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l'oreille basse à son tour, est obligé de se prêter à tout ce qu'exige l'Abbé, insulté et menaçant. Que faut-il danser? Un menuet, je vais chanter. L'Abbé, fredonnant un air, et conduisant toujours du pistolet son écolier, devait former un spectacle très-risible pour ceux qui l'auraient vu. Après le menuet, il exige une contredanse, ensuite une allemande ; alors, jetant son pistolet de côté, et tirant son épée : « à présent, Monsieur, que nous n'avons rien à nous reprocher, nous pouvons nous battre à armes égales. -Il n'en sera rien, vons êtes un trop galant homme; vous m'avez corrigé de mon étourderie, et je dois vous remercier d'une pareille leçon : soyons amis, monsieur l'Abbé. » Nos champions s'embrassent à l'instant, et vont, le verre à la main, sceller gaiement leur nouvelle liaison.

ABBÉ PELLEGRIN (l'), comédie en un acte, de MM. Tournai et Audras, au Théâtre du Vaudeville, 1801.

Le second titre, la Manufacturé de Vers, indique assez quel est le fonds de cette bleuette, qu'on a jouée avec succès. En voici le dernier couplet :

A tracer de lâches écrits,

Je n'avilirai point ma plume.
Assez d'autres ont, dans Paris,
Vendu le fiel et l'amertume:
Mais si j'éprouvais, à mon tour,
Le besoin affreux de médire,
Contre les satires du jour,

Je voudrais faire une satire.

ABDÉLAZIS et ZULÉIMA, tragédie en cinq actes,

par M. de Murville, au Théâtre français, 1791.

Abdélazis, guerrier d'une rare valeur, mais d'une naissance obscure, épris du plus violent amour pour Zułéima, fille du roi Almanzor, est parvenu, à force de stratagêmes, jusqu'au point de s'unir et de régner avec elle. D'abord vainqueur dans un tournois, où il refuse de se découvrir, il lui montre son courage, qui la séduit, et lui cache son origine, qui pourrait étouffer un amour naissant. Il fait plus témoin des derniers soupirs d'Abdérame, blessé à mort dans un combat, il profite de la ressemblance extraordinaire qu'il remarque entre le prince et lui-même, se revêt de ses armes, rallie ses troupes, remporte une victoire complette, et, abusant de l'erreur et de la reconnaissance de son roi et de son amante, il accepte, sous le nom d'Abdérame, le trône de l'un et la main de l'autre. Déjà six ans se sont passés, lorsque la scène commence. Un enfant de cet âge est le fruit de l'union des deux époux: l'amour d'Abdélazis est le même; et, sans ses remords, il serait heureux. Bientôt ce bonheur va être détruit. Un vieillard, nommé Narsès, l'ami et le compagnon du véritable Abdérame, a été témoin de sa mort. Il accuse le faux Abdérame; mais, ayant perdu la lettre qui prouve son imposture, il se voit accusé lui-même, et traîné dans une prison, dont Abdélazis le délivre par générosité. Cependant cette lettre, écrite des mains d'Abdérame, tombe dans celles d'Almanzor, qui, dans son indignation, se dispose à faire périr Abdélazis par une mort honteuse. Zuléima, pour épargner à son époux la honté de l'échafaud, et pour venger sa propre injure, se dispose de son côté à poignarder Abdélazis, et à périr sur son corps expirant. Mais, à la vue de son fils, le poignard lui tombe des mains : de plus, après le récit des ruses coupables de son époux, elle pardonne à ses crimes en faveur de son amour. Elle va même

jusqu'à demander la grace d'Abdélazis à son père qui la refuse. Heureusement pour le prince, les ennemis d'Almanzor assiégeaient la ville; et ses guerriers, invincibles sous Abdélazis, avaient été vaincus : honteux et irrités de leur défaite, ils forcent la prison de leur ancien Général, le mettent à leur tête; et, sous ses ordres, repoussent et défont les ennemis : Abdélazis, loin de profiter de sa victoire et de son ascendant sur les troupes, vient se remettre dans les mains d'Almanzor , que désarme cette action généreuse.

Les trois premiers actes de cette tragédie sont languissans tout l'ouvrage même, d'ailleurs trop romanesque, offre des invraisemblances. Mais la pièce, conduite et suspendue avec art, fournit jusqu'à la fin un aliment à la curiosité. Le style n'est ni mâle, ni énergique : mais il est correct, élégant et pur: on peut donc dire en général que l'ouvrage de M. de Murville est un composé de qualités et de défauts : sa tragédie, cependant, a obtenu du succès : à quoi faut-il l'attribuer? à l'ennui et au dégoût du public, qui, rebattu de scènes révolutionnaires, a su le meilleur gré à l'auteur de lui présenter une pièce étrangère aux

circonstances.

Nous remarquerons encore au sujet de cette tragédie que l'auteur, mécontent sans doute de l'acteur, qui jouait le rôle de Narsès, l'a joué lui-même le 24 décembre 1792; cet acteur cependant n'était autre que M. Monvel.

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Mais il convient de dire que les représentations de cette pièce n'avaient été interrompues que par l'indisposition de M. Monvel, et que M. Murville, impatient de voir représenter son ouvrage, fit annoncer qu'il jouerait lui-même le rôle de Narsès, et que, n'ayant jamais paru syr aucun théâtre, il sollicitait l'indulgence du public.

Cette nouveauté, comme on le pense bien, attira un grand concours de spectateurs, auxquels le tragédien impromptu vint, avant la représentation, réciter une fable relative à cette circonstance. La fable fut applaudie, et disposa très-favorablement le parterre pour la représentation: mais la déclamation de l'auteur, loin de toucher et d'émouvoir, excita un rire général.

ABDÉRITES, (les) comédie en un acte, en vers libres, de Moncrif, 1732.

Dans un écrit intitulé: Lettre de l'abbé Cotin à M. de Moncrif, l'abbé dit à l'académicien : les comédies do Molière faisaient rire: celles de la Chaussée font pleurer : vos Abdérites ne font ni pleurer ni rire. Semblable à Théognis, appelé à Athènes xiv, c'est-à-dire, poète de neige, vous tenez l'ame des spectateurs dans une apathie parfaite, sans leur permettre de se livrer au moindre mouvement de tristesse ou de joie.

Doit-on dire des habitans d'Abdère, les Abdérites ou los Abdéritains?

J'ai des Abdéritains contracté le travers;

A quiconque viendra, je lui lirai mes vers.

FRANÇOIS DE NEUFCHATEAU.

ABDILLY, roi de Grenade, tragi-comédie, en trois actes et en prose, par Delisle et madame Riccoboni, au Théâtre Italien, 1729.

A la représentation de cette pièce, un instant avant qu'elle commençât, le parterre, voyant un abbé placé au théâtre dans les premiers rangs, se mit à crier à bas,

M.

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M. l'abbé, à bas ! L'abbé resta tranquille en dépit des clameurs ; mais, comme on continuait à le huer, il se leva, et,s'adressant au parterre : « Messieurs, dit-il, depuis qu'on ma volé une montre d'or en votre compagnie, j'aime mieux qu'il m'en coûte une place au théâtre, que de risquer encore ma tabatière. Les huées se changèrent en applaudissemens, et M. l'abbé reprit sa place.

ABDIR, drame en quatre actes et en vers, par M. de Sauvigny, au Théâtre Français, 1785.

Un chef Nangès a fait massacrer le fils d'un ennemi de sa cause : le père de la victime, brûlant de la venger, veut qu'on lui livre le meurtrier. N'ayant pu l'obtenir, il fait tirer au sort les prisonniers Nangès, pour en dévouer un à la mort. Le jeune Abdir est désigné, et bientôt on lui prononce son arrêt. Le chef du parti, qui combat pour la liberté, ne peut se décider à faire exécuter cet arrêt rigoureux. Il le faut cependant, afin d'arrêter à l'avenir de semblables attentats d'ailleurs, le vieillard seul a le pouvoir de faire grâce. Abdir va donc périr mais sa mère arrive, et sa douleur et ses larmes attendrissent le vieillard ; il va même jusqu'à pardonner au coupable, pourvu qu'il embrasse son parti: le généreux Abdir préfère la mort à la condition qu'on lui impose: alors on le conduit à l'échafaud. Mais, dans l'instant où il s'arrache des bras de sa mère pour y monter, un Ambassadeur du monarque Persan lui apporte sa grâce.

Tel est le sujet d'Abdir. On remarque de l'énergie dans

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le style, et de la noblesse dans les caractères.

ABDOLONYME, comédie en cinq actes, en prose, de Fontenelle, imprimée en 1751.

D

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