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La jalousie ne peut être ni mieux peinte ni suivie avec plus de vérité et de gradation, mais la tristesse de ce sentiment chez les grands en rend l'injustice et les excès peu soutenables ailleurs que dans le tragique. Cette épreuve fut une leçon utile pour Molière, qui ne considéra plus la jalousie que dans l'ordre bourgeois, où sa naïveté et sa folie furent désormais pour lui une source intarissable de gaîté. On apprendra, dit M. Riccoboni, dans le Prince jaloux, le Cocu imaginaire, le George-Dandin, etc. à tirer d'une seule passion une si grande diversité de sujets.

On ignore ce qu'a voulu dire l'éditeur de 1754,. lorsqu'il a avancé que le fond de cette pièce, tirée de l'Espagnol (1), est vicieux. On n'aperçoit rien qui puisse fonder cette opinion. La fable de l'ouvrage est noble et sage, et n'a contre elle que le sérieux qui la perdit. Les rires qu'avoient excités les Précieuses et le Cocu imaginaire, sembloient avoir interdit à Molière toute autre voie d'amuser ses spectateurs. Il risqua presque toujours de déplaire lorsqu'il voulut prendre un ton plus élevé que celui de ses premiers ouvrages. Quoi qu'il en soit, il subit avec modestie l'arrêt sévère du public. Il paroît même qu'il avoit

(1) L'auteur espagnol s'apeloit Cigognini, à ce que dit la Bibliothèque des Théatres.

dessein que cette comédie héroïque ne parût jamais, puisqu'il en transporta beaucoup de vers dans deux de ses meilleures pièces.

Le Prince jaloux ne fut imprimé qu'après sa mort, dans le septième volume de l'édition de 1682. A l'égard des vers dont Molière a fait un second emploi, voyez la scène V de l'acte II la scène VIII de l'acte IV de Don Garcie, et la scène III du 4. acte du Misantrope; voyez aussi la scène VIII de l'acte II d'Amphitrion.

On ne fera point de remarques particulières sur cette comédie, puisqu'elle est perdue pour le théâtre. On se bornera à observer qu'on trouve dans la dernière scène une faute qu'on n'a point aperçue dans toutes les autres pièces de Molière, c'est d'avoir donné trois syllabes au mot gaité, en l'écrivant ainsi, gayeté.

Mais je vous avouerai que cette gayeté, etc.

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D. ELVIRE.

NON, ce n'est point un choix, qui,pour ces deux amans,

Sut régler de mon cœur les secrets sentimens ;

Et le prince n'a point, dans tout ce qu'il peut être,

Ce qui fit préférer l'amour qu'il fait paroître.

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