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qu'il avait composée. Æsopus, contemporain de Cicéron, laissa en mourant à son fils, dont Horace et Pline font mention comme d'un fameux dissipateur, une succession de 2,500,000 liv., qu'il avait amassées à jouer la comédie.

L'Art dramatique dégénéra ensuite à Rome; et il faut passer au quinzième siècle pour le voir renaître en Italie.

Sous le règne de Léon X, la Sophonisbe du célèbre prélat Trissino, nonce du Pape, est la première tragédie régulière qui ait paru en Europe, après tant de siècles de barbarie; comme la Calandra du cardinal Bibiéna avait auparavant été la première comédie, qu'eût encore vue l'Italie moderne.

L'Arioste, Apostolo-Zéno, Métastase, Goldoni et Alfieri occupent les plus belles pages des annales du Théâtre Italien.

L'Espagne connut les spectacles, dès que les Romains y eurent introduit la bonne poésie : les ruines des anciens théâtres prouvent combien on se plaisait à ces divertissemens. Mais les Goths et les autres Barbares, qui assujétirent ce royaume, en chassèrent les Muses, et avec elles les plaisirs de Thalie les Arabes les y rappelèrent, et donnèrent des représentations théâtrales, qui, jointes à quelques drames provençaux, servirent

de modèles aux premières comédies castillannes. Au reste, les sujets étaient, tantôt des Amours de bergers, tantôt des Mystères de la religion, tels que la Naissance de J. C., la Tentation dans le Désert, la Passion, ou le Martyre de quelque Saint.

Bientôt le Théâtre Espagnol sortit de son obscurité: il dut son premier éclat à Lopès de Séville et à l'illustre Michel Cervantes : Lopès de Véga, Caldéron, Solis, Moréto et Zamora contribuèrent à sa gloire (1).

Le Théâtre Germanique est non moins ancien, et, jusqu'au temps de Corneille et de Molière', aussi brillant et plus fécond que le Théâtre Français. On y compte depuis l'an 1480 jusqu'en 1800, plus de trois mille pièces imprimées.

Griph et Weiss, l'un, auteur tragique, l'autre, comique, et contemporains de Corneille et de Molière, n'ont rien fait que l'on puisse comparer à la moindre production de ces grands hommes. Gottscheld, de l'Institut de Bologne, réforma la scène allemande, instruisit les acteurs, et excita les jeunes auteurs à travailler. Pitschel, Behrmann, Schlegel, Kruger et Stéphens brillèrent dans le dix-huitième siècle. Leissing, Goethe

(1) Voy. Théâtre Espagnol.

Schiller, Ifland et Kotzebue sont au premier rang parmi les poètes germaniques (1).

On croit généralement que l'Angleterre n'a eu son Théâtre, qu'après tous ses voisins. Cependant on parle de certains poètes vagabonds, qui, dès le quatorzième siècle, exécutaient des Farces en pleine campagne. Les Anglais eurent comme les Italiens, les Espagnols et les Français, des mystères et des moralités, qui étaient quelquefois joués par des Ecclésiastiques. L'Aiguille de Dame Gurton, représentée sous le règne de Henri VIII, est regardée comme la première comédie anglaise, c'est-à-dire, la plus ancienne. Alors, Henri Parker composa des tragédies, et Jean Hoker s'exerça dans le genre comique. Sackville, Norton, Heywood parurent ensuite; mais l'Art n'était encore qu'à son enfance, et il ne reçut une véritable existence que du génie créateur de Shakespear, le Corneille de l'Angleterre.

Shakespear, Johnson, Dryden, Adisson, Congrève, Wycherley, Ottway, Quin, Garrick et Sheridan seront toujours illustres dans les fastes du Théâtre Anglais (2).

Les Histrions ou Farceurs commencèrent leurs jeux, sous les rois de France de la première race.

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Charlemagne, informé de leur indécence, les proscrivit par une ordonnance en 789. Mais l'enthousiasme du peuple pour le spectacle donna lieu à un abus, encore moins supportable: sous le prétexte de célébrer les fêtes des Saints, on joua des comédies jusques dans les églises; et la plupart de ces pièces informes étaient entremêlées de chants obscènes et de bouffonneries sacrilèges.

Ces abus intolérables durèrent jusqu'en 1198. Eudes de Sully, Évêque de Paris, s'en plaignit amèrement bientôt la Cour et le Parlement accueillirent ses plaintes; les bateleurs furent chassés, et ces honteux spectacles, entièrement abolis. Plusieurs années après, des poètes provençaux ou Troubadours inventèrent un nouveau genre de représentations, sous les noms de Chanterels, de Pastorales et de Comédies, dans lesquels ils jouèrent eux-mêmes. Le charme de la pantomime, du chant, de la rime, et plus encore de la nouveauté, attira bientôt à ces spectacles un prodigieux concours de spectateurs.

Ces Troubadours prospérèrent jusqu'en 1582; mais la mort de la Comtesse de Provence, qui les protégeait alors, les dispersa d'ailleurs, leurs mauvaise conduite les avait rendus odieux. Phi

lippe-Auguste, en les chassant du royaume, dit que le théâtre du monde fournissait assez de

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comédiens originaux, sans qu'on s'amusát à les copier. Quelque tems après, ce monarque, truit que les plus célèbres d'entr'eux s'étaient corrigés, leur permit de rentrer en France, et d'y r'ouvrir leurs spectacles.

Il faut convenir que, dans ces prétendues comédies des Troubadours, l'on ne trouve rien qui ait le moindre rapport à l'Art dramatique.

Vers la même époque, des Pélerins, qui revenaient de Jérusalem, arrivèrent à Paris, et se mirent à réciter et à chanter, dans les carrefours et sur les places publiques, ce qu'ils avaient vu de plus intéressant dans leur voyage de la Terre-Sainte. Le zèle de quelques riches bourgeois de la ville, enchantés de leurs dévots récits, et persuadés qu'ils ne pouvaient mieux servir la religion, leur fit entreprendre de former avec ces pélerins un spectacle public. Ils établirent donc un théâtre à Saint-Maur, près de Vincennes: des poètes mirent en action tout ce que les voyageurs chantaient ou récitaient en arrivant ; et des placards annoncèrent l'ouverture de ce nouveau théâtre, sous le titre du Mystère de la Passion de N. S. J. C. L'affluence du peuple fut si grande aux premières représentations, elles occasionnèrent tant de désordres et d'accidens, que le prévôt des marchands défendit ce spectacle.

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