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MONTVAL.

Je n'exerce cet art que dans un cas pressant,

CHAMPAGNE,

Il guérit fans remede.

LISETTE.

Et fans prendre d'argent.

CHAMPAGNE, bas à Lifete.

Cet article eft de trop. Nous n'avons pas le dou ble.

LA MARQUISE.

C'est agir noblement. Mon eftime redouble. J'attens tout de votre art, & j'implore vos foins, Mais je vous veux, Monfieur, confulter, fans témoins.

MONTVAL, à Champagne,

Paffez dans l'antichambre.

LA MARQUISE.

Eloignez, vous, Lisette.

Lifettech Champagne fortent,

SCENE III.

LA MARQUISE, MONTVAL,

R

LA MARQUISE.

Ien n'eft égal, Monfieur, à ma peine fe

crette.

MONTVAL.

Madame me paroît délicate à l'excès.

LA MARQUISE.

Oui, je le fuis au point qu'on ne le fut jamais. Car un rien m'incommode, & deux fois la femaine

J'ai fans compter ma toux, une horrible migraine,
Et des maux d'eftomac qui m'attaquent le cœur,
L'anéantiffement fuccede à la douleur.

Je fuis dans des états fi fâcheux & fi rudes,
Des malaises fi grands, & des inquietudes;
Oh! Pour les concevoir, il faut les reffentir;
Et ce font de ces maux qu'on ne peut définir.

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Le votre tient beaucoup de la vapeur, Madame. Quand ce poifon fubtil s'eft gliffé dans une ame, La diffipation peut feule l'en ôter.

I

Tous les autres fecours ne font que l'irriter.

Quels font vos goûts : Le jeu, les fêtes, la M. fique?

Oüi.

LA MARQUISE

MONTVAL.

Suivez tour à tour le plaifir qui vous pique,
N'en épuifez aucun, mais éfleurez les tous.
LA MARQUISE.

Avec un Médecin auffi charmant que vous
On eft flatté, Monfieur, ravi d'être malade.
MONTVAL.

Sans doute vous aimez auffi la promenade ?
LA MARQUISE.

Fort, quand le jour eft beau, que le monde est brillant.

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LA MARQUISE

Beaucoup. Sur-tout la Tragedie
MONTVAL.

Volez vîte à Paris, & vous ferez guérie,
Son féjour est pour vous une néceffité,
Ses plaisirs variez vous rendront la fanté,
Pourvû qu'inceffamment l'un à l'autre fuccede.
LA MARQUISE.

'Ah! Monfieur, je le fens, il n'eft que ce remede;
Et perfonne avant vous n'avoit connu mon mal.
L'air de Paris pour moi vaut mieux que l'air natal,
Que ne puis-je demain fuivre votre ordonnance?
Mais un deftin fatal fixe ici ma prefence.

J'aime beaucoup mon frere, & ma niéce encor plus.

Par leur état préfent mes pas font retenus.
Tous deux font confumés d'une langueur obfcure,
On en peut d'autant moins pénétrer la nature,
Qu'ils ne rompent jamais un filence fatal.

MONTV A L.

Mais leur trifteffe a t'elle un caractere égal?
LA MARQUISE.

Non, elle eft differente, autant qu'elle eft profonde.

La douleur de mon frere eft noire & toujours, gronde.

Le chagrin de ma niéce eft plus attendriffant. S'il éclate à nos yeux, ce n'eft qu'en gemiffant. Dans fon abbatement elle a même des charmes. On fe fent jufqu'au cœur pénétrer de fes larmes,

MONTVAL.

Le feul récit fur moi produit le même effet. J'ai peine à retenir les miennes en fecret. J'ai, quoique Médecin, l'ame infiniment tendre. Mais pour vous confoler, je veux bien vous apprendre,

Que déja je démêle, & fuis prêt à faifir

La caufe de fon mal.

LA MARQUISE

Pourtez-vous l'en guérir?

MONT VAL.

J'y compte, je puis même en faire la promeffe, *Pourvû que vos bontés fecondent mon adresse Madame, c'est de-là que dépend le fuccès.

Me le promettez-vous ?

LA MARQUISE.

Oui, je vous le

promets,

MONTV A L.

Je n'en répons au moins que fur votre parole.
Tenez-la bien; mon art ne fera pas frivole.
LA MARQUISE

Je donnerois mon fang pour conferver fes jours.

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