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bientôt il ne lui reste que la honte de ses mensonges. On a trouvé dans tous les tems de ces hommes dangereux ; aujourd'hui même il en existe encore. Voici un couplet qui nous a semblé renfermer une comparaison juste.

Tel répand des bruits infidèles,

Qui bien souvent en est l'auteur.
Le fabricateur de nouvelles

Est pareil au faux monnayeur :
L'un, dans son avarice immonde,
De l'or corrompt la pureté;
L'autre corrompt la vérité,

Qui vaut tous les trésors du monde.

ALLÉGORIE, figure de rhétorique. L'Allégorie n'est autre chose qu'une métaphore continuée, qui sert de comparaison, pour donner à entendre une chose qu'on n'exprime point. On sent combien cette figure est froide au théâtre, où les acteurs doivent presque toujours être dans une situation violente, qui ne leur permet que des métaphores vives et rapides. On trouve ce défaut dans plusieurs des dernières pièces de Corneille. (Voyez PERSONNAGES allégoriques. )

ALLEZ VOIR DOMINIQUE, comédie en un acte, par Joseph Pain, au Théâtre du Vaudeville, 1801.

Le fils et le successeur du célèbre Dominique est si prodigue de gaieté sur la scène, qu'il ne lui en reste plus, dès qu'il est obligé d'abandonner le masque. Alors la mélancolie s'empare de lui; il devient sombre, rêveur; et cette profonde tristesse altère en lui les sources de la yie et du bonheur. Son état l'inquiète, et, pour tâcher d'y apporter remède, il mande un médecin à qui l'on

cache son nom de théâtre. Après avoir bien tâté le poulx, et s'être assuré de la situation du malade, le médecin lui conseille de se dissiper. Allez voir Dominique, lui dit-il; Arlequin vous fera rire. Biancolelli quitte un moment son médecin; revient en costume d'Arlequin, et lui donne un plat de son métier. Le médecin reconnaît Dominique, et s'applaudit de lui avoir fait un compliment, sans le savoir. Telle est l'anecdote qui a fourni le sujet de cette pièce. L'auteur y a joint quelques épisodes, qui n'altèrent pas le mérite de cet ouvrage. En général, le couplet est facile, plein de sel et de délicatesse. Le caractère d'Arlequin est un modèle de grâce et de bon comique.

ALLUSION. Ce mot vient du verbe latin alludere, qui signifie jouer. Les allusions sont froides au théâtre, parce qu'elles ne peuvent guères être liées au nœud de la pièce. Ce n'est que de la conversation, ce n'est l'esprit, et toute beauté étrangère est un défaut. Il était ordinaire, avant Corneille, de trouver, dans les pièces de théâtre, des allusions à la fable et à l'histoire.

que

de

Cependant un auteur intelligent peut quelquefois faire entrer, dans la comédie, des traits que le spectateur s'applique; il peut y rappeler des ridicules en vogue, des vices dominans, des événemens publics; mais que si l'on remarque son ce soit comme sans y penser : but, il le manque; il cesse de dialoguer, il prêche. C'était un grand art de Molière: la dissertation 'du maître de langues, dans le Bourgeois-Gentilhomme, sur la manière de prononcer chaque lettre, était une allusion continuelle à un livre ridicule, qui parut alors sur ce sujet.

Quand on fait de ces allusions, il faut que le comique

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puisse survivre au souvenir de la chose, sur laquelle porte l'allusion: comme il est arrivé à ce trait du BourgeoisGentilhomme, qui fait toujours rire, quoique personne ne songe au ridicule qui y a donné lieu.

Il existe encore une sorte d'allusions fréquentes dans les comédies. C'est lorsqu'un personnage rappelle, en riant, un vers connu. Plusieurs fats, dans les comédies disent à leurs rivaux: Je vous laisse;

Les amans malheureux cherchent la solitude.

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Il faut tâcher, autant qu'il est possible, que l'allusion soit comique, comme ce, que dit Cléon au sujet de

Chloé :

Si je n'ai pas plus loin poussé cette conquête,
La faute en est aux dieax, qui la firent si bête.

Par allusion à ce vers d'un opéra:

La faute en est aux dieux, qui la firent si belle.

Ces allusions, qui sont fréquentes dans la société, sont quelquefois très-agréables dans la comédie, qui est la peinture de la société.

ALPHÉE ET ZARINE, tragédie en cinq actes, en vers, à la Comédie-Française, 1788.

Le sujet de cette pièce est tiré d'une anecdote historique, que l'auteur a altérée, pour l'accommoder à sa fable. La scène se passe dans une des Iles - Fortunées. Holbert, roi d'Écosse, après avoir été vaincu par Zarine, reine d'Irlande, a trouvé un asyle, avec les soldats qui lui restent, dans les États d'une autre reine, qui se nomme Alphée. Celle-ci conçoit aussitôt un teudre sentiment pour

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Holbert, et ne tarde pas même à lui en faire l'aveu. Malheureusement pour elle, Holbert n'est point disposé à l'écouter, parce qu'il est épris lui-même de Natalie, jeune princesse, qui l'a suivi dans sa fuite, et dont il est aimé. Pour ne point irriter la jalousie d'Alphée, il fait passer Natalie pour sa sœur, et se dispose à retourner avec elle en Écosse, lorsque Zarine vient le trouver à la cour d'Alphée. Zarine n'a pu se défendre également d'une violente passion pour Holbert, qui, aimé de trois femmes à la fois, se trouve dans une situation fort embarassante. Les deux reines le pressent tour-à-tour de s'expliquer; il ne leur fait que des réponses équivoques, et reste fidèle à Natalie, qui, de son côté, se plait à le tourmenter, en retardant l'aveu de son amour. Enfin, après des incidens très-multipliés, Alphée et Zarine éclatent; elles ont découvert que Natalie est leur rivale heureuse, et se réunissent pour l'immoler à leur ressentiment. Mais bientôt la division se met entr'elles. Zarine, qui est venue à la tête d'une armée, fait investir le palais d'Alphée, et lui envoie ensuite une coupe empoisonnée, qu'elle boit en regrettant

Un seul instant d'erreur et trente ans d'innocence.

Mais Zarine ne jouit pas long-tems de son triomphe: car Holbert, qui l'a vaincue à son tour, épouse en så présence Natalie, qu'on croit morte pendant un acte et demi, et qui reparaît au grand étonnement des spectateurs. Zarine ne peut soutenir ce spectacle; elle se tue, et la toile tombe.

D'après l'analyse de cette pièce, il est aisé de voir combien l'auteur s'est trompé sur le choix de son sujet.

Loin d'exciter la terreur et la pitié, cette tragédie a produit un effet contraire; on y a ri souvent jusqu'aux éclats. Le caractère des personnages, et les situations où ils sont présentés ont paru offrir un résultat comique, qu'un style singulièrement négligé a fait ressortir davantage.

ALPHONSE dit l'IMPUISSANT, tragédie en un acte, par Collé, jouée en société libre en 1739, supposée imprimée à Ongénie. Elle n'était pas faite pour être représentée.

ALPHONSE et LÉONORE ou L'HEUREUX PROCÈS opéra-comique en un acte, par M. le Prévost-d'Iray, musique de Gresnick, au Théâtre-Feydeau, 1797.

Deux jeunes-gens ont hérité d'un procès. L'un est un officier aimable et galant; l'autre, une jeune veuve de vingt ans, qui aime assez à entendre les doux propos d'amour. Tous les deux, obligés de venir à Paris pour le jugement de ce fâcheux procès, voyagent ensemble, l'officier sous le nom d'Alphonse, et la veuve sous celui de Léonore. L'officier lui fait sa cour, et bientôt en devient amoureux; celle-ci écoute avec complaisance les discours galans qu'il lui adresse, et déjà trouve du plaisir à l'entendre. Enfin le hasard, car il en faut presque toujours dans les comédies, le hasard, disonsnous, les fait descendre dans le même hôtel, et de plus leur fait choisir le même avocat. Après quelques petits incidens, fort inutiles et sans motifs, ils apprennent qu'ils sont adversaires; mais comme, sans savoir de qui l'on parlait, on a dit beaucoup de mal l'un de l'autre, on ne sait comment faire pour s'excuser. Mais aussi, comment ne pas être sensible aux procédés de cet homme généreux, qui veut bien déchirer l'acte, qui lui assure

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