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Cette brufque arrivée auroit pû nous furprendre.

CHAMPAGNE.

Mais vraiment la malade eft en bonne fanté;

Les Medecins de Pruffe ont de l'habileté.

Sa guérifon eft prompte:

LISETTE.

Elle l'eft trop peut-être,

Et je crains les foupçons qu'elle peut faire naître.
Pour donner à la chofe un air de vérité,
Il faut qu'elle paroiffe avoir moins de gaité;
Et qu'elle joue encore un peu plus la malade.
MONTVAL.

Pour mieux accrediter ici ma mascarade,
Je vais de mon côté jouer le Charlatan;
Belle Lucile, il faut vous prêter à mon plan,
Et m'aider......

Parlez.

LUCILE.

Volontiers. Que faut-il

MONTV A L.

que je faffe?

Dans ce fauteuil remettez-vous de grace. Si-tôt que la Marquife, & Cléon paroîtront, Feignez d'être plongée en un fommeil profond.

CHAMPAGNE,

Vous pouvez tout rifquer dans votreemploi fublime, On a pour Monfieur Bromps une fi haute estime, Qu'en faveur de fon nom tout palle....

LISETTE.

Monfieur Bromps !

Que dit-il ?

CHAMPAGNE.

C'est mon Maître, & moi je fuis Kolfquil. Un nom bien étranger rend plus confidérable: Plus il eft oftrogot, plus il eft refpectable. Madame a fait tout haut votre éloge à Cléon; Tant mieux, la Médecine eft un vrai faraon ; Pour y faire fortune, il faut qu'on y hazarde.

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MONTVAL.

On monte, dormez bien, le reste me regarde.

SCENE VII.

LUCILE, MONTVAL, CLEON, LISETTE, CHAMPAGNE.

JE

CLEON au fond du Théâtre.

E veux rendre la joye à toute la maison, Faire rire Lucile, égayer le Baron:

Mais je vois là quelqu'un qui reffemble à Lisette.

LISETTE.

Oui, c'est-elle, Monfieur, votre fanté ?

CLEON.

Et celle de Lucile ?

Parfaite.

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Un peu mieux ce matin.
Vous la voyez qui dort. Voilà fon Médecin.
CLE' ON.

Mais pour une malade, elle est affez vermeille.
LISETTE.

Pardon, plus bas. Je crains que le bruit ne l'é-
veille.

MONTVAL.

Rien ne peut interrompre un fommeil fi parfait;
Il ne finira pas qu'il n'ait eu fon effet.

CLE' ON.

Durera-t-il long-tems?

MONTVAL.

Mais une heure & demie.

CLE' ON.

Qu'elle eft belle en dormant ! Et comme elle eft
grandie!

Plus je la vois de près, plus j'en fuis enchanté:
Comment eft-elle donc, lorfqu'elle eft en fanté?
Elle charme les yeux, quand même elle repose;
Que fera-ce, éveillée?

MONTVAL.

Eloignez-vous pour cause :

Il est très-dangereux d'en approcher fi fort;

Mon remede à préfent fait fon plus grand effort

Vous prendriez fon mal.

CLEON.

J'entens ce badinage.
MONTVAL.

D'honneur il eft mortel aux hommes de votre

âge.

CLEON.

J'en veux courir le rifque, & fi je ne craignois
D'eveiller la malade, ah ! je l'embrasserois !

MONTVAL.

Ne vous y jouez pas.

CLEON.

Au péril de ma vie,

Et je brave la mort, quand elle eft fi jolie.

Mais de ce mal, Monfieur, que vous craignez

pour nous,

Dites, n'avez-vous rien à redouter pour vous ?

MONTVAL.

J'ai des prefervatifs, Monfieur, pour m'en dé

fendre ;

Le mauvais air fur nous n'ose rien entreprendre :
Il attaque d'abord ceux qui viennent de loin.
LISETT E.

Pour moi je ne crains rien pourvû que votre foin;
Comme on doit l'efpérer, fi cela continuë,
Nous la rende bien-tôt telle que je l'ai vue.

CLEON.

Qu'on me la donne à moi telle que je la voi,
Je m'en contenterai, je fuis de bonne foi.
MONTV A L.

Ah! Quel feu furprenant dans vos yeux étincele!
Votre cœur eft frappé d'une atteinte mortelle.
CLEON.

Monfieur le Médecin vous êtes connoiffeur.

MONTVAL.

Je me connois fur-tout aux mouvemens du cœur,
Et c'eft à les regler que mon art s'étudie: "
La Médecine vraie eft la Philofophie:
Il faut, des paffions, arrêter le progrès;
La mauvaise santé provient de leurs excès.
C'eft la fageffe en tout, Monfieur, qui fait la
bonne.

CLE'ON.

C'est le temperament plûtôt qui nous la donne. L'honnête homme a fouvent quelque incommo

dité,

Et je vois des coquins qui crevent de santé.

LISETTE.

Trop de vertu maigrit.

Tout excès eft contraire,

MONTVAL.

Même celui du bien; mais il ne regne guere,

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