire ?

Et complaifance à part, là, qu'en penses tu, disa
Eft-elle digne, à ton avis,

D'obtenir fur moi la victoire?

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