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2. Elle doit être organisée pour défendre la République contre les ennemis extérieurs, et assurer au dedans le maintien de l'ordre, et l'exécution des lois.

3. Il pourra être formé des corps soldés, tant pour la défense de la République contre les ennemis extérieurs, que pour le service de l'intérieur de la République.

4. Les citoyens ne pourront jamais agir comme corps armé, pour le service de l'intérieur, que sur la réquisition et l'autorisation des officiers civils.

5. La force publique ne peut être requise par les officiers civils, que dans l'étendue de leur territoire. Elle ne peut agir du territoire d'une commune dans une autre, sans l'autorisation de l'administration du département, et d'un département dans un autre, sans les ordres du conseil exécutif.

6. Néanmoins comme l'exécution des jugements et la poursuite des accusés ou des condamnés n'a point de territoire circonscrit dans une République une et indivisible, le corps législatif déterminera, par une loi, les moyens d'assurer l'exécution des jugements, et la poursuite des accusés dans toute l'étendue de la République.

7. Toutes les fois que des troubles dans l'intérieur détermineront le conseil exécutif à faire passer une partie de la force publique d'un département dans un autre, il sera tenu d'en instruire sur-le-champ le corps législatif.

8. Toutes les parties de la force publique employée contre les ennemis du dehors agiront sous les ordres du conseil exécutif.

9. La force publique est essentiellement obéissante. Nul corps armé ne peut délibérer.

10. Les commandants en chef des armées de terre et de mer ne seront nommés qu'en cas de guerre, et par commission. Ils la recevront du conseil exécutif. Elle sera révocable à volonté, sa durée sera toujours bornée à une campagne, et elle devra être renouvelée tous les ans.

11. La loi de discipline militaire aura besoin d'être renouvelée chaque année.

12. Les commandants de la garde nationale seront nommés tous les ans par les citoyens de chaque commune; et nul ne pourra commander la garde nationale de plusieurs communes.

TITRE XII

DES CONTRIBUTIONS PUBLIQUES

Art. 1er. Les contributions publiques ne doivent jamais excéder les besoins de l'Etat.

2. Le peuple seul a droit, soit par lui-même, soit par ses représentants, de les consentir, d'en suivre l'emploi et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée.

3. Les contributions publiques seront délibérées et fixées chaque année par le corps législatif, et ne pourront subsister au delà de ce terme, si elles n'ont pas été expressément renouvelées.

4. Les contributions doivent être également réparties entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés.

5. Néanmoins la portion du produit de l'industrie et du travail qui sera reconnue nécessaire à chaque citoyen pour sa subsistance, ne peut être assujétie à aucune contribution,

6. Il ne pourra être établi aucune contribution qui, par sa nature

ou par son mode, nuirait à la libre disposition des propriétés, aux progrès de l'industrie et du commerce, à la circulation des capitaux, ou entraînerait la violation des droits reconnus et déclarés par la constitution.

7. Les administrateurs des départements ou des communes ne pourront ni établir aucune contribution publique, ni faire aucune répartition au delà des sommes fixées par le corps législatif, ni délibérer ou permettre, sans être autorisés par lui, aucun emprunt local à la charge des citoyens du département ou de la commune. 8. Les comptes détaillés de la dépense des départements ministériels, signés et certifiés par les ministres, seront rendus publics, chaque année, au commencement de chaque législature.

9. Il en sera de même des états de recettes des diverses contributions et de tous les revenus publics.

10. Les états de ces dépenses et recettes seront distingués suivant leur nature, et exprimeront les sommes touchées et dépensées, année par année, dans chaque département.

11. Seront également rendus publics les comptes des dépenses particulières aux départements et relatives aux tribunaux, aux administrateurs, et généralement à tous les établissements publics.

TITRE XIII ET DERNIER

DES RAPPORTS DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AVEC LES NATIONS
ÉTRANGÈRES ET DE SES RELATIONS EXTÉRIEURES

Art. 1. La République française ne prend les armes que pour le maintien de sa liberté, la conservation de son territoire et la défense de ses alliés.

2. Elle renonce solennellement à réunir à son territoire des contrées étrangères, sinon d'après le vœu librement émis de la majorité des habitants, et dans le cas seulement où les contrées qui solliciteront cette réunion, ne seront pas incorporées et unies à une autre nation, en vertu d'un pacte social, exprimé dans une constitution antérieure et librement consentie.

3. Dans les pays occupés par les armes de la République française, les généraux seront tenus de maintenir, par tous les moyens qui sont à leur disposition, la sûreté des personnes et des propriétés, et d'assurer aux citoyens de ces pays la jouissanse entière de leurs droits naturels, civils et politiques. Ils ne pourront, sous aucun prétexte et en aucun cas, protéger, de l'autorité dont ils sont revêtus, le maintien des usages contraires à la liberté, à l'égalité, et à la souveraineté des peuples.

4. Dans ses relations avec les nations étrangères, la République française respectera les institutions garanties par le consentement de la généralité du peuple.

5. La déclaration de guerre sera faite par le corps législatif et ne sera pas assujétie aux formes prescrites pour les autres délibérations; mais elle ne pourra être décrétée qu'à une séance indiquée au moins trois jours à l'avance, par un scrutin signé, et après avoir entendu le conseil exécutif sur l'état de la République.

6. En cas d'hostilités imminentes ou commencées, de menaces, ou de préparatifs de guerre contre la République française, le conseil exécutif est tenu d'employer, pour la défense de l'Etat, les moyens qui sont remis à sa disposition, à la charge d'en prévenir le corps

législatif, sans délai. Il pourra même indiquer, en ce cas, les augmentations de forces, et les nouvelles mesures que les circonstances pourraient exiger.

7. Tous les agents de la force publique, sont autorisés en cas d'attaque, à repousser une agression hostile, à la charge d'en prévenir sans délai le conseil exécutif.

8. Aucune négociation ne pourra être entamée, aucune suspension d'hostilités ne pourra être accordée, sinon en vertu d'un décret du corps législatif, qui statuera sur ces objets après avoir entendu le conseil exécutif.

9. Les conventions et traités de paix, d'alliance et de commerce seront négociés au nom de la République française, par des agents nationaux nommés par le conseil exécutif et chargés de ses instructions; mais leur exécution sera suspendue et ne pourra avoir lieu qu'après la ratification du corps législatif.

10. Les capitulations et suspensions d'armes momentanées, consenties par les généraux, sont seules exceptées des articles précédents.

ACTE CONSTITUTIONNEL

du 24 Juin 1793 et Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen (2)

DÉCLARATION DES DROITS DE L'HOMME ET DU CITOYEN

Le peuple Français, convaincu que l'oubli et le mépris des droits naturels de l'homme, sont les seules causes des malheurs du monde, a résolu d'exposer dans une déclaration solennelle, ces droits sacrés et inaliénables, afin que tous les citoyens pouvant comparer sans cesse les actes du gouvernement avec le but de toute institution sociale, ne se laissent jamais opprimer et avilir par la tyrannie, afin que le peuple ait toujours devant les yeux les bases de sa liberté et de son bonheur; le magistrat la règle de ses devoirs; le législateur l'objet de sa mission. -En conséquence, il proclame, en présence de l'Être suprême, la déclaration suivante des droits de l'homme et du citoyen.

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Art. 1er. Le but de la société est le bonheur commun. Le gouvernement est institué pour garantir à l'homme la jouissance de ses droits naturels et imprescriptibles.

2. Ces droits sont, l'égalité, la liberté (3), la sûreté, la propriété.

(1) Sic, Moniteur, 19 février 1793, et Réimpression.

(2) Collationné sur l'extrait du procès-verbal (Musée des Archives nationales, no 1363) revêtu du sceau (sur papier) de la Convention, signé par Collot d'Herbois, président, Delacroix, Gossuin, Durand, Maillane, Ducos, P. A. Laloy, secrétaires.

(3) Cf. L. 16 pluviôse an II (abolition de l'esclavage des nègres dans les colonies).

3. Tous les hommes sont égaux par la nature et devant la loi. 4. La loi est l'expression libre et solennelle de la volonté générale; elle est la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse; elle ne peut ordonner que ce qui est juste et utile à la société; elle ne peut défendre que ce qui lui est nuisible.

5. Tous les citoyens sont également admissibles aux emplois publics. Les peuples libres ne connaissent d'autres motifs de préférence dans leurs élections, que les vertus et les talents.

6. La liberté est le pouvoir qui appartient à l'homme de faire tout ce qui ne nuit pas aux droits d'autrui : elle a pour principe la nature; pour règle la justice; pour sauvegarde la loi; sa limite morale est dans cette maxime: Ne fais pas à un autre ce que tu ne veux pas qu'il te soit fait.

7. Le droit de manifester sa pensée et ses opinions, soit par la voie de la presse, soit de toute autre manière (1), le droit de s'assembler paisiblement (2), le libre exercice des cultes (3), ne peuvent être interdits. La nécessité, d'énoncer ces droits suppose ou la présence ou le souvenir récent du despotisme.

8. La sûreté consiste dans la protection accordée par la société à chacun de ses membres pour la conservation de sa personne, de ses droits et de ses propriétés.

9. La loi doit protéger la liberté publique et individuelle contre l'oppression de ceux qui gouvernent.

10. Nul ne doit être accusé, arrêté ni détenu, que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu'elle a prescrites. Tout citoyen, appelé ou saisi par l'autorité de la loi, doit obéir à l'instant; il se rend coupable par la résistance.

11. Tout acte exercé contre un homme hors des cas et sans les formes que la loi détermine, est arbitraire et tyrannique ; celui contre lequel on voudrait l'exécuter par la violence, a le droit de le repousser par la force.

12. Ceux qui solliciteraient, expédieraient, signeraient, exécuteraient ou feraient exécuter des actes arbitraires, sont coupables, et doivent être punis.

13. Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne, doit être sévèrement réprimée par la loi (4).

(1) Cf. L. 29 mars 1793.

(2) Cf. LL. 25 juillet 1793; 9 brumaire an II; 25 ventôse an III; 6 fructidor an III.

(3) Cf. LL. 18 frimaire an II; 3 ventôse an III; 11 prairial an III. (4) V.L. 17 septembre 1793 (suspects) et les notes de l'art. 96,Const.1793.

14. Nul ne doit être jugé et puni qu'après avoir été entendu ou légalement appelé, et qu'en vertu d'une loi promulguée antérieurement au délit. La loi qui punirait des délits commis avant qu'elle existât, serait une tyrannie; l'effet rétroactif donné à la loi serait un crime.

15. La loi ne doit décerner que des peines strictement et évidemment nécessaires : les peines doivent être proportionnées au délit et utiles à la société.

16. Le droit de propriété est celui qui appartient à tout citoyen de jouir et de disposer à son gré de ses biens, de ses revenus, du fruit de son travail et de son industrie.

17. Nul genre de travail, de culture, de commerce, ne peut être interdit à l'industrie des citoyens.

18. Tout homme peut engager ses services, son temps; mais il ne peut se vendre, ni être vendu ; sa personne n'est pas une propriété aliénable. La loi ne reconnaît point de domesticité; il ne peut exister qu'un engagement de soins et de reconnaissance, entre l'homme qui travaille et celui qui l'emploie.

19. Nul ne peut être privé de la moindre portion de sa propriété, sans son consentement, si ce n'est lorsque la nécessité publique légalement constatée l'exige, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité (1).

20. Nulle contribution ne peut être établie que pour l'utilité générale. Tous les citoyens ont le droit de concourir à l'établissement des contributions, d'en surveiller l'emploi, et de s'en faire rendre compte.

21. Les secours publics sont une dette sacrée. La société doit la subsistance aux citoyens malheureux, soit en leur procurant du travail, soit en assurant les moyens d'exister à ceux qui sont hors d'état de travailler (2).

22. L'instruction est le besoin de tous. La société doit favoriser de tout son pouvoir les progrès de la raison publique, et mettre l'instruction à la portée de tous les citoyens.

23. La garantie sociale consiste dans l'action de tous, pour assurer à chacun la jouissance et la conservation de ses droits; cette garantie repose sur la souveraineté nationale.

24. Elle ne peut exister, si les limites des fonctions publiques ne sont pas clairement déterminées par la loi, et si la responsabilité de tous les fonctionnaires n'est pas assurée (3).

(1) Cf. L. 18 mars 1793, portant peine de mort contre quiconque proposera une loi agraire.

(2) Cf. LL. 19 mars 1793; 28 juin 1793, 24 vendémaire an IV. (3) Cf. L. 24 vendémiaire an III.

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