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que loin de Troie, et loin de l'époque de sa destruction et du trépas d'Hector; au lieu que, dans la tragédie d'Astyanax, Pyrrhus parle de son amour aux pieds des remparts de Troie, dont on voit encore la flamme ; et il en parle à Andromaque à côté de la tombe d'Hector, d'un époux adoré. Comment intéresser pour unamour, déclaré si hors de saison?

ASTYANAX, tragédie en trois actes, par M. Halma, au Théâtre-Français, 1805.

Ulysse veut qu'on lui livre Astyanax, parce qu'il craint qu'un jour le fils d'Hector ne venge son père. Calchas voudrait bien lui persuader qu'il n'en aura jamais la volonté, ni les moyens: mais Ulysse persiste dans son projet, et fait chercher Astyanax. Andromaque désolée cache son fils dans le tombeau d'Hector, et fait courir le bruit de son trépas. Ulysse n'en croit rien: il interroge cette mère éplorée, à plusieurs reprises. Celle-ci, qui redoute le mensonge, plus même que la mort de son fils, lui répond toujours d'une manière équivoque : elle dit tantôt qu'il est dans la nuit du trépas, tantôt dans le sein de la mort: enfin, voyant qu'il ne peut la faire expliquer plus nettement, Ulysse annonce qu'il va s'en venger, en faisant jeter les cendres d'Hector au vent: ce moyen réussit. Andromaque fait sortir Astyanax du monument funèbre. Ulysse s'attendrit un peu; mais il n'en ordonne pas moins que l'on précipite dans la mer cette innocente victime. Tout-à-coup le tonnerre gronde; Calchas paraît: il demande atı nom des dieux que la victime soit épargnée. Ulysse obéit: la mère et le fils s'embrassent; et la toile tombe avec la pièce.

ASTYANAX, opéra en trois actes, paroles de Jaure, musique de M. Kreutzer, à l'Opéra, 1800.

Bbc

C'est le même sujet que ceux déjà traités par Racine et Château-Brun, et puisés particulièrement dans les Troyennes d'Euripide, et dans la Troade de Sénèque. Le second acte parut fort beau; la musique un peu bruyante, mais souvent énergique : elle fait honneur à M. Kreutzer, l'un de nos virtuoses sur le violon.

ATALANTE ET HIPPOMÈNE, ballet-heroïque, en un acte, par Brunet, musique de Vachon, à l'Opéra, 1769.

On prépare, dans le temple de Vénus, la fête qui doit couronner le vainqueur d'Atalante : les autres amans, dont elle aura triomphé, doivent être sacrifiés, au lieu même de la course, dont elle doit être le prix. Cette fière princesse prie le ciel de ne pas trahir sa gloire ; et cependant elle craint d'être obligée d'immoler Hippomène. Ce prince paraît; elle voudrait le détourner d'un projet, qui doit lui devenir funeste; mais Vénus promet la victoire à Hippomène, au moyen de trois pommes d'or, avec lesquelles il ralentira la course d'Atalante, Leur hymen termine le ballet,

ATELLANES, pièces de théâtres qui, chez les Romains, ressemblaient fort aux pièces satiriques des Grecs, non seulement pour le choix des sujets, mais encore par les caractères des acteurs, des danses et de la musique. Il semble qu'elles ayent eu pour objet, aussi bien que le spectacle satirique des Grecs, de délasser le spectateur, fatigué d'une tragédie, qui n'était pas interrompue un seul moment, puisque le chant du chœur même tenait à l'action,

On appelait ces pièces Atellanes, d'Atella, ville du

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pays des Osques, ancien peuple du Latium, où elles avaient pris naissance, et d'où elles passèrent bientôt à Rome; c'est pourquoi on les trouve nommées dans Cicéron, osci ludi, et dans Tacite, oscum ludicrum.

C'étaient quelquefois des pastorales-héroïques, telles que celle dont parle Suétone, dans la vie de Domitien' ; elle roulait sur les amours de Pâris et d'Enone. Quelquefois c'était un mélange bizarre de tragique et de comique. Elles étaient jouées par des pantomimes, qu'on appelait Atellans, Atellani, ou Exodiaires, Exodiarii, parce que, dit un ancien scholiaste de Juvénal, cet acteur n'entrait qu'à la fin des jeux, pour que les larmes et la tristesse, que causaient les passions dans les tragédies, fussent effacées par les ris et la joie, qu'inspiraient les Atellanes. On pourrait donc, dit Vossius, les appeler des comédies satiriques; car elles étaient pleines de bons mots, comme les comédies grecques; mais elles n'étaient pas, comme celles-ci, représentées par des acteurs, habillés en Satyres. (Voyez SATIRE. )

ATHALIE, tragédie de Racine, 1691.

Cette pièce, que les plus grands connaisseurs regardent comme le chef-d'œuvre de Racine, n'eut pas d'abord, à Paris, le succès qu'elle avait eu à Versailles. L'auteur répond ainsi à ceux qui trouvaient, dans Joas, un esprit et des connaissances au-dessus de son âge : « la France voit, << en la personne d'un prince de huit ans et demi, qui fait >> aujourd'hui ses plus chères délices (le duc de Bourgo

gne, père de Louis XV), un exemple illustre de ce que » peut, dans un enfant, un heureux naturel, aidé d'une » excellente éducation. »

Athalie ne fut point représentée à Saint-Cyr, comme

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quelques personnes l'ont cru, d'après l'Historien du Théâtre Français. Vers la fin de l'année 1690, Racine se disposait à la faire jouer sur le théâtre de cette maison: mais Madame de Maintenon reçut à ce sujet tant d'avis et tant de représentations, de la part de ceux que les ennemis de Racine mettaient en œuvre, qu'elle prit le parti de supprimer tous les spectacles, qui devaient servir au délassement des jeunes pensionnaires. Cependant, comme tout était prêt pour la représentation d'Athalie, elle ne voulut pas perdre le plaisir de la voir exécuter avec les chœurs. Elle fit, à deux différentes reprises, venir à Versailles les jeunes demoiselles, qui en remplissaient les rôles; et elles les déclamèrent, en présence du roi, dans une chambre sans théâtre, vêtues seulement de ces habits modestes et uniformes, qu'elles portaient dans leur couvent. Le peu d'illusion, que doit produire une pièce, ainsi dépouillée de tout appareil théâtral, n'empêcha pas celle-ci de faire la plus grande impression. Louis XIV en parut si satisfait, qu'il accorda à Racine une charge de gentilhomme ordinaire.

Lorsque Racine récitait à ses amis la tragédie d'Athalie, il charmait tous ceux qui l'écoutaient; mais ce n'était, point à la perfection de ce drame, qu'ils attribuaient le plaisir qu'ils éprouvaient; on fut très-long-tems sans en connaître, sans en sentir tout le mérite. Ils regardaient cette espèce d'enchantement, comme l'effet du talent dé ce poëte pour la déclamation.

Racine lui-même ne croyait pas cette pièce supérieure à ses autres tragédies; et regardait Phèdre, comme la plus parfaite. Boileau fut le seul, à qui la prévention générale ne fit point changer d'avis. Je m'y connais bien, disait-il, on y reviendra; Athalie est un chef-d'œuvre.

On répandit, contre cette pièce, une épigramme, qu'on attribuait à Fontenelle, et qui finissait par ce trait pitoyable :

Pour avoir fait pis qu'Esther,

Comment daible a-t-il pú faire?

Quelques personnes de Paris, qui se trouvaient à la campagne, lorsque cette tragédie parut imprimée, s'amusaient le soir à différens jeux. Un cavalier de la compagnie se trouva en faute, et fut jugé digne d'une punition exem→ plaire. On délibéra sur le genre du châtiment ; et enfin, on le condamna à lire le premier acte d'Athalie. Le coupable eut beau se récrier contre un arrêt si cruel, et implorer la miséricorde des juges; on fut inexorable. Le cavalier se retira dans sa chambre, prit en tremblant la fatale tragédie, la lut, et fut saisi d'admiration. Le lendemain, on ne manqua pas de lui demander, s'il avait été exact à accomplir sa pénitence; et l'on fut étrangement surpris de l'entendre dire, que cette scène était le chef-d'œuvre de notre théâtre. Pour prouver ce qu'il avançait, il demanda d'en faire la lecture, en présence de toute la compagnie; et l'ouvrage, qu'on avait traité avec tant de mépris, ne trouva plus que des admirateurs.

La Cour conserva toujours une espèce de prédilection pour Athalie. Louis XIV, en 1702, voulut la voir représenter à Versailles. La duchesse de Bourgogne ne dédaigna point d'y faire le rôle de Josabeth, ceux d'Abner, d'Athalie, de Joas et de Zacharie furent remplis par le duc d'Orléans, la présidente de Chailly, le comte de l'Espar, second fils du comte de la Guiche, et le marquis de Champeroux; Baron le père fut chargé du rôle de Joad; le

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